vendredi 22 septembre 2023

Extinction, tome 1 - Guy-Roger Duvert

Extinction1, Guy-Roger Duvert

 Editeur : Autoédition
Nombre de pages : 307
Résumé : L’univers est rempli de civilisations extraterrestres éteintes. Et s’il y avait une raison terrifiante à ce qu’aucune ne soit parvenue à survivre ? Les Archéonautes, premiers Terriens à quitter le système solaire pour partir à la découverte de ruines d’une multitude de civilisations disparues, guidés par leur curiosité et une soif inextinguible de connaissance, vont tenter de percer ce mystère dans l’espoir de voir l’humanité être la première civilisation à échapper à ce destin funeste.

 Un grand merci à Guy-Roger Duvert pour l’envoi de ce volume et à la plateforme SimPlement pour avoir rendu ce partenariat possible.

 

- Un petit extrait -

« Or, [ils] avaient apparemment tiré une conclusion terrifiante de cette découverte : selon eux, il y avait une explication au fait qu’aucune civilisation n’ait finalement jamais survécu. Si certaines devaient se développer et se maintenir suffisamment longtemps, alors quelque-chose était là pour s’assurer de leur extinction. [Leurs] dirigeants, conscients du niveau de progrès réalisé par leur société, et selon leurs dires ne devinant aucune raison pour leur monde de s’éteindre, voyaient donc cette menace inconnue comme très concrète. S’ils devaient disparaître un jour, ce ne serait pas du fait de leurs propres errements, mais bien à cause de ce danger mystérieux.  »

- Mon avis sur le livre -

 Il s’en est fallu de peu, mais l’humanité a évité le pire : l’ombre d’une troisième guerre mondiale, qui planait depuis bien des décennies, est définitivement écartée, et la paix règne à nouveau autour du globe. L’heure est à la Confédération planétaire : malgré ses défauts, cette organisation politique mondialisée permit au genre humain de faire face aux pandémies et aux flux migratoires sans que n’éclate de nouveaux conflits meurtriers. Mais une menace rôde toujours, toute aussi forte si ce n’est plus : surexploitée, à bout de souffle, la Terre devient chaque jour qui passe un peu plus inhospitalière, un peu plus hostile à la vie. A la vie humaine tout particulièrement. Durant un temps, la découverte et l’exploitation d’une technologie extraterrestre sur Mars permit aux hommes de résoudre l’épineuse question du manque d’énergie … Mais reste toujours celle, toute aussi problématique, du manque de ressources : à force de puiser sans vergogne dans le capital terrestre, sans laisser à la planète la possibilité de se reposer et de reconstituer ses réserves, l’humanité aveuglée par sa frénésie de croissance et de consommation, d’insouciance et de loisirs égoïstes, a signé son propre arrêt de mort. Prise à la gorge, la Confédération lance alors une mission de grande ampleur : envoyer quelques scientifiques aux confins de l’univers pour traquer cette mystérieuse civilisation extraterrestre …

Retour aux sources du space-opera avec cette nouvelle saga : nous retrouvons ici plusieurs postulats de base de la saga Outsphere du même auteur, même si l’ambiance est clairement moins morose, presque optimiste. Sans avoir résolu l’intégralité des problèmes, l’humanité est parvenu à maintenir une certaine forme d’équilibre : la mise en place d’une Confédération planétaire, quoiqu’étant une solution imparfaite, s’est avérée être la seule capable de mettre fin aux nombreux conflits latents qui menaçaient de mener à une troisième guerre mondiale. La paix règne à nouveau sur le globe, forcément fragile, mais préservée coute que coute. La découverte inopinée de ruines, et surtout de technologies avancées, extraterrestres sur le sol de Mars constitua un deus ex machina parfait pour résoudre la question de l’énergie, devenue capitale pour subvenir à la demande toujours croissante des hommes. Pacifiée, rassasiée, l’humanité semble pouvoir prospérer à nouveau, libérée de toute entrave, de toute contrainte, de toute crainte. De toute ? A vrai dire, pas vraiment : nous ne sommes pas dans une utopie à la Bisounours où tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Il reste un gros problème, un énorme problème gros comme une planète : la Terre a fait de son mieux, mais elle n’est plus capable de fournir aux hommes toutes les ressources dont ils ont besoin. C’est fini. Elle a atteint ses limites, elle ne peut plus rien offrir : l’humanité vit à crédit, sans pouvoir rembourser sa dette. L’avis d’expulsion, ou plutôt d’extinction, se rapproche inexorablement ….

