samedi 21 août 2021

L'adieu à Camille - Guy-Roger Duvert

L’adieu à Camille, Guy-Roger Duvert

 Editeur : Autoédition

Nombre de pages : 270

Résumé : Installé depuis deux ans à la PJ de La Rochelle, le capitaine Gabriel Podilsky gère son deuil aussi bien que possible, ayant préféré s’aider de récentes technologies révolutionnaires là où d’autres se laissent tomber dans la dépression ou dans l’alcoolisme. Lorsqu’on l’envoie enquêter sur la mort d’une actrice hollywoodienne venue tourner un long métrage international sur l’Île d’Aix, il n’est pas surpris d’y trouver des histoires de sexe, de drogue, de pouvoir et d’argent. Il l’est déjà beaucoup plus en découvrant que la même technologie dont il profite s’avère possiblement liée au meurtre …

 Un grand merci à Guy-Roger Duvert pour l’envoi de ce volume et à la plateforme SimPlement pour avoir rendu ce partenariat possible.

 

- Un petit extrait -

« - Merci beaucoup, Mesdames.

- Pas de problème, Inspecteur. Officier ? Faut vous appeler comment, au fait ?

- Poliment.  »

- Mon avis sur le livre -

 Alors même que j’ai finalement été obligée de prendre la (dure) décision de ne plus demander ou accepter de nouveaux services de presse pendant une durée indéterminée, mes troubles anxieux étant plus vivaces que jamais et la pression des dates de traitement pesant bien trop lourdement pour que je puisse continuer ainsi sans m’effondrer, je n’ai cependant pas pu me résoudre à laisser de côté le petit dernier de Guy-Roger Duvert … On va dire que c’est une exception qui confirme la règle ! Et c’est ainsi qu’à peine Les chroniques occultes lues et chroniquées, j’ai reçu dans ma boite aux lettres L’adieu à Camille : quand y en a plus, y en a encore ! Et même sans avoir lu le résumé – avec Guy-Roger, je sais désormais que je peux me « permettre » d’y aller les yeux fermés, de me laisser embarquer sans savoir dans quoi je mets les pieds, je sais que je ne serai jamais déçue – je sentais bien que l’ambiance allait être fort différente de ses récits précédents : de quoi titiller ma curiosité ! Et même si l’adage « chassez le naturel, il revient au grand galop » est particulièrement juste chez lui, puisqu’il ne peut visiblement pas s’empêcher de glisser une petite touche de futurisme un petit peu partout, mon intuition était la bonne : on est vraiment dans quelque chose de tout à fait nouveau pour lui, et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il est aussi bon en polar qu’en planet-opera !

« Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé » … Ces quelques mots de Lamartine, associés aux progrès fulgurants des recherches sur l’intelligence artificielle, ont donné naissance à la technologie Alter permettant de palier à la perte d’un être cher ou bien à la simple solitude. Il suffit désormais d’un simple implant cérébral pour permettre d’interagir à nouveau avec l’être aimé décédé ou l’ami créé de toutes pièces … C’est grâce à cette technologie que Camille, décédée trois ans auparavant, continue d’accompagner le capitaine Gabriel Podilsky dans toutes ses enquêtes, quand bien même l’utilisation des implants Alter est théoriquement interdite durant le service. Lorsqu’il est envoyé sur la petite île d’Aix, reconvertie en plateau de tournage pour un film historique, afin d’élucider les causes de la mort d’une célèbre active hollywoodienne ayant fait l’objet d’un véritable scandale médiatique quelques temps auparavant, il s’attend à croiser le traditionnel quatuor « sexe, drogue, gloire, argent » et à ce que l’affaire soit rondement menée. Mais tandis que les meurtres et tentatives de meurtres se multiplient sur l’île, certains éléments le poussent à envisager l’implication d’un Alter dans l’équation ...

Il semblerait que Guy-Roger Duvert ait voulu rendre hommage à son « autre monde » en plongeant le lecteur sur un plateau de tournage : c’est bien sur une petite île choisie comme décor pour une grosse production hollywoodienne que se déroule ce polar pas tout à fait comme les autres ! Il y a donc cette petite ambiance de huis-clos à la Agatha Christie qui s’entremêle avec celle, tumultueuse et fantasque, du monde du cinéma : une association surprenante mais drôlement efficace ! D’autant plus qu’on s’en doute bien, l’enquête de ce brave Gabriel – dont j’ai apprécié le côté un peu « bourru » et cynique, même s’il est parfois bien trop … bourrin à mes yeux d’hypersensible – ne va pas être aussi évidente qu’elle n’en a l’air au premier abord. En effet, à première vue, tout semble le pousser sur la piste d’un bain de minuit qui a mal tourné : des falaises abruptes, une actrice réputée pour se droguer retrouvée morte sur la plage … Mais il n’y aurait pas d’histoire si les choses étaient aussi simples que cela ! Et pour tout dire, tout semble au contraire de plus en plus compliqué à chaque nouvel interrogatoire et découverte : petit à petit, le nombre de suspects augmente de façon exponentielle, tandis que le nombre de mobiles se multiplie comme jamais. Est-ce une histoire de cœur brisé et de vengeance, de jalousie et de possessivité, ou bien une magouille pour évincer une actrice devenue trop gênante au profit d’une autre jusqu’alors habituée à l’ombre des petits rôles ?

