Editeur : Yves Michel
Nombre
de pages : 302
Résumé : [Tome 2 du Cri du Colibri. Peut se
lire indépendamment du premier mais il est fortement recommandé par l’auteur,
l’éditeur et moi-même de lire le premier avant.] Quatorze ans après le début de la Grande Crise, Léo parcourt les
routes au sein de la Confrérie des Amandiers. Comme toutes les caravanes de
Recycleurs, ces artisans nomades tentent de relancer une activité économique à
échelle humaine, basée sur les principes fondamentaux de la transition :
sobriété heureuse, coopération, communication non-violente, créativité.
- Un petit extrait -
« Léo ouvrit les yeux bien avant l’aube. Sur un arbre du Champ de Mars, un merle s’égosillait à perdre haleine. Le jeune homme écouta, charmé, ce virtuose anonyme. Ignorant tout de l’œuvre d’Olivier Messiaen, il se demanda si un compositeur avait déjà tenté de puiser son inspiration dans cette musique naturelle et intemporelle. Etait-il seulement possible de rendre au moyen d’un instrument – ou d’un orchestre – la palette infinie de sonorités qu’un simple volatile maitrisait à la perfection, sans même avoir mis les pieds dans un conservatoire ? »
- Mon avis sur le livre -
Quand j’ai appris qu’il y allait avoir un
deuxième tome au fabuleux (mais trop peu connu malheureusement) Cri du
Colibri, j’ai commencé
à danser la samba, la salsa et même le tango dans ma chambre, trébuchant toutes
les deux secondes contre un sac ou une pile de livres sans-étagère-fixe.
J’avais littéralement adoré le premier volume, au point de ne pas réussir à en
écrire une chronique digne de ce nom (ceci devrait d’ailleurs être réglé très
prochainement : une relecture du Cri du Colibri s’impose et une actualisation de la chronique
devrait donc suivre) tellement l’émotion était forte. Je dois bien vous
admettre que la rédaction de cet article n’est pas vraiment plus facile :
l’auteur pourra vous le confirmer (un petit coucou à Michel s’il passe par
là !), mon agitation post-lecture était assez impressionnante. Je vous explique
ça en détail un peu plus bas, ne vous inquiétez pas !
Il y a quatorze ans de cela, la Grande Crise
déclenchée par un choc boursier considérable a ravagé l’Europe. Pour survivre
suite au désengagement de l’Etat et des aides humanitaires et en dépit des
pénuries d’énergie, il a fallu s’organiser différemment. Tandis qu’à Mulbach,
petit village alsacien niché au pied des Vosges, une véritable communauté basée
sur « l’autonomie, la sobriété heureuse, la solidarité et la
collégialité » s’est progressivement mise en place, les Confréries de
Recycleurs sillonnent les routes afin d’offrir leurs services d’artisans
spécialisés à qui accepte d’accueillir leur campement itinérant. Léo est
Aspirant dans la Confrérie des Amandiers, mais son attention est actuellement
plus attirée par Clara, la fille de la Patriarche, que par son passage imminent
au statut de Novice … A Muhlbach, l’harmonie de la petite famille de Léa se
voit ébranlée par le retour inattendu d’une vieille connaissance, tandis que le
questionnement se fait de plus en plus fort au sein de la collectivité :
que se passe-t-il au-delà des limites de la plaine d’Alsace ?
La grande particularité de ce deuxième tome,
c’est qu’il se déroule quatorze ans après les événements du premier
volume : les ellipses temporelles aussi longues, ça ne court pas les rues,
pour la simple et bonne raison que c’est assez délicat à gérer. Il faut
apporter suffisamment d’informations pour que le lecteur comprenne les
événements qui se sont déroulés entre temps sans pour autant le submerger ou l’embrouiller.
Il faut trouver l’équilibre, le juste milieu, le bon dosage … Monsieur Hutt est
un alchimiste hors pair ! Les explications qu’il nous donne, autant sur la
transformation de la société suite à la Grande Crise que sur les changements
dans la vie des personnages, réunissent parfaitement ces deux exigences :
pas une seule fois on se dit « Mince, mais comment ils en sont arrivés là,
ce n’était pas comme ça à la fin du premier !? », mais on ne se dit
pas non plus « Non mais c’est bon, on a compris, pas besoin d’épiloguer
là-dessus pendant trois pages ! ». Non, on se laisse porter par ces
renseignements bienvenus et bien menés, on les boit comme du petit lait !
L’autre caractéristique de ce roman, c’est sa
double narration : nous suivons alternativement les pérégrinations de Léo,
adolescent impliqué dans une caravane de Recycleurs parcourant la France pour
offrir services et divertissements, et le quotidien mouvementé des habitants de
Muhlbach, qui commencent progressivement à ressentir le besoin de savoir à quoi
ressemble le monde. Petit à petit, ces deux intrigues parallèles convergent l’une
vers l’autre, se répondent et s’entremêlent pour former un scénario des plus captivants.
Parce qu’avant toute chose, ce récit est justement cela : une histoire passionnante,
émouvante, parfois dramatique et tragique, mais toujours illuminée par cette
formidable lueur d’espoir qui brule à l’intérieur de chacun des personnages. Et
quels personnages ! A eux seuls, ils font toute la force et la richesse de
ce roman : leur personnalité profondément humaine, leurs qualités et leurs
défauts, leurs joies et leurs peines les rapprochent du lecteur, qui peut ainsi
très facilement s’identifier à l’un ou à l’autre et vivre ainsi plus
intensément le récit.
Mais ce livre est bien plus qu’une simple
fiction destinée à faire rire ou pleurer le lecteur au gré des rebondissements
de l’intrigue. Ce livre met en avant, avec beaucoup de finesse, par l’intermédiaire
de la Chartre de la Confrérie des Amandiers ou celui du fonctionnement
harmonieux du petit village alsacien, un certain nombre de valeurs qui font
cruellement défaut à notre société de consommation et d’hyper-numérisation :
le partage, la solidarité, l’échange et la confiance mutuelle. A cela s’ajoute
également la présentation d’un mode de vie basé sur le respect des ressources
naturelles, l’autosuffisante alimentaire, la modération dans la consommation d’énergie,
mais également la coopération, la communication et la participation de chacun
au bien-être de tous. Avec une lucidité rare, l’auteur expose les bienfaits de
cette organisation sociale, mais aussi les difficultés que peut rencontrer la
mise en place et le maintien de ce genre d’initiatives. L’équilibre est
toujours fragile, et il suffit parfois de bien peu de choses pour que les
mauvaises habitudes reprennent le dessus … cela, ce livre le montre aussi, dans
une fin aussi grandiose que bouleversante, qui ouvre la porte à une impatience
extrême : « A quand la suite ?! ».
En véritable conteur et fabuliste moderne,
Michel Hutt nous offre une fois de plus un roman d’une richesse inouïe, aux
messages multiples et à la narration éblouissante. Construit autour d’une
famille aussi hétéroclite que soudée, ce récit s’ouvre à une ribambelle de
personnages tous aussi attachants les uns que les autres, qui témoignent chacun
à leur manière de la dynamique qui anime la vie. Ode à la camaraderie et à la
fraternité, à l’entraide et à la solidarité, mais aussi à l’amour et à l’amitié,
cette histoire est une véritable bouffée d’air frais : si le découragement
et les tracas semblent parfois prendre le dessus sur l’optimisme et la joie,
tout fini toujours par s’arranger lorsqu’on s’appuie les uns sur les autres. A
plusieurs, le monde est définitivement bien plus agréable à habiter !
Je ne connais pas du tout :/ mais ton avis donne envie d'en savoir plus
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