Il faut donc trouver une solution. Et vite. Du moins le plus vite possible. Les fameuses ruines extraterrestres trouvées sur Mars ont prouvé que l’univers connait, ou du moins a connu, au moins une autre grande civilisation. Quelque part dans le cosmos, vit ou a vécu une autre espèce intelligente, plus avancée même que nous autres humains. Peut-être auront-ils une solution à notre problème, peut-être pourront-ils nous aider. Et si ce n’est eux, du moins leurs vestiges. Tout est bon à prendre. Et c’est ainsi qu’une petite équipe de scientifiques, surnommés les Archéonautes, est envoyée au fin fond de l’espace pour chercher – et trouver – ces êtres extraterrestres ou les ruines de leur civilisation. L’exploration spatiale est déjà quelque chose d’assez fascinant (même si je dois honnêtement avouer faire partie de ceux qui n’ont pas très envie que l’homme aille bousiller une autre planète après avoir détruit la nôtre, on a fait assez de dégâts comme cela, laissons donc le reste de l’univers en paix), mais quand on y ajouter la perspective d’y trouver d’autres formes de vie intelligentes, on arrive vraiment à quelque chose d’incroyable. Je peux vraiment comprendre l’excitation des héros de cette histoire : non seulement ils savent que les résultats de leur recherche contribueront à améliorer la vie de l’humanité (et peut-être même à la sauvegarder purement et simplement), mais en plus ils auront peut-être la chance de faire la connaissance d’autres êtres intelligents ! « Sommes-nous seuls dans l’univers ? » est assurément l’une des plus grandes questions qui hantent l’homme depuis les origines, juste après l’interrogation métaphysique cruciale « y a-t-il quelque chose après la mort ? » …

D’ailleurs, et c’est quelque chose que j’ai vraiment apprécié dans ce récit et qui le rend très différent d’Oustphere en dépit de leurs ressemblances initiales, ces deux questions finissent ici par s’entremêler, subtilement, magistralement. Car même si nous sommes avant tout dans ce qui se veut être une incroyable et formidable grande aventure spatiale, avec de l’action et du rebondissement à répétition, il y a vraiment un petit côté « philosophique » en arrière-fond. Car derrière la quête de nos Archéonautes, qui cherchent donc à comprendre comment il est possible de trouver des ruines extraterrestres sur Mars sans parvenir à établir un moindre contact avec cette civilisation extraterrestre, se pose finalement en arrière-fond la question de l’avenir de notre propre civilisation : sommes-nous immortels, non pas en tant qu’individus, mais en tant que société ? Tout ce que nous avons construit, et dont nous sommes si fiers, ne finira-t-il pas par devenir des vestiges figés dans le temps de notre existence éphémère ? Peut-être que dans des centaines de milliards d’années, des « archéonautes extraterrestres » viendront à leur tour visiter notre petite planète désolée et étudiera notre société à travers les traces matérielles que nous aurons laissées. Allons-même plus loin : quelle image voudrions-nous donner de notre humanité, quelles traces souhaiterions-nous laisser ? Avons-nous réellement envie que ces potentiels extraterrestres du futur en viennent à la conclusion que nous avons été des parasites qui ont gâché l’intelligence qui leur a été donné en détruisant leur planète, en surconsommant de manière hystérique et aveugle, en nous abrutissant nous-mêmes dans l’utilisation d’une technologique qui finira par nous dépasser ? Individuellement et collectivement, qu’allons-nous laisser derrière nous ? La question est ouverte …

