samedi 29 juin 2019

Project Viper, tome 1 : Rising - Ellen Raven Martin


Project Viper1, Ellen Raven Martin
Rising

Editeur : Autoédition
Nombre de pages : 388
Résumé : Le temps est venu pour un nouvel ordre mondial. Les conflits armés font le bonheur des marchands de mort, membres de l'organisme qui chuchote à l'oreille des grands de ce monde. On crache sur son nom : Conglomérat, tout comme on s'incline face à son gigantisme. Face à la rébellion qui fait rage, la Présidente doit prendre des mesures drastiques. Le Conglomérat décide de lui fournir l'avenir. Cyborgs de guerre ou machines douées d'une âme humaine, le nom de ces créatures reste incertain. Une chose est certaine : ce sont des Vipers. Car tous sont membres du Project Black Viper.

Un grand merci à Ellen Raven Martin pour l’envoi de ce volume (et la petite dédicace) et à la plateforme SimPlement pour avoir rendu ce partenariat possible.

- Un petit extrait -
« Un homme daigna enfin entrer dans la salle. Le docteur Stevens. Comme la première fois, il se saisit d’une chaise et s’assit juste à côté de Skylar, dont il regarda la carcasse un instant, silencieusement. Soudain et sans aucune forme d’avertissement, hormis un léger mouvement de la main du docteur, Skylar fut traversé par un électrochoc. C’était comme si on lui cramait la moelle épinière. Son hurlement de souffrance résonna dans tout le laboratoire avant de mourir sous forme d’un gémissement pathétique.
— Vous êtes terrifié, dit simplement et froidement Stevens. Si je le désire, vous souffrirez. Si vous me dites la vérité, et sans ambages, tout ira bien.
— Qu’est-ce que vous voulez… ? geignit Skylar.
Stevens tapota la table.
— Je me donne du mal pour vous, Kenway. Vous en valez la peine. Hélas, je dois vous l’avouer, vous êtes gravement malade.
— Quoi ?
— Votre mémoire vous fait défaut ! Vous croyez avoir vécu des événements qui ne se sont jamais produits. Ne vous en faites pas, il existe un moyen de vous guérir. Tout dépend de vous. »
- Mon avis sur le livre -

S’il y a un sous-genre de la science-fiction que je n’ai que très peu exploré encore, c’est bien le cyberpunk … Pourtant, les thématiques abordées ont de quoi m’attirer : humanité plongée dans le chaos social suite à un progrès technologique et/ou politico-économique néfaste, intelligences artificielles, androïde, cyborg, société violente et décadente, multinationales ... Mais jusqu’à présent, je n’avais pas osé passer outre la mention « âmes sensibles s’abstenir » qui accompagne généralement les ouvrages de cyberpunk … En tant qu’hypersensible, je n’étais pas vraiment certaine d’être parée à plonger dans ce genre d’univers ultrasombre et violent. Mais finalement, après avoir survécu sans trop de séquelles psychologiques aux ouvrages d’Aurélie Wellenstein, je me suis dit qu’un peu de cyberpunk ne me ferait ni chaud ni froid, et j’ai allégrement accepté la proposition d’Ellen Raven Martin. Et j’ai vraiment drôlement bien fait : loin de me traumatiser, ce premier tome a su me divertir et me faire passer un bon moment de lecture !

Le Conglomérat. Une association de diverses industries essentielles au bon fonctionnement de la Fédération. Une association largement dominée par Pinxit Industries. Aryan Turner, PDG de cette multinationale fabriquant les meilleures augmentations cybernétiques du monde, propose à ses collaborateurs un projet qui, officiellement, leur assurera le soutien inconditionnelle de la Présidente, grande actionnaire du Conglomérat, et qui, officieusement, fera de lui un des hommes les plus craints et respecté du pays. Il s’agit du Projet Black Viper : créer des surhommes. Non pas de simples cyborgs augmentés, non pas de simples droïdes mus par une intelligence artificielle. Non. Les Vipers seront un mélange parfait entre l’homme et la machine, des agents plus efficaces que le plus efficaces des robots, capables de prendre des initiatives … mais totalement dévoués à leur créateur, incapables de trahir …

