Editeur : Les Arènes
Nombre
de pages : 397
Résumé : Les mathématiques sont une science, certes,
mais une science de l’imagination qui nous permet de répondre aux questions
universelles que pose la littérature : le temps, la vie, la mort, l’amour ... Auteur
reconnu et cerveau d’exception, Daniel Tammet a le don de raconter les
mathématiques, de les rendre concrètes et vivantes, à travers sa propre vie,
notre quotidien, la poésie ou la grande Histoire.
- Un petit extrait -
« Je songeais à ces huit secondes. Pour atteindre le réverbère suivant, je n’avais qu’à faire quelques pas. Avant d’y parvenir, je devrais d’abord arriver à mi-chemin. Il me faudrait quatre secondes. Mais cette observation impliquait que les quatre secondes restantes pouvaient être divisées, elles aussi, en deux moitiés égales. Un nouveau mi-chemin donc qui se situe six secondes après le moment du départ. Seules deux secondes me sépareraient alors du but. Pourtant, avant d’y arriver, un autre « mi-chemin » interviendrait, au bout d’une seconde. Je sentis alors mon cerveau bouillonner sous mon bonnet de laine. Car, après les sept premières secondes, la huitième et dernière se diviserait elle-même en deux moitiés. Sept secondes et demie après avoir démarré, la demi-seconde restante ne s’écoulerait pas avant que j’aie franchi un point situé la encore à mi-chemin. Après sept secondes trois quarts m’attendait encore un quart de seconde de trajet. Si je parcourais la moitié du chemin restant, il me resterait encore un huitième de seconde à parcourir. Un seizième de seconde m’éloignerait du réverbère, puis un trente-deuxième, puis an soixante-quatrième puis un cent-vingt-huitième de seconde, et ainsi de suite. Des fractions de fractions de fractions de seconde me sépareraient toujours de la fin. »
- Mon avis sur le livre -
Il est grand temps de vous faire une
confidence : contrairement à ce que les apparences peuvent laisser penser,
je ne suis pas une grande littéraire. C’est toujours avec un certain désespoir
que je me lance dans une dissertation ou un commentaire de texte : ces
exercices m’exaspèrent au plus haut point. Pour tout avouer, pendant bien des
années, j’étais persuadée de terminer en S … ce n’est que deux jours avant le
conseil de classe d’orientation de fin de seconde que j’ai décidé d’aller en
ES. C’est tout d’abord mon amour pour l’économie et la sociologie qui a motivé
de choix, mais j’ai rapidement compris que pour l’amoureuse de statistiques et
de probabilités que j’étais, cette filière serait parfaitement appropriée.
Parce que oui, aussi étonnant que cela puisse paraitre, j’aime énormément les
maths. Les suites, les intégrales, les dérivées … c’est toujours avec grand
plaisir que je me plongeais dans mes devoirs du soir, n’hésitant pas à faire un
ou deux exercices de plus que ce qui était demandé pour le seul plaisir de
jongler avec les chiffres ! C’est donc avec grand intérêt que je me suis
plongée dans L’éternité dans une heure, sous-titré La poésie des nombres : mêler lecture et mathématiques, quel merveilleuse perspective !
Autant dire tout de suite que je n’ai pas du
tout été déçue par ce livre ! A travers 25 chapitres, 25 thématiques donc,
Daniel Tammet évoque les mathématiques, parle des mathématiques … sans jamais,
toutefois, faire de mathématiques, ce qui rend cet ouvrage accessible à tous. Il
est tantôt question d’histoire des sciences (quel régal d’en apprendre plus sur
les grands mathématiciens dont nous ne connaissons que leur théorème le plus
fameux, portant souvent leur nom !), tantôt de linguistique (c’est
toujours intéressant de constater à quel point la langue d’une civilisation est
influencée par le regard que porte celle-ci sur le monde) … Daniel Tammet
montre que les mathématiques ne sont pas une science fermée sur elle-même, mais
bien une discipline en lien avec tous les aspects de la vie. Qu’il s’agisse d’un
flocon de neige, d’une poésie, d’une partie d’échec ou d’une œuvre d’art, les
mathématiques sont là. Et alors, ce mot ordinairement associé à la difficulté devient
aussitôt couplé à l’idée de beauté. Daniel Tammet aime les nombres car ils sont
beaux, et il cherche à nous initier à cette beauté.