En bref, vous l’aurez bien compris, une fois encore, Guy-Roger Duvert m’a pleinement convaincue. Comme toujours, il nous offre un récit passionnant, palpitant, riche en rebondissements, en coups de théâtre, en explosions d’adrénaline et en révélations incroyables : on ne peut clairement pas s’ennuyer quand on lit du Guy-Roger Duvert ! C’est le genre de roman qu’on n’arrive pas à lâcher, qui nous font répéter « aller, encore un chapitre, un seul », encore et encore, jusqu’à tourner la dernière page sans même s’en être rendu compte. C’est le genre de roman qui se lit « vite et bien », à la narration tellement fluide qu’on n’a même pas conscience qu’on est en train de lire : c’est presque comme si le film se déroulait sous nos yeux à chaque mot que nos yeux survolent, c’est dynamique, vivant, incroyable ! Mais comme toujours également, à demi-mots, sans vraiment en avoir l’air, c’est un roman qui dit énormément de choses de notre société, qui pose sans les poser vraiment beaucoup de questions. On peut, bien sûr, se contenter de le voir comme un simple récit d’aventure interplanétaire, mais on peut très facilement également aller plus loin, voir les enjeux qui se cachent derrière cette « simple » histoire. La porte est ouverte à de grandes et longues réflexions, aux débats également. Et personnellement, c’est vraiment cet aspect-là que j’ai le plus apprécié : les livres sont peut-être des prismes qui nous aident à déchiffrer le monde dans lequel nous vivons, qui nous poussent à nous y intéresser et à forger nos propres opinions en prenant un peu de recul. Et en cela, la science-fiction est idéale : en nous « voyant » à partir du futur, nous sommes quelque peu « contraints » de nous remettre en question … Ou à faire l’autruche, à chacun de voir.

dimanche 9 juillet 2023

La Bibliothèque, tome 3 : Aimer - Pauline Deysson

La Bibliothèque3, Pauline Deysson

Aimer

 Editeur : Autoédition

Nombre de pages : 592

Résumé : À 20 ans, trahie, blessée, Émilie ne croit plus en elle et pénètre à contrecœur dans son troisième livre-rêve : un labyrinthe aux voies protéiformes. Pour la première fois, des rêveurs l'accompagnent. Tour à tour adversaires, guides ou amis, ils la conduisent vers le centre du dédale... Et vers la clé de ses pouvoirs. Mais la barrière entre les mondes s'effrite, et la réalité de Jean se rapproche dangereusement du rêve d'Émilie. L'accompagnerez-vous ?

 

Un grand merci à Pauline Deysson pour l’envoi de ce volume.

 

- Un petit extrait -

« J’en ai assez ! Assez de souffrir aveuglément pour un combat qui n’est pas le mien. D’abord vous écrivez pour moi un livre merveilleux où je sauve le Technomonde grâce à la magie, ensuite vous m’envoyez sans aucun avertissement dans un autre rêve inspiré du passé, où je suis vouée à perdre une guerre que je ne peux empêcher. Non contente de manipuler mes émotions sous le prétexte de faire de moi une Bibliothécaire, vous permettez à Jean d’entrer dans mon livre. Vous le laissez posséder mon âme. Et tout cela pourquoi ? Parce qu’en plus d’abandonner tous mes idéaux, il était important que je sache quelle menace votre ancien apprenti représente. Vous jouez avec moi ! »

- Mon avis sur le livre -

 D’aussi loin que je puisse me souvenir, la lecture faisait en quelque sorte partie de mon identité : je me présentais comme une « grande lectrice » avant tout. Je ne pouvais imaginer, concevoir, ma vie sans les livres, et il ne me serait jamais venu à l’esprit que, peut-être, un jour, je m’éloignerai de la lecture. Et pourtant. Pourtant, imperceptiblement, ces derniers mois, voire même ces dernières années, mon rapport à la lecture a évolué. Il m’arrive parfois de passer plusieurs jours sans lire, happée que je suis pas mes autres occupations, perturbée que je suis par le bouleversement incessant de mon quotidien. J’en suis la première surprise et attristée, mais la lecture n’est plus le pivot de mes journées. Je n’arrive plus à me plonger dans un livre avec autant d’intensité qu’avant, je ne ressens plus cette joie infinie au moment de me laisser happer par une histoire : d’une certaine façon, je pense que je suis brusquement devenue plus exigeante, qu’à force de lire, j’ai fini par faire le tour de ce que les auteurs avaient à me proposer. Les « modes » littéraires actuelles ne me correspondent pas, je n’ai plus forcément la curiosité de tester de nouveaux genres. Alors je me contente des auteurs et sagas que je connais et apprécie déjà, espérant ainsi raviver quelque peu cette flamme qui s’est tarie … Et quoi de mieux qu’un petit tour dans la Bibliothèque pour essayer de retrouver le gout de la lecture, n’est-ce pas ?