Entre auteurs, on dit souvent que « le personnage principal, c’est celui qui souffre le plus ». Autant vous dire qu’Ellen Raven Martin a appliqué ce dicton à la lettre : ceux que nous pouvons considérer comme les protagonistes centraux de cette histoire – à savoir, Blayne et Skylar – sont indéniablement ceux qui souffrent le plus. D’ailleurs, leur souffrance elle-même – physique pour le premier, psychologique pour le second – fait partie intégrante de l’intrigue : elle est au cœur-même du processus consistant à faire d’eux des Vipers. On ne va pas se mentir : certains passages sont tout simplement insoutenables. Briser. Soumettre. Renaitre. Telles sont les trois étapes que vont traverser nos deux « héros » – si l’on peut dire, car il n’y a pas une once d’héroïsme dans ce roman, rien que les plus sombres facettes de l’âme humaine. Petit à petit, on les voit renoncer à leur propre identité, à leur propre humanité. Blayne et Skylar deviennent progressivement le Centurion et l’Ombre. Au gré des tortures et des manipulations, au fil des expérimentations, des greffes et des formatages mémoriels, on  est témoin de leur déchéance, de leur déshumanisation.

D’un côté, c’est un processus terrible : on souffre pour ces deux hommes, qui ne sont certes pas des saints, mais qui ne méritent clairement pas un tel traitement. Car les scientifiques chargés de « mettre au point » les agents Vipers sont de véritables monstres, qui aiment observer et produire la souffrance chez autrui. Ils n’épargneront rien à nos deux protagonistes : tortures physiques et psychologiques sont le lot quotidien de ces deux cobayes qui n’avaient rien demandé. C’est parfois à la limite de l’insoutenable … Et pourtant, deux choses viennent « atténuer » l’horreur de ces monstrueuses expérimentations humaines : l’insertion des rapports des scientifiques, factuels et détachés, qui créent une sorte de « distance » dérangeante (les sujets d’expérimentation ne sont plus que des matricules) mais bienvenue sur le plan émotionnel … et la personnalité de Zeera, la médecin que nous suivons le plus. Zeera est folle à lier, sadique à point, et elle a un sale caractère. Elle est détestable … mais je dois avouer avoir une once d’affection pour elle. Car sur bien des points, Zeera me rappelle la mère d’un de mes personnages de jeux de rôle textuel (personnage que j’ai tant aimé incarner que je compte lui donner une nouvelle vie dans un roman). De plus, sa folie a quelque chose d’assez … sympathique chez un personnage de roman, car on sait pertinemment qu’elle ne va pas sortir du livre pour nous disséquer, donc on peut se permettre de sourire à chacune de ses interventions.

Avec ce premier tome, Ellen Raven Martin nous invite donc finalement à faire la « connaissance » de ces deux individus qui vont devenir les deux premiers agents Vipers. Il s’agit indéniablement d’un tome introductif destiné à nous faire comprendre la genèse de ce projet dément et inhumain : transformer un être humain en machine. Il ne se passe finalement rien d’autre que la transformation physique et psychique de ces deux hommes en véritables « chiens de garde », agents implacables car dénoués de toute volonté autre que celle d’obéir aveuglément à leur « Père », Aryan Turner. Quelques intrigues secondaires sont mises en place, mais j’avoue qu’elles ne m’ont pas passionnées : j’avais le sentiment qu’elles n’étaient là que pour « pimenter » artificiellement la situation, et non pas de préparer le terrain pour les tomes à venir. Adeptes des rebondissements à répétition, sachez que ce premier tome est un peu « maigre » de ce point de vue-là … mais on sent que le meilleur reste à venir et que l’action est prête à débuter dans le tome suivant !

