Editeur : Bayard
Nombre de pages : 425
Résumé : Depuis qu’elle a survécu au drame qui a frappé sa famille, Kennedy, seize ans, n’a plus qu’un but : poursuivre les recherches que menait son frère sur l’Univers et la vie extraterrestre. Nolan, jeune lycéen d’une ville voisine, est, quant à lui, déterminé à découvrir ce qui est véritablement arrivé à son frère, disparu sans laisser de trace. Kennedy et Nolan ne se connaissent pas, mais leur quête va les mener au même étrange signal. Une fréquence négative qui ne devrait pas exister. Un message qui semble les alerter. Mais la menace qui plane sur eux peut-elle encore être écartée ?
Un grand merci aux éditions Bayard pour l’envoi de ce volume et à Babelio pour avoir rendu ce partenariat possible.
« La plupart des gens ont besoin de preuves pour croire. Mais, à mon avis, ça marche peut-être dans l'autre sens. Peut-être qu'on commence par croire, que cela nous change et, du coup, ça nous rend capables de percevoir d'autres possibilités. »
La raison peut-elle tout expliquer ? Tout du moins notre monde s’efforce-t-il de le croire (quand bien même une croyance peut être parfaitement irrationnelle, c’est une contradiction qu’il est politiquement incorrect de pointer du doigt) : quoi qu’il arrive, nous cherchons toujours à apporter une explication logique, cartésienne, quitte à occulter les éléments qui contredisent cette-dite explication, quitte à extrapoler pour mieux la faire tenir debout. Et pourtant, parfois, on a beau tourner et retourner la question dans tous les sens, difficile de trouver une justification purement rationnelle. Ainsi, comment expliquer qu’une petite fille hospitalisée, entendant débarquer des dizaines et des dizaines d’ambulances chaque jour, se soit réveillée en panique au beau milieu de la nuit au son d’une sirène, sans savoir que c’était sa maman qui était transportée aux urgences ? Et comment expliquer qu’un jeune homme habitant en ville, et voyant passer des dizaines et des dizaines de voitures de police chaque jour, se soit senti paniqué en en voyant une passer, sans savoir que c’était sa maman qui avait eu le léger accident de voiture vers lequel ils se précipitaient ? Une ambulance fait le même bruit qu’une autre ambulance, quand bien même elle transporte votre maman. Une voiture de police ressemble à une autre voiture de police, quand bien même elle se dirige vers votre maman. Il y en aura toujours pour soutenir qu’il y a une seule et unique explication possible à ces pressentiments, et qu’elle est seulement et purement rationnelle … mais ne peut-on pas envisager qu’il y ait autre chose que la seule raison en ce bas-monde ? A trop suivre la raison, ne risquons-nous pas de passer à côté de quelque chose ?
C’est ce que pense Nolan. Il y a deux ans, juste avant la disparition de son frère ainé, tandis que ce dernier s’éloignait dans le parc avec son chien, Nolan a eu une de ces prémonitions indescriptibles, terrifiantes, la certitude absolue qu’un malheur allait survenir. Mais ses parents n’ont pas voulu l’écouter, et quand ils ont commencé à se demander où était passé Liam, il était trop tard … Aujourd’hui, ils ne l’écoutent pas plus : investis corps et âmes dans leur association consacrée à la recherche des enfants portés disparus, ils passent désormais leurs journées à placarder des photos de gosses sur tous les murs de la maison, à répondre à des centaines de coups de téléphones d’inconnus assurant avoir vu l’un ou l’autre de ces gamins, à accueillir et former des dizaines d’étudiants « bénévoles » en quête d’un bon point dans leur CV … Nolan, lui, déambule dans le parc, armé de ses détecteurs de champs électromagnétiques et autres appareils de mesure, convaincu qu’il finira par comprendre ce qui a bien pu arriver à son frère. Et peut-être, ainsi, le retrouver … De son côté, Kennedy quitte chaque nuit le domicile de son oncle, devenu son tuteur suite à la mort de sa mère et l’emprisonnement de son frère ainé, pour se rendre dans la remise de son ancienne maison. Là, elle relève méthodiquement les données collectées par le radiotélescope de son frère, qui nourrissait l’espoir de recevoir un jour un signal venu de l’espace. Tandis que le procès d’Elliott approche à grands pas, Kennedy reste profondément convaincu qu’il ne peut pas être le meurtrier que tout le monde décrit : il y a forcément quelque chose qui leur échappe. Nolan et Kennedy ne se connaissent pas. Mais ils vont tous les deux recevoir le même signal : une fréquence négative. Et s’ils étaient faits pour se rencontrer ? Pour trouver, ensembles, les réponses à leurs questions respectives ?