Blessée au plus profond de son âme, de son cœur, de son être, par son deuxième livre-rêve, Emilie voit toutes ses certitudes voler en éclat en même temps que ses idéaux : à quoi bon faire rêver nuit après nuit les hommes, puisqu’ils ne se souviennent jamais de leurs songes ? que peut-elle leur apporter de bon, elle qui n’a su empêcher la guerre à Alma et qui a assassiné un gomme au nom d’une conviction ? Désillusionnée, la jeune Apprentie Bibliothécaire ne sait plus qui elle est vraiment, et encore moins qui elle veut devenir : elle ne sait plus ce qu’elle veut, ce qu’elle vaut. Elle qui croyait pouvoir changer le monde, rendre heureux tout le monde, fait désormais face à la plus terrible des désillusions : quoi qu’elle fasse, elle ne pourra jamais garantir paix et bonheur à tous les hommes, car les désirs des uns briseront ou écraseront les besoins des autres, car les êtres humains sont d’éternels insatisfaits aux souhaits volatiles. Alors quel est le sens de son existence, quel rôle est-elle appelée à jouer ? Poussée par son mentor, Emilie s’apprête à entrer dans son troisième livre-rêve : un labyrinthe sans cesse changeant, au cœur duquel elle trouvera son être véritable, découvrira les réponses à toutes ses questions. Mais cette fois-ci, Emilie ne sera pas seule : c’est accompagnée de rêveurs qu’elle arpentera ce dédale insaisissable … sans savoir ce qui l’attend véritablement au bout du chemin, au bout du rêve.

Plus que jamais, diverses intrigues se mêlent et s’entremêlent, dans un entrelacs délicat mais parfois difficile à suivre : d’un côté, il y a l’apprentissage d’Emilie au cœur de la Bibliothèque, ce lieu hors du temps et de l’espace où les âmes des hommes endormis viennent chercher des songes ; de l’autre, il y a le Technomonde et tous ses habitants, persuadés d’être libres et heureux, enfermés dans une illusion passive tandis que Jean fomente dans l’ombre son ultime projet ; et entre les deux, il y a les nombreux rêves qu’Emilie partage avec les rêveurs, les innombrables tentatives pour atteindre le cœur du labyrinthe. Les réalités se mélangent, au point de devenir parfois impossibles à distinguer : parfois, Emilie ne sait plus si elle est dans un rêve, dans sa réalité, dans celle du rêveur. Parfois, le lecteur lui-même doit y réfléchir à deux fois avant de démêler le vrai du faux, avant de reconstituer le cours des choses, car contrairement aux deux premiers opus dans lesquels le livre-rêve occupait quasiment tout le roman et se faisait d’un bloc, ici, Emilie passe sans cesse de la lecture à la Bibliothèque. C’est à la fois brillant et quelque peu déconcertant, en somme … à la fois plaisant et déroutant. Ce n’est assurément pas un livre que l’on peut lire « pour se détendre », il faut avoir l’esprit alerte et être pleinement présent pour ne pas se perdre.