En bref, vous l’aurez bien compris, bien que ce ne soit pas un coup de coeur, j’ai vraiment apprécié ma lecture. Il y a quelque chose d’assez fascinant dans ce processus de déshumanisation programmée, de déchéance planifiée, de deux hommes au fort caractère qui se transforment bien malgré eux en bras armés d’un homme dont on ne sait finalement rien. Derrière cette sombre histoire se cachent finalement la décadence de l’humanité, dont les nouvelles divinités s’appellent « argent » et « pouvoir ». Ellen Raven Martin nous plonge au cœur d’un univers où les hommes ne sont plus uniquement de chair, mais également de métal : prothèses de toutes sortes, implants cérébraux de traduction. Mais un homme est-il encore un homme si tout son corps n’est plus que technologie ? A vouloir « transcender » la nature humaine en créant un homme « parfait », sans la moindre infirmité ou faiblesse physique ou psychique, ne risque-t-on pas au contraire de tuer tout ce qui fait qu’un homme est un homme ? Une chose est sûre : les deux Vipers que nous présente ce livre n’ont plus rien à voir avec les hommes qu’ils étaient au début de l’histoire … Et il ne fait aucun doute que nous n’avons encore rien vu : heureusement que j’ai le second tome sous la main !



Ce livre a été lu dans le cadre du Tournoi des 3 Sorciers
(plus d’explications sur cet article)

samedi 22 juin 2019

Outsphere, tome 1 - Guy-Roger Duvert


Outsphere1, Guy-Roger Duvert

Editeur : Autoédition
Nombre de pages : 313
Résumé : Après avoir quitté une Terre mourante, l'Arche, premier vaisseau à coloniser une exoplanète, arrive au bout d'un long voyage de 80 ans. Les colons sortent de leurs caissons cryogéniques et découvrent ce qui doit devenir un nouveau commencement pour l'humanité. Une nouvelle planète, un monde principalement végétal baptisé Eden. Mais tout change avec l'arrivée d'un nouveau joueur : un second vaisseau spatial arrive, quelques mois seulement après l'Arche. A son bord, des Terriens partis 60 ans plus tard, bénéficiant d'une technologie plus avancée, et eux même fortement modifiés génétiquement ...

Un grand merci à Guy-Roger Duvert pour l’envoi de ce volume.

- Un petit extrait -

« Olsen scruta, et finit par voir une ombre dans les airs, qui évoluait doucement vers eux. Il fallut du temps pour qu’il puisse enfin identifier la chose. Il s’agissait d’un animal ressemblant très fortement à une raie manta, mais d’une longueur de 50 mètres. L’animal semblait flotter, bien qu’Olsen n’ait pu expliquer comment. Les bords de l’animal ondulaient mais cela ne semblait pas soutenir l’animal. Ces ondulations permettaient probablement à la bête de se diriger. Quant à se maintenir en l’air, après avoir vu plusieurs éclairs la frapper et l’enrober, sans lui faire le moindre dégât, il supposa que le phénomène était magnétique. L’animal était gracieux, et il évoluait lentement. »

- Mon avis sur le livre -

Après une cure de fantasy, l’heure est venue de basculer vers un peu de science-fiction avec un bon planet-opera des familles ! C’est un sous-genre que je lis assez peu, mais que j’affectionne tout particulièrement : c’est pourquoi lorsque l’auteur m’a gentiment proposé de recevoir ce roman au résumé fort intriguant et à la couverture absolument magnifique, je n’ai pas hésité bien longtemps … sans écouter la petite voix de la raison qui me rappelait que les mois de mai et de juin étaient suffisamment chargés comme cela (et que la pile des services de presse était déjà assez conséquente comme cela). Et le moins que l’on puisse dire, c’est que je ne regrette absolument pas d’avoir cédé à cette impulsion : j’ai vraiment passé un excellent moment en compagnie de ce roman riche en mystères et en rebondissements ! Alors, prêts à décoller pour Eden avec moi ?

