Rising
Editeur : Autoédition
Nombre
de pages : 388
Résumé : Le temps est venu pour un nouvel ordre
mondial. Les conflits armés font le bonheur des marchands de mort, membres de
l'organisme qui chuchote à l'oreille des grands de ce monde. On crache sur son
nom : Conglomérat, tout comme on s'incline face à son gigantisme. Face à la
rébellion qui fait rage, la Présidente doit prendre des mesures drastiques. Le
Conglomérat décide de lui fournir l'avenir. Cyborgs de guerre ou machines
douées d'une âme humaine, le nom de ces créatures reste incertain. Une chose
est certaine : ce sont des Vipers. Car tous sont membres du Project Black
Viper.
Un grand merci à Ellen Raven
Martin pour l’envoi de ce volume (et la petite dédicace) et à la plateforme SimPlement
pour avoir rendu ce partenariat possible.
- Un petit extrait -
« Un homme daigna enfin entrer dans la salle. Le docteur Stevens. Comme la première fois, il se saisit d’une chaise et s’assit juste à côté de Skylar, dont il regarda la carcasse un instant, silencieusement. Soudain et sans aucune forme d’avertissement, hormis un léger mouvement de la main du docteur, Skylar fut traversé par un électrochoc. C’était comme si on lui cramait la moelle épinière. Son hurlement de souffrance résonna dans tout le laboratoire avant de mourir sous forme d’un gémissement pathétique.— Vous êtes terrifié, dit simplement et froidement Stevens. Si je le désire, vous souffrirez. Si vous me dites la vérité, et sans ambages, tout ira bien.— Qu’est-ce que vous voulez… ? geignit Skylar.Stevens tapota la table.— Je me donne du mal pour vous, Kenway. Vous en valez la peine. Hélas, je dois vous l’avouer, vous êtes gravement malade.— Quoi ?— Votre mémoire vous fait défaut ! Vous croyez avoir vécu des événements qui ne se sont jamais produits. Ne vous en faites pas, il existe un moyen de vous guérir. Tout dépend de vous. »
- Mon avis sur le livre -
S’il y a un sous-genre de la science-fiction
que je n’ai que très peu exploré encore, c’est bien le cyberpunk … Pourtant,
les thématiques abordées ont de quoi m’attirer : humanité plongée dans le
chaos social suite à un progrès technologique et/ou politico-économique néfaste,
intelligences artificielles, androïde, cyborg, société violente et décadente, multinationales
... Mais jusqu’à présent, je n’avais pas osé passer outre la mention « âmes
sensibles s’abstenir » qui accompagne généralement les ouvrages de cyberpunk
… En tant qu’hypersensible, je n’étais pas vraiment certaine d’être parée à
plonger dans ce genre d’univers ultrasombre et violent. Mais finalement, après
avoir survécu sans trop de séquelles psychologiques aux ouvrages d’Aurélie
Wellenstein, je me suis dit qu’un peu de cyberpunk ne me ferait ni chaud ni
froid, et j’ai allégrement accepté la proposition d’Ellen Raven Martin. Et j’ai
vraiment drôlement bien fait : loin de me traumatiser, ce premier tome a
su me divertir et me faire passer un bon moment de lecture !
Le Conglomérat. Une association de diverses
industries essentielles au bon fonctionnement de la Fédération. Une association
largement dominée par Pinxit Industries. Aryan Turner, PDG de cette
multinationale fabriquant les meilleures augmentations cybernétiques du monde,
propose à ses collaborateurs un projet qui, officiellement, leur assurera le
soutien inconditionnelle de la Présidente, grande actionnaire du Conglomérat,
et qui, officieusement, fera de lui un des hommes les plus craints et respecté
du pays. Il s’agit du Projet Black Viper : créer des surhommes. Non pas de
simples cyborgs augmentés, non pas de simples droïdes mus par une intelligence
artificielle. Non. Les Vipers seront un mélange parfait entre l’homme et la
machine, des agents plus efficaces que le plus efficaces des robots, capables de
prendre des initiatives … mais totalement dévoués à leur créateur, incapables
de trahir …
Entre auteurs, on dit souvent que « le
personnage principal, c’est celui qui souffre le plus ». Autant vous dire
qu’Ellen Raven Martin a appliqué ce dicton à la lettre : ceux que nous
pouvons considérer comme les protagonistes centraux de cette histoire – à
savoir, Blayne et Skylar – sont indéniablement ceux qui souffrent le plus. D’ailleurs,
leur souffrance elle-même – physique pour le premier, psychologique pour le
second – fait partie intégrante de l’intrigue : elle est au cœur-même du
processus consistant à faire d’eux des Vipers. On ne va pas se mentir :
certains passages sont tout simplement insoutenables. Briser. Soumettre.
