dimanche 7 octobre 2018

Everything, everything - Nicola Yoon


Everything, everything - Nicola Yoon

Editeur : Bayard
Nombre de pages : 361
Résumé : Ma maladie est aussi rare que célèbre, mais vous la connaissez sans doute sous le nom de « maladie de l’enfant-bulle ». En gros, je suis allergique au monde. Je viens d’avoir dix-huit ans, et je n’ai jamais mis un pied dehors. Un jour, un camion de déménagement arrive. Je regarde par la fenêtre et je le vois. Le fils des nouveaux voisins est grand, mince et habillé tout en noir. Il remarque que je l’observe, et nos yeux se croisent pour la première fois. Dans la vie, on ne peut pas tout prévoir, mais on peut prévoir certaines choses. Par exemple, je vais certainement tomber amoureuse de lui. Et ce sera certainement un désastre.

- Un petit extrait -

« Mais il n'y a pas qu'un seul moment. Il y en a toute une série. Et votre vie peut partir dans des centaines de directions différentes. Peut-être existe-t-il des versions de votre vie correspondant à tous les choix que vous avez faits et tous ceux que vous n'avez pas faits.  »

- Mon avis sur le livre -

Maintenant que j’ai (enfin) tourné la dernière page de ce roman, après des années d’attente et de frustration (non, non, je n’avais pas du tout commencé à le lire au Super U en attendant que maman finisse les courses …), je me rends compte de la chance inouïe qui fut la mienne : plus de trois ans après la sortie de ce livre, et malgré une adaptation cinématographique, je suis parvenue à passer à travers le moindre spoiler … Je me suis plongée dans ce récit sans rien savoir de plus que ce que m’annonçait la quatrième de couverture, et j’en suis immensément ravie ! Je suis très heureuse également, a posteriori, que le petit cinéma associatif de la vallée ait zappé ce film l’an dernier : je pense que j’aurai drôlement moins savouré ce roman si je connaissais déjà l’histoire à travers l’adaptation ! 

Maddie a dix-huit ans, et n’est jamais sortie de chez elle. Le monde extérieur, elle ne le connait qu’à travers ses lectures, qu’à travers les films qu’elle regarde le soir avec sa mère, qu’à travers la fenêtre hermétiquement close de sa chambre. Le monde extérieur est plein de danger pour elle, atteinte de la maladie communément connue sous le nom de « l’enfant-bulle ». Tout ce qui est mis en contact avec elle - air, nourriture, objet, individu - doit être décontaminé, filtré, purifié. Jusqu’à présent, Maddie ne se plaignait pas vraiment de cette existence monotone : elle avait sa mère, et Carla son infirmière, elle avait ses livres et ses cours d’architecture passionnants, elle avait ses habitudes et ses petits rituels rassurants. Mais voilà que l’arrivée des nouveaux voisins, et plus particulièrement d’Olly, va bouleverser ce quotidien bien rythmé … Voilà que soudainement, Maddie ressent l’envie, le besoin, de connaitre le monde extérieur pour de vrai

En débutant cette lecture, je m’attendais forcément à quelque chose de fort, à quelque chose de puissant,  à quelque chose d’émouvant … et pourtant, je n’étais clairement pas préparée à ce qui m’attendait réellement dans ce roman. Cela allait infiniment au-delà de toutes mes espérances, de toutes mes attentes. C’est un livre qui commence doucement, comme une petite brise fraiche et agréable un soir d’été, et qui se termine violemment, brusquement, comme une tornade imprévisible qui vous secoue dans tous les sens avant de vous laisser tout hébété sur le bord de la route. C’est un livre qui vous fait passer par toutes les émotions possibles et inimaginables, joie, tristesse, colère, surprise, peur, espoir … C’est un livre profondément bouleversant : vous n’en sortez pas indemne, vous n’êtes clairement plus pareil à la fin qu’au début. Parce que c’est un livre qui, sans que l’on ne s’en rende véritablement, brouille les frontières entre narrateur, personnage et lecteur : c’est un peu comme si on se fondait en Maddie, ou comme si Maddie se fondait en nous, même si on n’a pas grand-chose en commun avec elle. Alors, du coup, tout ce que vit Maddie, tout ce que ressent Maddie, on le ressent intensément, nous aussi … et lorsque Maddie a le cœur brisé, alors on l’a nous aussi.