80 ans. C’est le temps qu’il aurait fallu à l’Arche pour atteindre l’orbite d’Eden, première exoplanète en passe d’être colonisée par les Terriens. 80 ans que les colons cryogénisés dans le vaisseau ont quitté leur planète mère à l’agonie dans l’espoir de trouver un nouveau monde pour l’humanité. Et les voici, militaires, scientifiques et civils, prêts à fouler le sol de cette planète dont ils découvrent progressivement de nouvelles facettes qui viennent remettre en question pas mal de certitudes … Mais quelques semaines à peine après leur arrivée, un nouveau vaisseau spatial s’approche d’Eden. A son bord, des Terriens génétiquement modifiés, doués de capacités psychiques hors du commun, synchronisés télépathiquement, partis à bord de l’Utopia il y a 20 ans à peine … 

C’est un livre qui commence comme une sorte de Robinson Crusoé spatial : fraichement débarqués sur une planète inconnue, les colons en découvrent progressivement tous les secrets … Confrontation avec une espèce humanoïde primitive mais intelligente, découverte de ruines dotées d’une technologie avancée … Sans oublier les phénomènes météorologiques et climatiques plus surprenants les uns que les autres, la faune pas si inoffensive que cela, et bien d’autres mystères encore. C’est vraiment un régal que de découvrir cette nouvelle planète aux côtés de personnages aussi divers que Bowman, Colonel pragmatique mais juste, Fulton, scientifique passionnée et réservée, ou encore Vincent, civil rebelle ne supportant pas la domination militaire de la colonie ! Contrairement à d’autres blogueurs qui ont soulignés avoir un peu de mal avec cette multitude diversité de protagonistes, j’ai personnellement énormément apprécié d’avoir plusieurs points de vue : on s’en doute, un militaire ne va pas appréhender cette colonisation de la même manière qu’un scientifique, et encore moins qu’un civil ! 

Car ce livre ne se contente pas de nous raconter l’exploration de cette planète pleine de surprises, il nous raconte bien plus l’établissement d’une colonie humaine constituée d’individus aux opinions et aux aspirations différentes, qui doivent néanmoins cohabiter et même collaborer dans cette installation d’un genre nouveau. Tandis que les militaires se concentrent sur la sécurité, la survie de la colonie, les scientifiques sont obnubilés par les mystères géologiques, archéologiques, biologiques et physiques de ce monde si différent de la Terre …. Et les civils, eux, aspirent juste à la liberté : ils se sont embarqués dans cette aventure pour vivre un nouveau départ, loin de la décrépitude politique et sociale de leur planète natale, pas pour vivre enfermés dans une ville dirigée par des soldats ! Inévitablement, des tensions se créent, des révoltes menacent d’exploser … Les incompréhensions mutuelles viennent mettre en péril cette société naissante : faute de réussir à discuter pacifiquement, chacun étant persuadé d’être dans son bon droit, les intérêts des militaires, scientifiques et civils finissent par se liguer les uns contre les autres … 

Jusqu’à l’arrivée de l’Utopia, un vaisseau spatial terrien à la technologie incroyablement avancée, et de ses habitants : les Atlantes, humains génétiquement modifiés dotés d’une intelligence collective du fait de synchronisations télépathiques quasi-permanentes. Incapables de mentir, suivant aveuglément la logique et la raison, les Atlantes ont pour mission de protéger les Anciens – c’est-à-dire les colons, derniers représentants des habitants initiaux de la Terre – tant que cela ne les menace pas … L’arrivée de ces « clones » dans la colonie vient perturber encore un peu plus l’équilibre précaire de la Cité. La plupart des terriens perçoivent ces humains modifiés comment une menace, et la cohabitation au sein d’Outsphere devient de plus en plus périlleuse … Progressivement, l’objectif initiale de cette colonisation – créer une société sans les conflits qui existaient sur Terre – s’efface tandis que la méfiance et la haine envers ces nouveaux arrivants poussent certains civils à commettre l’irréparable … Il faut dire que les Anciens et les Atlantes ont beaucoup de différences : les premiers sont profondément individualistes et dominés par leurs désirs propres, tandis que les seconds forment une espèce profondément collectiviste et rationnelle où l’individu s’efface derrière le bien commun. 