L’intrigue, et donc l’enquête, tient en cinq jours : c’est peu, très peu, trop peu sûrement (j’y reviendrais plus tard), mais cela a au moins l’avantage d’instaurer un rythme absolument trépidant. Il n’y a aucun temps mort : Gabriel, son coéquipier « physique » et sa collègue « virtuelle » courent d’un bout à l’autre de l’île pour tenter d’interroger tout ce beau petit monde sans perturber plus que nécessaire le tournage qui a déjà pris beaucoup de retard. Et le temps presse : contre toutes attentes, il semblerait qu’ils soient en réalité sur la piste d’un tueur en série … Toutes leurs théories s’effondrent à chaque fois qu’un nouveau meurtre vient briser la série de constantes : comment vont-ils parvenir à démasquer le meurtrier s’ils ne parviennent même pas à comprendre sa logique ? Comment vont-ils réussir à l’empêcher de sévir à nouveau s’ils ne peuvent pas deviner qui sera sa prochaine cible ? Petit à petit, une sorte de compte à rebours s’enclenche, une véritable course contre la montre s’entame. Et clairement, ça marche : on dévore chaque chapitre, la gorge un peu plus nouée à chaque fois, de peur qu’une nouvelle victime ne soit découverte, tandis que notre esprit s’efforce de tourner dans tous les sens les quelques certitudes et indices à sa disposition pour tenter de découvrir qui est le coupable. On aimerait comprendre avant le capitaine … mais peine perdue.

Car c’est finalement le seul petit point « noir » que je peux « reprocher » à ce roman, le seul élément qui me fait dire que ce n’est assurément pas le meilleur de Guy-Roger Duvert : le dénouement. Trop rapide, précipité … et un peu tiré par les cheveux. J’ai bien conscience que tout était fait pour nous mener sur une fausse piste pour mieux nous surprendre le moment venu, mais cela donne plutôt le sentiment que l’enquête (et donc l’histoire) est partie dans tous les sens pour finalement pas grand-chose, et c’est un petit peu dommage de nous avoir « appâté » avec cette technologie pour qu’elle ne soit finalement que si peu exploitée … Tant et si bien qu’on a quelque peu du mal à comprendre le bien-fondé du titre : bien sûr, on peut très vaguement discerner une petite pointe de réflexion chez Gabriel concernant cette fameuse technologie, mais rien de suffisamment poussé pour justifier ce titre. Cela me chagrine d’autant plus que, jusqu’à présent, l’auteur m’avait justement habitué à la présence d’une véritable réflexion sur les avantages et les inconvénients des avancées technologiques mises en œuvre dans ses univers futuristes, des avancées qui ne sont pas si éloignées de ce que nous tentons d’ores et déjà de créer en s’imaginant « améliorer » notre mode de vie … La résolution de l’enquête est surprenante, certes, et on comprend bien en quoi l’existence de cette technologie nous a induit, ainsi que les enquêteurs eux-mêmes, en erreur, mais c’est justement un peu dommage qu’elle n’ait servi qu’à cela … Mais cela ne gâche rien au plaisir de lecture, heureusement !

En bref, vous l’aurez bien compris,  même si ce n’est clairement pas mon roman préféré de Guy-Roger Duvert, ça reste un petit polar « subtilement futuriste » fort sympathique, qui fait passer un bon moment de lecture. Il est vrai que les adeptes du roman policier « pur et dur » resteront sans doute un peu sur leur fin face au dénouement un tantinet trop rapide et facile, et que les amoureux de la science-fiction « bien carabinée » grimaceront face au peu d’importance de cette technologie futuriste, mais pour un lecteur « éclectique » qui aime un peu tous les genres, ce roman est vraiment idéal ! J’ai énormément apprécié de faire une incursion dans le monde du cinéma, d’en apprendre un peu plus sur la réalité des tournages, sur la complexité des tournages également, sur le travail de toutes ces petites mains de l’ombre sans qui aucun film ne verrait le jour, véritable petite armée de fourmis courageuses qui courent dans tous les sens pour veiller au bon déroulement de cette incroyable machine qu’est le cinéma. Cela confère vraiment une ambiance assez unique à ce polar ! Ajoutez à cela le caractère plutôt haut en couleur de notre héros et narrateur, avec son cynisme à toute épreuve, et vous comprendrez que c’est un roman policier que j’ai pris grand plaisir à lire !

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