Renaitre. Telles sont les trois étapes que vont traverser nos deux « héros »
– si l’on peut dire, car il n’y a pas une once d’héroïsme dans ce roman, rien
que les plus sombres facettes de l’âme humaine. Petit à petit, on les voit
renoncer à leur propre identité, à leur propre humanité. Blayne et Skylar
deviennent progressivement le Centurion et l’Ombre. Au gré des tortures et des
manipulations, au fil des expérimentations, des greffes et des formatages
mémoriels, on est témoin de leur déchéance,
de leur déshumanisation.
D’un côté, c’est un processus terrible :
on souffre pour ces deux hommes, qui ne sont certes pas des saints, mais qui ne
méritent clairement pas un tel traitement. Car les scientifiques chargés de «
mettre au point » les agents Vipers sont de véritables monstres, qui
aiment observer et produire la souffrance chez autrui. Ils n’épargneront rien à
nos deux protagonistes : tortures physiques et psychologiques sont le lot
quotidien de ces deux cobayes qui n’avaient rien demandé. C’est parfois à la
limite de l’insoutenable … Et pourtant, deux choses viennent « atténuer »
l’horreur de ces monstrueuses expérimentations humaines : l’insertion des
rapports des scientifiques, factuels et détachés, qui créent une sorte de « distance »
dérangeante (les sujets d’expérimentation ne sont plus que des matricules) mais
bienvenue sur le plan émotionnel … et la personnalité de Zeera, la médecin que
nous suivons le plus. Zeera est folle à lier, sadique à point, et elle a un
sale caractère. Elle est détestable … mais je dois avouer avoir une once d’affection
pour elle. Car sur bien des points, Zeera me rappelle la mère d’un de mes
personnages de jeux de rôle textuel (personnage que j’ai tant aimé incarner que
je compte lui donner une nouvelle vie dans un roman). De plus, sa folie a
quelque chose d’assez … sympathique chez un personnage de roman, car on sait
pertinemment qu’elle ne va pas sortir du livre pour nous disséquer, donc on
peut se permettre de sourire à chacune de ses interventions.
Avec ce premier tome, Ellen Raven Martin nous
invite donc finalement à faire la « connaissance » de ces deux
individus qui vont devenir les deux premiers agents Vipers. Il s’agit
indéniablement d’un tome introductif destiné à nous faire comprendre la genèse
de ce projet dément et inhumain : transformer un être humain en machine.
Il ne se passe finalement rien d’autre que la transformation physique et
psychique de ces deux hommes en véritables « chiens de garde »,
agents implacables car dénoués de toute volonté autre que celle d’obéir
aveuglément à leur « Père », Aryan Turner. Quelques intrigues
secondaires sont mises en place, mais j’avoue qu’elles ne m’ont pas passionnées :
j’avais le sentiment qu’elles n’étaient là que pour « pimenter »
artificiellement la situation, et non pas de préparer le terrain pour les tomes
à venir. Adeptes des rebondissements à répétition, sachez que ce premier tome
est un peu « maigre » de ce point de vue-là … mais on sent que le
meilleur reste à venir et que l’action est prête à débuter dans le tome suivant !
En bref, vous l’aurez bien compris, bien que
ce ne soit pas un coup de coeur, j’ai vraiment apprécié ma lecture. Il y a
quelque chose d’assez fascinant dans ce processus de déshumanisation
programmée, de déchéance planifiée, de deux hommes au fort caractère qui se
transforment bien malgré eux en bras armés d’un homme dont on ne sait
finalement rien. Derrière cette sombre histoire se cachent finalement la
décadence de l’humanité, dont les nouvelles divinités s’appellent « argent »
et « pouvoir ». Ellen Raven Martin nous plonge au cœur d’un univers
où les hommes ne sont plus uniquement de chair, mais également de métal :
prothèses de toutes sortes, implants cérébraux de traduction. Mais un homme
est-il encore un homme si tout son corps n’est plus que technologie ? A
vouloir « transcender » la nature humaine en créant un homme « parfait »,
sans la moindre infirmité ou faiblesse physique ou psychique, ne risque-t-on
pas au contraire de tuer tout ce qui fait qu’un homme est un homme ? Une
chose est sûre : les deux Vipers que nous présente ce livre n’ont plus
rien à voir avec les hommes qu’ils étaient au début de l’histoire … Et il ne
fait aucun doute que nous n’avons encore rien vu : heureusement que j’ai
le second tome sous la main !
Ce livre a été lu dans le cadre du Tournoi des 3
Sorciers
(plus d’explications sur cet article)