Vous vous en doutez : entre les conflits internes aux colons initiaux, la cohabitation forcée avec ces humains si différents et les dangers et mystères de cette nouvelle planète, il y a de quoi créer une histoire complexe et incroyablement palpitante ! Ces différentes intrigues se mêlent et s’entremêlent pour offrir au lecteur un récit riche en rebondissements, en suspense et en action. On ne s’ennuie pas une seule seconde, on dévore ce roman du début à la fin, on tourne avidement les pages sans même s’en rendre compte … Pourtant, on ne va pas se mentir : le style est assez sobre, presque quelconque, parfois maladroit. Mais l’histoire s’autosuffit : on en oublie totalement la narration, car on a juste le sentiment qu’un film – voire plutôt une série télévisée – est en train de se jouer dans notre imagination. La quatrième de couverture nous le dit, et ça se ressent énormément à la lecture : l’auteur est avant tout réalisateur et scénariste. On est juste immergé dans ce récit riche en péripéties, mais également riche en réflexions sociologiques et anthropologiques nous invitant à réfléchir en profondeur sur la question de la collectivité et de l’individualité, sur la question de la raison et de la passion … 

En bref, vous l’aurez bien compris : j’ai vraiment beaucoup aimé ce livre aux multiples facettes ! D’un côté, nous avons donc le récit de cette installation sur une exoplanète qui est loin d’avoir livré tous ses secrets aux colons … et de l’autre, nous avons le récit de cette cohabitation entre deux peuples humains que tout semble opposer. L’auteur a su trouver un équilibre entre ces deux intrigues pour nous propose quelque chose de vraiment unique et de vraiment addictif : on en redemande ! On en redemande d’autant plus qu’une jolie surprise nous attend à la fin de l’épilogue : « fin du tome 1 » … Alors on se met à sautiller de joie : un second tome est prévu, on va pouvoir savoir la suite de l’histoire, chic, chic, chic ! Et puis, on se met à soupirer de dépit : mais quand sortira donc ce second opus ? combien de temps encore devons-nous patienter pour connaitre la suite des événements ? Il faut dire que le cliffhanger final est vraiment atrocement frustrant … l’attente va être longue !

Ce livre a été lu dans le cadre du Tournoi des 3 Sorciers
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samedi 15 juin 2019

Myrihandes, tome 3 : Le Lac aux larmes d'or - Guilhem Meric


Myrihandes3, Guilhem Meric
Le lac aux larmes d’or

Editeur : Harmonia
Nombre de pages : 559
Résumé : Échoués dans le grand Désert du Nord, Sisam et Helya trouvent asile dans un étrange royaume. Minés par l'amertume et le doute, ils vont découvrir que ce peuple du bout du monde est frappé d'une ancienne et terrible malédiction. Recueilli par le peuple Anachrone et soucieux de retrouver ses amis, Maâlias part à la rencontre d'une redoutable créature, dont les obscures divinations vont l'entraîner sur un chemin qu'il n'attendait pas. Au terme de la reconquête des Trois Cités, Hemerod a pris la tête de ses armées pour affronter Kryom sur son propre sol. Un chemin semé de mille dangers qui le conduira vers un mystérieux lac, dont la légende prétend que les eaux seraient miraculeuses...

Un grand merci à Guilhem Meric pour l’envoi de ce volume (et la petite dédicace) et à la plateforme SimPlement pour avoir rendu ce partenariat possible.

- Un petit extrait -
« Laïmu, Oros, Farf, Thalis ... Leurs visages défilaient dans sa tête dans un tourbillon vertigineux de souvenirs, de peines et de joies mêlées. Tous ces proches, parents et amis, qui les avaient soutenus dans sa quête, qui le soutenaient encore, pour certains, envers et contre les doutes, les douleurs et les épreuves. Et leur affection, leur amour … Il les sentait battre au fond de lui, pulser comme un énorme cœur gorgé de sang. Il entendait leurs voix, leurs chants, leurs rires s’accordant à la manière d’une symphonie dont les notes, sans cesse, prenaient de la hauteur ; comme si elles s’éloignaient, s’évadaient peu à peu de ce monde et de sa lumière. Non. C’était lui qui s’éloignait. Lui qui partait. »
- Mon avis sur le livre -