Et cela d’autant plus que, plus que jamais également, tout l’enjeu se situe finalement dans le cheminement intérieur de notre jeune Emilie. On est définitivement dans un récit initiatique aux accents métaphysiques : à l’aube de l’âge adulte, la jeune femme se retrouve confrontée aux grandes questions de l’existence. Elle a besoin de savoir qui elle est, mais aussi qui elle veut devenir. Elle a besoin de savoir si sa route est déjà toute tracée devant elle, pour elle, ou si elle a la possibilité de tracer son propre chemin, son propre destin. Elle a pris conscience, douloureusement, que ses choix ont des conséquences, que même les meilleures intentions du monde peuvent entrainer souffrance et mort autour d’elle, qu’il ne suffit pas de vouloir bien faire pour effectivement bien faire … et n’ose désormais plus avancer. Elle a peur d’elle-même, peur de ne pas prendre les bonnes décisions, peur de faire plus de mal que de bien, peur de ne pas pouvoir suivre ses intuitions. Elle a également pris conscience qu’il n’existe pas de monde idéal, de monde parfait, que la liberté, la justice et le bonheur sont des armes autant que des desseins, que la nature humaine est pleine de noirceur … mais aussi de douceur. Car après avoir perdu toutes ses illusions, Emilie doit désormais retrouver foi en l’avenir, en la vie, en l’amour. En elle-même. Sans se laisser entrainer à nouveau dans l’utopie : le juste équilibre est si difficile à trouver, sans doute même inatteignable, mais elle doit retrouver le désir d’y tendre, la force de se battre.

Il faut bien le reconnaitre : ce n’est pas un livre qui plaira à tout le monde. On pourrait aisément de lasser de ces interminables tergiversations, de ces incessantes introspections. Même moi, j’ai parfois eu le sentiment que nous tournions un peu trop en rond, que sur le plan narratif, il aurait peut-être été judicieux de condenser un peu les choses au lieu de trainer ainsi en longueur. Je suis pourtant la première à préférer les personnages qui doutent, qui se remettent en question, qui changent d’opinion, qui avancent à tâtons dans la jungle de la vie … mais j’ai parfois éprouvé une certaine lassitude, l’envie et le besoin d’un peu plus de dynamisme. Un peu d’action. J’aurai finalement aimé que l’intrigue avance un peu plus. Bien sûr, il y a eu quelques confrontations oniriques entre Jean et les Bibliothécaires, mais pour le reste … en pas loin de six-cent pages, nous n’avons pas beaucoup progressé dans l’histoire. Tout semble presque en être au même point qu’au début du roman, tant les choses bougent imperceptiblement : encore une fois, c’est brillamment mené, c’est de plus très joliment narré, mais ça peut parfois être un peu frustrant, et presque ennuyeux. Comme dans tout, il y a un équilibre à trouver, et je dois bien avouer avoir trouvé que le récit aurait été plus fluide sans ces quelques longueurs. Rien de grave, mais je préfère prévenir ceux qui aiment les histoires « qui swinguent » : ils risqueraient d’être déçus.

En bref, vous l’aurez bien compris : c’est un troisième tome qui tranche un peu avec les deux précédents. Sans doute parce que nous sommes pile au milieu de la saga, sans doute parce que nous sommes arrivés au point de bascule : il y avait un Avant, il y aura un Après. Emilie ne sera plus jamais la même, désormais : elle est enfin prête à embrasser sa destinée, librement, enfin débarrassée de ses ultimes chaines, de ses doutes, de ses craintes. Je me demande bien ce que cela va entrainer pour la suite de l’histoire … et j’ai drôlement hâte de voir ce que cela va donner ! En étant parfaitement honnête, j’espère vraiment que les tomes suivants seront un peu plus « énergiques » que celui-ci, et qu’Emilie ne se perdra plus autant dans ses interminables réflexions : c’est bien de se poser des questions, surtout quand on a un tel pouvoir (et donc de telles responsabilités), mais en tant que personnage de roman, il serait tout de même bon qu’elle n’oublie pas le lecteur et son désir de vivre à son tour de folles aventures ! Pour ma part, j’ai très envie de botter les fesses de Jean, alors elle a intérêt à le faire pour moi dans un avenir relativement proche, parce que je n’ai malheureusement pas la chance de pouvoir me glisser dans les livres comme elle pour le faire à sa place !

jeudi 23 mars 2023

Les rôdeurs de l'Empire, tome 2 - Guy-Roger Duvert

Les rôdeurs de l’empire2, Guy-Roger Duvert

 Editeur : Autoédition
Nombre de pages : 329
Résumé : Peu nombreux sont les rôdeurs à avoir échappé au siège de l’auberge. Ignorant souvent la survie de leurs compagnons d’armes d’un jour, ils s’éparpillent, chacun poursuivant ses propres objectifs. Quelle n’est pas leur surprise lorsque le sort les contraint une nouvelle fois à faire équipe, se retrouvant désormais complètement mêlés à la guerre déclenchée par l’Empire et à ses conséquences politiques. Peu à peu, ils découvrent que la motivation du conflit est beaucoup plus complexe et obscure qu’à première vue.

