Les disparus d’Arkham
Editeur : Autoédition
Résumé : Septembre 1934. Intriguée par la disparition à Arkham de deux personnes liées à une maison que la rumeur veut hantée, la journaliste Lillian Freling décide de quitter Boston pour se rendre sur place, convaincue d'y trouver le scoop qui la hissera dans la profession. Pensant au départ tomber sur une sombre affaire bassement criminelle, elle découvre des pratiques occultes à même de lui faire remettre en question sa propre santé mentale, et qui la verront s'associer avec un certain Milton Blake. Le détective privé, abîmé depuis son aventure en Egypte et en Europe, voit dans ce dossier la possibilité de retrouver ses anciens compagnons de route.
Un grand merci à Guy-Roger Duvert pour l’envoi de ce volume et à la plateforme SimPlement pour avoir rendu ce partenariat possible.
« Milton s’était retrouvé impliqué dans l’affaire Shellington quelques semaines plus tôt, tantôt qu’il profitait d’Arkham en plein mois d’aout. Lorsqu’il ne travaillait pas sur un dossier précis pour le compte de la Miskatonic ou pour le sien, le détective privé avait pris comme habitude de maintenir un contact relativement régulier avec plusieurs informateurs en ville, dans des lieux qui allaient des milieux les plus prestigieux à ceux les moins fréquentables. »
Il y a quelques temps, j’ai promis à Guy-Roger Duvert que ses (nombreux) romans auront leur étagère bien à eux dans ma future bibliothèque. Celle-ci est désormais installée (je vous laisse imaginer ma joie), et j’ai bien évidemment tenu cette promesse … même si, je l’avoue, pour l’instant, ils partagent encore ladite étagère avec les ouvrages de mes autres auteurs autoédités préférés (optimisation de l’espace disponible oblige). Mais si Guy-Roger continue de sortir trois ou quatre livres par an comme il le fait jusqu’à présent, ses livres finiront par phagocyter la place des autres, qui seront bien forcés de déménager sur une autre étagère ! Cela a même beaucoup fait rire ma maman, qui m’a très gentiment aidée à ranger mes quelques 1000 livres (oups) : « Tiens, on en a pas déjà rangé de cet auteur ? », « Oh, encore un Guy-Roger Duvert ! », « Mais il en a écrit combien ?! », « T’es sûre qu’une étagère suffira ? » … Il faut dire que je lui ai indiqué qu’il fallait garder une place libre pour la suite d’Outsphere (même si elle n’est pas prévue pour tout de suite), ainsi que pour le second opus des Chroniques occultes, qui n’allait quant à lui pas tarder à arriver. Bien évidemment, en bonne maman catholique qu’elle est, le titre l’a quelque peu fait tiqué : « depuis quand tu lis des romans avec des éléments occultes, toi ? » … La réponse a été assez simple : depuis que Guy-Roger Duvert en écrit ! Il est vrai que c’est généralement une thématique que je n’apprécie guère, même dans le cadre de fiction, mais il faut bien une exception pour confirmer la règle, n’est-ce pas ?
Septembre 1934. Alors que ses parents rêvaient de la voir devenir une épouse docile et cultivée pour un jeune homme « tout bien comme il faut », Lillian Freling a embrassé l’intrépide (et quelque peu scandaleuse pour une femme) vocation de journaliste. Son instinct aiguisé et son charme savamment entretenu lui ont permis de se faire une petite place dans le monde de la presse, mais il lui manque encore une affaire digne de ce nom pour se faire un nom auprès du grand public. Il lui faut du sensationnel … Elle pense, ou du moins espère vivement, avoir trouvé la perle rare qui fera décoller pour de bon sa carrière : les disparitions mystérieuses et inexpliquées, à quelques mois d’intervalle, de deux hommes venus à Arkham visiter une maison supposément hantée … Lillian le sait, le public raffole de ce genre d’histoire, et cela d’autant plus que la ville est réputée pour ses disparitions curieuses, mais plus encore pour ses apparitions à la limite de l’étrange. Pour la journaliste, toutes ces rumeurs ne sont que des balivernes de superstitieux, des histoires que l’on aime se raconter la nuit pour se faire peur : ce qu’elle cherche, ce sont des pistes concrètes, tangibles, rationnelles. Elle compte bien réussir là où enquêteurs et détectives ont échoué et comprendre ce qui est arrivé à ces deux hommes. Mais il n’y a pas de fumée sans feu : elle va rapidement apprendre, à ses dépens, que les rumeurs sont loin, très loin d’être infondées, et qu’il se passe définitivement quelque chose de pas net à Arkham.
Il semblerait que pour cette saga, Guy-Roger Duvert ait voulu mettre à l’honneur des jeunes femmes ambitieuses, qui ne laissent rien ni personne les empêcher de vivre de leur passion : dans le premier tome, nous avons fait la connaissance de Kristen, archéologue bien décidée à marcher dans les pas de son père, et dans celui-ci, nous rencontrons Lillian, journaliste, fermement déterminée à mener à bien son investigation et à rédiger un article qui fera sensation à Boston. Là où la bienséance de leur époque voudrait qu’elles ne soient que des épouses dévouées et effacées, Kristen et Lillian se sont toutes deux lancées dans une profession où elles doivent continuellement prouver leur valeur, se battre pour être pleinement reconnues. C’est sans doute cela qui les pousse à se surpasser, et donc à ne pas baisser les bras là où leurs collègues masculins laisseraient vite tomber, sachant pertinemment bien qu’on ne leur en tiendra pas rigueur et que cela n’aura aucune incidence sur leur réputation. Pour Lillian, l’enjeu est de taille : elle a besoin de cette affaire pour assoir une bonne fois pour toute sa légitimité de journaliste. Elle ne repartira pas de cette ville sans être venu à bout de ce mystère sur lequel enquêteurs et détectives se sont échinés en vain. Elle ne retournera pas à Boston sans un article digne des plus grands noms de la presse. Et pour cela, elle ne ménagera pas ses efforts, et ne reculera devant rien, quoi qu’il puisse arriver … Et croyez-moi, elle va avoir besoin de cette détermination, pour faire face à ce qui l’attend à Arkham !