Ceux qui me suivent depuis longtemps le savent : lorsqu’un nouveau tome d’une de mes sagas préférées sort après des mois et des mois d’attente, c’est l’occasion rêvée pour moi de relire l’intégralité de la série ! Bien évidemment, Myrihandes n’a pas fait exception à la règle : hors de question de découvrir ce troisième tome sans avoir relu les deux premiers … Imaginez le bonheur que cela représente que de se retrouver face à cette pile d’environ 1600 pages qui n’attend qu’une seule chose : vous embarquer pour le plus beau et le plus émouvant des voyages ! Imaginez le plaisir qui m’étreignait à la simple idée de retrouver Helya, Sisam et leurs compagnons de route, imaginez la joie qui était la mienne lorsque j’ai ressorti le premier opus de son étagère pour me replonger dans ce fabuleux univers créé par le non moins fabuleux Guilhem Meric – que je ne remercierai jamais assez pour cette trilogie qui fait vibrer mon cœur comme aucun autre livre ne l’a fait … Ces deux semaines passées en compagnie de ces trois gros pavés, que j’ai pris le temps de savourer au lieu de les dévorer avidement comme je le fais parfois, ont été tout simplement merveilleuses.

Après leur lutte acharnée contre Kryom, Sisam et Helya se sont échoués dans l’infernal Désert du Nord. Recueillies par Sioul, jeune prince d’un surprenant royaume aux prises avec une atroce malédiction, les deux Flammes Jumelles s’éloignent progressivement l’une de l’autre, hantées par le doute, le découragement, la peur … La belle harmonie qui faisait vibrer leurs cœurs et leurs âmes à l’unisson lorsqu’ils étaient Myrihandes semble belle et bien terminée. Pendant ce temps, Maâlias, Oros et Farf refusent de croire en la mort de leurs amis et se jettent à cœurs perdus dans une dangereuse entreprise pour les retrouver … Et ce malgré la mort de leur ultime compagnon de route, Ecleïs, un des trois Gardiens de la Porte des Ames, sans lequel tout semble perdu. Enfin, après avoir aidé les habitants des Trois Cités à renverser l’ambitieux et tyrannique Gouverneur Hacton, le Capitaine Hemerod décide de couper le mal à la racine : accompagné de toute une armée de soldats et des nombreuses Ames Sœurs désormais libres de s’aimer, il s’apprête à affronter Kryom dans sa propre citadelle … 

Le moment est enfin venu de découvrir le dénouement de cette incroyable épopée, qui nous invite à suivre toujours plus de personnages : cette fois-ci, ce ne sont pas deux, ni trois, mais bien quatre points de vue qui nous sont proposés. Nous suivons tout d’abord Helya et Sisam, chez qui la joie insouciante des retrouvailles a laissé place à l’amertume et au doute. Les propos de Kryom ont semé le trouble dans l’âme de Sisam, qui n’aspire désormais qu’à la sécurité tandis qu’Helya vibre de l’envie de mettre fin au règne du terrible Seigneur de Doldometh. J’ai eu tellement de peine pour eux deux, pour Sisam qui a perdu toute volonté de se battre, pour Helya qui souffre de cette distance qui s’installe entre eux, pour leur Amour si pur et puissant qui semble s’être éteint … Leur quête a changé de visage : il ne s’agit plus d’empêcher Kryom d’ouvrir la Porte des Ames, mais bien de retrouver le chemin entre leurs deux cœurs, leurs deux âmes, pour redonner vie à leur Myrihande. Et pour cela, il va leur falloir dépasser la culpabilité qui les assaille depuis qu’ils connaissent la vérité concernant leur passé commun … De même, le Capitaine Hemerod, que nous retrouvons en pleine compagne militaire, cherche à expier ses fautes passées en donnant vie au rêve de sa sœur défunte : un monde de paix, de sérénité, de justice et d’amour. 