 Un grand merci à Guy-Roger Duvert pour l’envoi de ce volume et à la plateforme SimPlement pour avoir rendu ce partenariat possible.

 

- Un petit extrait -

« Cassandra se positionnait plus vis-à-vis de ses compagnons que par rapport à la quête que ceux-ci décidaient d’entreprendre. Elle se surprenait elle-même, étant convaincue jusqu’alors d’être par définition en opposition à tous et à toutes. Mais, au sein de ce groupe, elle avait un sens, une utilité, une raison d’être. Devenir indispensable aux yeux de ses compagnons pour le moins disparates était une envie de plus en plus présente, et force était de constater qu’elle avait tout à fait sa place parmi eux.  »

- Mon avis sur le livre -

 Laissant derrière eux l’auberge où ils furent assiégés et assaillis par un groupe militaire d’élite, les quelques survivants fuient chacun de leur côté, blessés mais conscients de ne pouvoir s’octroyer le luxe de panser leurs plaies, bien décidés à reprendre le cours de leur petite vie de mercenaire, brigand, pillard ou chasseur de primes. Mais le destin semble en avoir décidé autrement : quelques jours à peine plus tard, rattrapés par les autorités, Ethan, Logan, Tobias, Trevor et Cassandra se retrouvent tous dans la même geôle ... et dans la même galère. Le conflit larvé entre l’Empire et le petit royaume de Derenos a finalement éclaté, la capitale de Derenos est encerclée de toutes parts et ses dirigeants n’ont d’autre choix que de faire escorter leur diplomate – chargé de supplier l’aide ou du moins la neutralité du pays voisin – par un groupe de malfrats dont l’instinct de survie (quelque peu stimulé par un petit tour de passe-passe empoisonné) représente la meilleure assurance-vie. Bien malgré eux, nos infortunés Rodeurs se retrouvent donc embarqué dans cette guerre dont ils ne comprennent ni les tenants ni les aboutissants … et ils vont vite découvrir que les choses sont encore plus complexes et ambiguës que ce qu’ils pouvaient imaginer. Alors que leur mission s’avère chaque jour un peu plus périlleuse que prévue, parviendront-ils à mettre de côté leurs différences et leurs différents pour se sortir tous vivants de ce guêpier infernal ?

Nous retrouvons nos « héros » là où nous les avions laissés : en fuite. S’ils sont sortis vivants de l’attaque de l’auberge, ils savent qu’ils ne sont pas encore tirés d’affaire : les voici désormais dépositaires d’un puissant et dangereux secret que l’Empire tient à tout prix à posséder … et que Derenos tient à tout prix à protéger. Les deux camps feront donc tout ce qu’ils peuvent pour mettre la main sur ces quelques survivants, soit pour les faire parler, soit pour les éliminer. Et ils ne peuvent désormais tous compter que sur eux-mêmes : à peine le danger écarté, le groupe a éclaté. Et si, quelques heures plus tôt, ils combattaient main dans la main, se protégeant mutuellement, les fuyards doivent maintenant surveiller leurs arrières de crainte d’être fauchés par leur allié d’un jour … Car nos « héros » restent ce qu’ils sont : de véritables malfaiteurs, des mercenaires et des brigands, qui ne suivent aucun autre code d’honneur que leurs intérêts propres. Ils ne sont pas là pour sauver la veuve et l’orphelin, tout ce qu’il leur importe, c’est de rester en vie, et éventuellement de vendre une information si capitale au plus offrant. Tout le contraire de ce qu’on peut attendre d’un héros conventionnel en heroic-fantasy, qui sera prêt à se sacrifier pour la victoire du bien et la survie des innocents. Et c’est assurément cela qui rend ce récit si original, si unique. Si honteusement attrayant, également.