Kennedy et Nolan. Deux victimes collatérales de drames familiaux qui ont fait les premières pages des journaux des semaines durant, jusqu’à ce qu’un nouveau fait divers plus sensationnel défraye la chronique. Pour tout à chacun, Kennedy n’est que « la sœur du gamin Jones », « celui qui a abattu sa mère et son beau-père », elle n’est que « la pauvre petite qui a appelé les secours ». Dans tous les regards, il y a ce mélange de pitié et de curiosité morbide : tout le monde aimerait lui demander comment c’était, de se retrouver dans ce couloir ensanglanté, au beau milieu de la nuit, et de voir son frère un flingue à la main devant les corps de leur mère et son petit ami. Et pour tout le monde, Nolan n’est que « le frère du petit prodige disparu », « le fils des gens de l’Association ». Celui qui, déjà avant, était dans l’ombre de son frère, gardien de but de l’équipe régionale, lauréat d’une bourse au mérite, star du lycée, de la ville, du comté, du pays. Quant aux « mieux informés », ils ne le voient que comme « le gamin qui a eu une funeste intuition » et qui désormais « hante le parc à la recherche de fantômes ». Kennedy et Nolan sont condamnés à être réduits à ces drames qui ont détruits leurs familles respectives : ils n’existent pas par eux-mêmes, mais seulement à travers cette tuerie ou cette disparition. Dans le meilleur des cas, ils sont purement et simplement ignorés. Comme s’ils n’avaient aucune importance : ils ne sont pas morts ni disparus, ils ne sont pas non plus le meurtrier ou le kidnappeur, bref, ils ne méritent aucune attention particulière des foules assoiffées de tragédies et de vicissitudes …
Et pourtant, Kennedy et Nolan souffrent. En quelques minutes à peine, toute leur existence a été bouleversée, piétinée. Toutes leurs certitudes ont été ébranlées, ébréchées. Un grand frère plus patient qu’un moine bouddhiste et plus sensible qu’un nouveau-né ne peut pas se transformer soudainement en meurtrier sanguinaire. Un jeune homme sans histoire et son chien ne peuvent pas disparaitre sans laisser la moindre trace. Il y a forcément autre chose que les explications toutes faites, toutes prêtes, des gens très rationnels, des enquêteurs blasés par des dizaines d’affaires similaires. Aucun drame n’est identique, aucun drame n’est insignifiant. Ils ont le sentiment qu’à force de faire de chaque fait divers un simple divertissement anodin, on a banalisé la douleur de ceux qui restent. De ceux qui vivent avec les souvenirs, avec les remords : auraient-ils pu éviter le drame ? Y avait-il des indices, des signes avant-coureurs qu’ils n’ont pas décelés avant qu’il ne soit trop tard ? Elliott avait-il des raisons d’abattre sa mère et son compagnon ? Liam avait-il des raisons de fuir la maison ? Tant de questions. Et aucune réponse. Ou du moins, aucune réponse satisfaisante. Et c’est pourquoi Kennedy et Nolan s’obstinent. Ils ne baisseront pas les bas. Ils ne peuvent pas baisser les bras. Sinon, il n’y aura plus rien : cette ultime étincelle d’espoir, celui d’innocenter son frère, celui de retrouver son frère, c’est tout ce qui leur reste. Ils ne peuvent pas se résoudre à classer l’affaire, comme s’il suffisait d’un tampon clôturant un dossier pour reprendre une vie normale, comme si de rien ne s’était passé. Ils ont viscéralement besoin de savoir, de comprendre …