Vous l’aurez bien compris : bien que l’affrontement final se fasse de plus en plus imminent, il n’est clairement pas question que de batailles dans cet ultime opus ! La quête de nos héros, qu’il s’agisse de Sisam et d’Helya, d’Oros, Farf et Maâlias, d’Hemerod, Santories et Chrysalie, ou encore de Phonkerf et Harfan, est plus initiatique que guerrière. Dans cette trilogie, ce ne sont pas les exploits martiaux qui font les héros. On le sent, nos protagonistes ne pourront vaincre la terrible Ame Noire Alrazel qu’en surmontant leurs propres doutes, leurs propres peurs, leurs propres démons intérieurs. Qu’en faisant la paix avec eux-mêmes. C’est, je pense, la raison pour laquelle j’aime tant cette trilogie : elle ose mettre à la première place les combats intérieurs, plutôt que de s’arrêter aux grandes batailles sanguinolentes dont est généralement si friande la fantasy épique. Alors on ne va pas se mentir, il y a pas mal de morts, pas mal de violence, pas mal de noirceur. Mais l’ultime affrontement, celui que l’on attend depuis le tout premier tome, n’est ni un duel d’épéiste, ni même une bataille magique. C’est avant tout la confrontation entre l’avidité, la noirceur, et la bonté, la lumière. Entre un être pétri de Haine et de cruauté, et deux âmes que l’Amour réunit en un seul être. Certains y verront peut-être trop de manichéisme … moi j’y vois plutôt un véritable appel à la bienveillance, à l’altruisme, à l’amour sous toutes ses formes. On peut tous être des petits héros du quotidien, en portant nos rêves à bout de bras pour lutter contre le découragement ambiant, en brandissant la bonté et la justice autour de nous.

Comme ses deux prédécesseurs, Le lac aux larmes d’or est magnifiquement bien écrit. Il y a de la magie dans ces mots qui, tissés les uns avec les autres, nous offrent bien plus qu’une simple histoire. Au fil des pages, le récit prend vie, et le lecteur est comme transporté dans ce monde en proie à la tyrannie d’un cœur tant meurtri par la douleur qu’il estime que toutes les âmes doivent souffrir autant de la sienne. Un être qui est bourreau autant que victime, et qu’on ne peut ni apprécier ni détester purement et simplement. Le lecteur ne lit pas : il marche aux côtés de tous ces personnages, « qui vont tout donner d’eux-mêmes » pour reprendre les mots de l’auteur, il tremble avec et pour eux, il souffre avec et pour eux, il se réjouit avec et pour eux. C’est un livre qui m’a fait passer par des myriades d’émotions. Un livre qui a su me surprendre. Je ne m’attendais pas à une telle issue, si déchirante. A la fois cruelle et belle. J’ai pleuré toutes les larmes de mon corps, car je n’étais pas prête pour cela. On a jamais envie de quitter des personnages avec lesquels on s’est presque lié d’amitié … mais on a encore moins envie de les quitter dans de telles conditions. Heureusement que l’épilogue est là pour nous faire rêver d’une autre histoire, une histoire où nos racines seront définitivement nouées autour du même arbre …

En bref, vous l’aurez bien compris, avec Myrihandes, c’est jamais deux sans trois : c’est encore un coup de cœur ! Une fois encore, Guilhem Meric nous offre plus de cinq cent pages de pur bonheur, augmenté d’une bonne cinquantaine de pages d’annexe pour assouvir notre curiosité. Ca a beau être terrible de ce dire que tout est bel et bien terminé, que les aventures de Sisam, d’Helya et de tous leurs compagnons sont achevées, c’est une fin de toute beauté que nous offre l’auteur. C’est la cœur à la fois triste et apaisé que j’ai tourné la dernière page, en soufflant la promesse de relire la saga une nouvelle fois, un jour ou l’autre, quand l’envie de retrouver les terres d’Oesion se fera sentir. En attendant, il ne me reste plus qu’à vous inviter à découvrir, à votre tour, cette fantastique trilogie et les magnifiques musiques qui l’accompagnent !



Ce livre a été lu dans le cadre du Tournoi des 3 Sorciers
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