Comme je l’ai déjà dit, c’est un roman qui commence calmement. On ressent bien toute la monotonie et la platitude du quotidien de Maddie : étude, lecture, soirée-filles avec sa maman, le tout rythmé par les différents contrôles médicaux effectués par son infirmière à plein temps. Et puis, lorsqu’Olly fait son irruption, tout s’accélère … en particulier les battements de cœur de Maddie, qui se découvre une nouvelle maladie, au moins aussi grave que la première : elle est amoureuse. Elle est amoureuse, et alors, tout ce qui lui semblait convenable et supportable jusqu’à présent ne l’est plus. Elle n’en peut plus d’être enfermée, de ne voir personne d’autre que sa mère et son infirmière, d’être contrainte de tout vivre à travers les personnages de romans. S’impose alors une grande question : quel est le plus important, sa santé physique ou mentale ? Peut-être encore supporter longtemps cet enfermement au nom de la sécurité ? N’est-elle pas suffisamment grande pour décider de prendre le risque de sortir, de vivre enfin, d’être heureuse, malgré les dangers que cela implique ? Mais plus encore : doit-elle penser d’abord à elle, à ce bonheur intense que sortir en compagnie d’Olly entrainera, ou bien à sa mère qui l’aime tant, qui va tant s’inquiéter et qui sera si seule et dévastée s’il lui arrivait quelque chose ?

Plus qu’une simple histoire d’amour, bien que cette dernière soit absolument adorable et émouvante, ce roman évoque le passage à l’âge adulte, les relations familiales - qu’il s’agisse du lien entre Maddie et sa mère, entre Carla et sa fille, entre Olly et ses parents -, l’espoir, le doute … Ce récit ne se contente donc pas de nous parler d’Olly et Maddie, de Maddie et d’Olly, de leur amour contrarié par la maladie de Maddie, de leur amour qui va pousser cette dernière à prendre des risques pour pouvoir le vivre plus intensément. S’il ne s’agissait que de cela, l’histoire aurait finalement été bien prévisible. Et croyez-moi, quoi que vous imaginiez, vous n’y êtes pas : je ne m’attendais pas du tout, mais alors vraiment pas, au tournant que prend l’histoire, au coup de théâtre qui transforme une histoire d’amour somme toute assez banale en quelque chose de bien plus profond, de bien moins mignon. Car se pose alors une ribambelle de nouvelles questions, c’est une autre thématique qui s’ouvre alors que rien ne l’annonçait. Ce fut une belle surprise que ce rebondissement inattendu, car je compte bien, un jour ou l’autre, relire tranquillement le roman en gardant bien cette fin à l’esprit pour voir si quelques indices ne se cachent pas ci et là, des indices auxquels j’aurai été aveugle lors de ma première lecture puisque je ne pouvais absolument pas me douter d’une chose pareille … 

Avant de clôturer cette chronique, je tiens tout de même à évoquer un dernier élément : la narration. Quelle fraicheur que cette plume, agrémentée de dessins, de schémas, de tableaux, de mails, de conversations instantanées … Maddie raconte sans témoigner, elle nous expose sa vie, des pensées, ses états d’âme, sans jamais rien omettre, sans jamais rien rajouter. Nous avons des chapitres qui n’en sont pas vraiment, des extraits de journal intime, des captures d’écran de commandes sur internet … J’aime beaucoup la plume de l’auteur, à la fois riche en émotions et pleine de vitalité et d’humour. Le ton est tantôt léger, tantôt grave, selon l’humeur de Maddie, selon ses réflexions du moment, selon le livre qu’elle est en train de dévorer … Les phrases sont courtes, percutantes, rythmées. C’est clairement un roman qui se dévore à une vitesse incroyable, à la fois parce qu’on est happé par l’histoire et qu’on ressent le besoin presque vital de savoir ce qui va arriver par la suite, et parce que la narration est vraiment très fluide et agréable, ça se lit sans que l’on ait conscience de le lire, c’est étrange et impressionnant !

En bref, vous l’aurez bien compris, quel merveilleux roman ! Emouvant à souhait, étonnant au possible, et surtout incroyablement rafraichissant, ce roman est à la fois léger et très profond, selon le point de vue que l’on porte sur l’histoire, selon l’aspect du récit auquel on est le plus sensible. Plus d’une fois, Maddie évoque Le petit prince, et sa principale caractéristique qui est que « le sens change à chaque nouvelle lecture » (ce en quoi je suis parfaitement d’accord avec elle) … mais je pense vraiment qu’il en est de même pour Everything, everything : c’est un livre qui, clairement, résonnera différemment dans le cœur du lecteur selon son humeur du moment, selon ses préoccupations du moment, selon ses affinités pour telle ou telle thématique … Derrière ce résumé finalement assez banal se cache une histoire bien plus riche et bien moins prévisible que je ne l’imaginais ! Lisez ce livre, et préparez-vous à changer de regard sur le monde …


Ce livre a été lu dans le cadre de la Coupe des 4 maisons
(plus d’explications sur cet article)

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