En effet, le lecteur ne met pas bien longtemps à deviner que derrière ces disparitions énigmatiques se cachent des activités des plus sombres : Arkham fourmille d’adeptes de sciences occultes, de disciples de cultes obscurs. Et puisque ce roman est un second tome, on se doute bien – ou du moins, on juge fort logique – que le chemin de Lillian va finir par croiser, à un moment ou à un autre, celui des personnages du premier opus, que toute cette affaire est liée, d’une façon ou d’une autre, aux événements du premier opus. Et il semblerait qu’effectivement, c’est bien là que se situe tout l’enjeu véritable de cette intrigue : il fallait introduire un nouveau personnage (Lillian), tout en trouvant une façon élégante d’en faire réapparaitre d’autres (souvenez-vous, Milton a disparu dans une dimension parallèle, et Kristen a fini à l’asile, hautement perturbée par ses expériences surnaturelles), afin que puisse se poursuivre la saga … On est vraiment et purement dans un tome de transition, pour achever ce qui restait en suspens à la fin du premier tome, et ouvrir la porte à de nouvelles péripéties, la petite équipe étant enfin réunie. Et même si c’est très bien mené, même si on se laisse très aisément entrainer par l’histoire, je n’ai pas pu m’empêcher de trouver ce tome un peu moins bon que tout ce que l’auteur m’avait habituée jusqu’à présent : ça manque un peu de tension, de dynamisme. On tourne un peu en rond, on fait trainer la chose en longueur, pour combler un tome tout entier de cet « entre-deux », de cet interminable prologue qui s’ignore …
N’allez surtout pas me faire dire ce que je n’ai pas dit : j’ai aimé ce roman. Comment, en effet, ne pas se laisser entrainer par cette enquête qui promet d’être bien plus … surprenante que tout ce que Lillian pouvait imaginer ? Bien en sécurité derrière notre livre, nous frissonnons d’avance en attendant le moment où notre innocente journaliste se retrouvera face à cette réalité des plus inconcevables : ce qu’elle prenait pour des élucubrations d’illuminés ou de déséquilibrés est bel et bien vrai. Tandis qu’elle progresse toujours plus dans ses investigations, nous attendons l’instant fatidique où l’une ou l’autre de ses découvertes sortiront de l’ordinaire, la mettront sur la voie d’une toute autre piste, assurément plus « sensationnelle » … mais également bien plus dangereuse. Comme toujours, Guy-Roger Duvert a réussi à me happer du début à la fin, à me faire trembler d’effroi, à me faire soupirer de soulagement, à me faire sursauter de surprise. C’est là son immense talent : réussir à rendre chacune de ses histoires follement prenantes, quand bien même il ne s’agit ici que d’une « histoire-passerelle », quand bien même la tension dramatique est loin d’être aussi poignante que dans ses autres récits. Ainsi, même si, comme je le disais, j’ai parfois trouvé que l’histoire s’éternisait quelque peu, parce qu’on ressent vraiment ce côté « simple transition entre deux vraies intrigues » et qu’on est quelque peu frustré de ne pas entrer « vraiment » dans le vif du sujet, je ne me suis pas ennuyée pour autant, bien au contraire ! D’une certaine manière, Guy-Roger Duvert joue avec les nerfs du lecteur, stimule son impatience, pour lui donner encore plus envie de découvrir la suite !
En bref, vous l’aurez bien compris, même si ce tome n’est assurément pas mon préféré de l’auteur (je crois de toute façon que rien ne détrônera Outsphere, qui est selon moi, sans la moindre hésitation, son œuvre de loin la plus aboutie et la plus captivante), cela reste malgré tout un roman fort sympathique qui se dévore fort avidement ! Comme toujours, la plume de Guy-Roger Duvert est très cinématographique, prompte à pointer subtilement du doigt quelques petits détails qui auront toute leur importance par la suite, prompte également à multiplier les circonvolutions pour ne pas tout dévoiler d’un coup afin de mieux faire éclater la surprise le moment venu … Et le style a beau être relativement sobre, il n’en est pas moins d’une richesse impressionnante : sans trop en faire, il parvient à rendre toutes ses descriptions incroyablement vivantes, à tel point qu’il suffit de fermer les yeux pour se représenter le décor, les personnages, l’ambiance. Et c’est ainsi que le lecteur se laisse embarquer par l’histoire, sans même s’en rendre vraiment compte : on lit une page, puis une deuxième, on enchaine trois chapitres d’affilée sans les avoir vu passer, on se soudainement compte qu’une heure est passée sans qu’on voit les minutes filer. Et voilà que l’on tourne la dernière page, avec l’étrange sentiment d’avoir changé d’espace-temps : comment cela se fait-il donc que c’est déjà terminé alors qu’on vient seulement de commencer ? Et surtout … comment patienter jusqu’à la suite, après un épilogue tel que celui-ci ? Soyez prévenu, l’auteur sait très bien attiser la frustration du lecteur !