Bien évidemment, certains chapitres m’ont
plus intéressée, plus touchée que d’autres. J’ai tout particulièrement apprécié
celui consacré à « la mère idéale », un chapitre plus
autobiographique dans lequel l’auteur nous raconte comment il s’évertue à s’aider
des probabilités afin de tenter de comprendre sa mère, ses choix, ses
comportements. Il raconte comment, enfant, il s’est rendu compte que cette
dernière ne correspondait pas à l’image que son cœur d’enfant avait contribué à
forger dans son esprit, et comment, depuis lors, il tachait de déterminer qui
était réellement sa mère. C’est un peu triste, mais j’ai trouvé cela tellement
touchant … J’ai beaucoup rigolé en lisant l’histoire d’André-François
Raffray dans le chapitre intitulé « les statistiques et l’individu » :
ce monsieur espérait faire une bonne affaire en achetant en rente viagère la
maison d’une nonagénaire … mais cette dernière est devenue la femme la plus
âgée du monde, et ce brave monsieur est mort avant elle, et sa femme elle-même
a du continuer à payer durant des années ! S’ensuit alors une réflexion
mêlant statistiques et sociologie afin d’amener le lecteur à comprendre l’erreur
de monsieur Raffray. Très drôle et très intéressant, donc.
A côté de cela, la plume de Daniel Tammet
fait des miracles. On se plonge avec un plaisir sans cesse renouvelé dans
chaque chapitre, tant le texte est agréable à lire. L’auteur parvient à rendre
très simple même les théorèmes et principes mathématiques les plus complexes,
il fait vivre les nombres et les calculs afin qu’ils ne soient plus rébarbatifs
ou compliqués mais passionnant et évident. Il nous prouve aussi que les mathématiques
peuvent être drôles, étonnantes. Son style est à la fois riche et sobre,
mélodieux et épuré … comme les mathématiques, finalement ! Il y a
également une petite touche d’humour et de légèreté qui rend cet ouvrage fort
sympathique à dévorer. On a vraiment le sentiment que Daniel Tammet s’adresse
directement à nous, et à nous seul : par l’utilisation du « nous »
reliant lecteur et auteur, par l’intermédiaire de quelques interjections et de
légères touches de connivence, Daniel Tammet cherche vraiment à réduire la
distance qui peut parfois s’instaurer à travers les mots. Les thématiques abordées
sont suffisamment diverses et universelles pour intéresser un peu tout le monde :
le temps, la vie, l’amour, la mort … voici quelques exemples qui suffisent à
prouver que ce livre n’est pas uniquement adressé aux amoureux des
mathématiques, mais bien à ceux que la curiosité et la sensibilité habitent !
En bref, je suis vraiment ravie d’avoir
découvert ce livre, si atypique mais si captivant ! Des chapitres ni trop
longs ni trop courts qui peuvent se lire indépendamment les uns les autres, des
thématiques variées, des anecdotes parfois très intéressantes (on en apprend,
des choses, en lisant cet ouvrage, je vous l’assure !) et parfois très
drôles … sans oublier une plume vraiment fluide tout en restant très belle !
Que vous aimiez les mathématiques ou qu’au contraire vous les détestiez, je
vous l’assure, ce livre peut vous plaire. J’ai
vraiment passé un très agréable moment de lecture en compagnie de Daniel
Tammet et des nombres qu’il aime tant, et je vous en souhaite tout autant !
Ce livre
a été lu dans le cadre de la Coupe des 4 maisons
(plus
d’explications sur cet article)
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