Car malgré toutes les réticences de notre sens moral, malgré toute la désapprobation que l’on peut avoir face aux décisions et actions de ces Rodeurs … on ne peut malgré tout pas s’empêcher de « s’attacher » à eux, et de craindre pour leur vie, et de souhaiter la réussite de leur mission. Parce qu’on se rend compte que, tout criminels qu’ils soient, ils n’en restent pas moins des innocents quant au jeu des puissants, quant à cette guerre qui éclate bien malgré eux : ils sont certes loin d’avoir eu une conduite exemplaire tout au long de leur vie, mais sur le coup, ils n’y sont pour rien si l’Empire a attaqué Derenos. Encore une fois, c’est parce qu’ils se sont retrouvés au mauvais endroit au mauvais moment qu’ils se retrouvent embarqués dans une mésaventure qui risque fort de leur couter la vie. Certains estimeront peut-être que « c’est bien fait pour eux », que ce n’est finalement que justice, mais pour ma part, je ne peux m’empêcher de me révolter contre le mode opératoire de leur nouvel « employeur » : ces soi-disant représentants de la « justice » ne valent en réalité pas mieux que ceux qu’ils se donnent le droit de juger, ils ne sont pas plus moraux, pas plus éthiques, et ils le sont d’autant moins qu’ils rajoutent l’hypocrisie à leurs crimes. Shennea, elle, assume qu’elle est une « contrebandière » et non une « marchande » : au moins, elle est plus honnête que d’autres …

Et voici que débute une nouvelle aventure pour nos illustres inconnus que les coups du sort ne cessent de rassembler. Une nouvelle fois unis dans l’adversité, ils vont devoir se serrer les coudes plus que jamais pour faire face aux nombreux obstacles qui se dressent sur leur route. C’est vraiment une aventure des plus trépidantes que nous offre une nouvelle fois l’auteur : aucun temps mort, aucune longueur, tout est vraiment fait pour tenir le lecteur en haleine, pour lui donner l’envie irrésistible d’avaler toujours un chapitre supplémentaire. Et quand bien même certains schémas restent très convenus, très prévisibles, quand bien même quelques facilités scénaristiques se glissent fort peu discrètement par-ci par-là, l’intrigue est des plus efficaces. De la bonne fantasy bien palpitante, avec quelques bonnes batailles, avec quelques plans incroyables d’audace et quelques embûches angoissantes au possible : en somme, tout ce dont un lecteur peut rêver pour s’évader quelque peu du quotidien lourd et monotone en vivant par procuration une aventure haletante à souhait ! Et on n’oublie pas le goût immodéré de Guy-Roger (je me permets) pour les révélations totalement imprévisibles, les rebondissements complétement inattendus, les découvertes follement improbables et les suspenses absolument insoutenables. J’ai beau savoir que chacun de ses livres en contient, je n’arrive jamais à m’y préparer, je reste toujours ébahie, et c’est vraiment précieux, un auteur qui arrive à surprendre même ses plus fidèles lecteurs !

En bref, je pense que vous l’aurez bien compris : si j’avais beaucoup apprécié le premier tome, déjà fort prometteur, je suis encore plus charmée par celui-ci. Alors je ne peux pas nier que certains points restent encore fort confus, d’autant plus avec les retournements de situation des derniers chapitres, mais cela ne m’a nullement empêché de dévorer et savourer ce roman de la première à la dernière page ! Il y a vraiment de tout : de l’action, certes, mais aussi pas mal d’introspection, de la politique mais aussi du mystique, du mystère bien sûr … mais aussi ce qui ressemble à une petite pointe de science-fiction ! Et j’aime vraiment beaucoup ces changements d’ambiance, pour ne pas dire de genre, en cours de saga : l’auteur nous avait déjà proposé ceci avec Outsphere (où nous étions passé du space-opera à la science-fantasy), et cette fois-ci, il semblerait que nous fassions le « chemin inverse » … au point d’ailleurs que je me demande (avec une petite touche d’espoir) si les deux univers ne seraient pas en réalité reliés ! J’ai donc vraiment hâte de découvrir la suite de cette saga et de retrouver nos Rodeurs qui, petit à petit, deviennent toujours plus humains et attachants …