Et voici qu’un mystérieux signal les rapproche l’un de l’autre, après que ce funeste et mélodramatique décor ait été longuement posé. L’autrice s’efforce de jouer sur l’incertitude du lecteur : élément fantastique ou non ? simple désir inconscient de deux ados paumés ou véritable signe du destin ? D’une certaine manière, cela ne me semble pas important : cette ambiguïté permettra à tous les lecteurs d’y trouver leur compte, même si ne pas savoir risque d’en frustrer quelques-uns. Ce qui est crucial, c’est que leur rencontre va donner un nouveau souffle à leurs quêtes, à leurs enquêtes respectives. Ils se reconnaissent chacun dans la douleur de l’autre, et ressentent tous deux cette envie de soulager la souffrance de l’autre. A vrai dire, l’espace d’un moment, je me suis même dit que ce n’était pas grave, au fond, s’ils ne trouvaient rien : ils s’étaient trouvés, et cela suffisait. Ils étaient tous les deux tellement isolés dans leur peine, dans leur rage : ils y étaient enfermés comme dans des cages. Ils avaient l’un et l’autre besoin de quelqu’un qui les écoute, qui les comprenne, qui les soutienne. Qui leur donne du courage : ils ont été l’un pour l’autre l’impulsion qui manquait pour venir à bout du mystère. Pas seulement celui de ces drôles de signaux. Mais bien plus de ces tragédies. Leur rencontre, improbable, était l’élément manquant des deux enquêtes : c’est bien sûr un peu « gros », mais ne nous mentons pas, ça marche à tous les coups ! Et c’est peut-être d’ailleurs ce qui m’a empêchée d’être vraiment happée par l’intrigue : ça manquait un peu de suspense, c’était assez prévisible qu’ils allaient mettre le doigt sur quelque chose qui avait échappé à tous jusqu’à présent. Et que « tout serait bien qui finirait bien », ou du moins relativement bien …
En bref, je ne sais pas trop quoi dire de ce roman : dans l’absolu, je le trouve ni mauvais ni excellent. Je dirais que l’histoire manque un peu d’originalité, mais que les personnages valent vraiment le détour. Je n’ai pas vraiment ressenti cet aspect « palpitant, trépidant, haletant » que certains lecteurs décrivent dans leur commentaire : j’ai même trouvé qu’il y avait pas mal de longueurs, de lenteurs, qu’on tournait parfois un peu trop en rond, qu’on tournait autour du pot pour mieux faire éclater « les révélations finales ». Mais par contre, j’ai vraiment été très touchée par Kennedy et Nolan : l’autrice a vraiment su leur donner une vraie personnalité, très fouillée, très complexe, très nuancée, très juste. Ils ne sombrent jamais dans les stéréotypes, dans les clichés, et cette humanité les rend vraiment très attachants : on a terriblement envie de les voir aller mieux, et c’est seulement pour ça que l’on s’intéresse à cette double enquête. Et même si je n’ai pas pu m’empêcher de lever les yeux au ciel quand il est apparu évident que l’autrice ne nous épargnerait pas la petite romancette visiblement constitutionnelle des histoires pour adolescents, je n’ai pas non plus pu m’empêcher de trouver qu’ils étaient tout de même drôlement mignons ensembles ! Pour faire court, donc je dirai que je n’ai pas été transcendée par ce récit, sans doute parce que j’en ai déjà lu beaucoup trop du même acabit, mais que je reconnais qu’il peut constituer une très bonne lecture pour un lecteur au bagage littéraire un peu moins chargé ! C’est un petit thriller sans forcément trop d’ambition, mais qui joue finalement bien son rôle : nous distraire, le temps de quelques centaines de pages. En somme, une bonne lecture pour la période estivale !
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