samedi 6 novembre 2021

La guerre des clans, cycle 5, tome 6 : Le sentier des étoiles - Erin Hunter

La Guerre des clans, Erin Hunter

Cycle 5, tome 6 : Le sentier des étoiles

 Editeur : Pocket Jeunesse (PKJ)

Nombre de pages : 364

Résumé : Après des lunes de conflit, les chats se sont finalement répartis en cinq camps. Or le dangereux chat errant Balafre kidnappe la compagne de Ciel Bleu, Fleur d’Étoile, et exige en échange de sa libération toujours plus de gibier. Démuni, Ciel Bleu doit convaincre les autres groupes d’unir leurs forces. Les attaques féroces de Balafre se multiplient et les chats doivent se rendre à l’évidence : si les clans ne parviennent pas à s’allier, ce sera la fin de leur nouveau mode de vie.

 

- Un petit extrait -

« Balafre avait d’abord ordonné que tous les chefs le retrouvent le lendemain, dans la combe des quatre chênes. Heureusement, Ciel Bleu avait réussi à lui arracher quelques jours supplémentaires, jusqu’à la demi-lune. Balafre ne relâcherait Fleur d’Étoile que si tous s’engageaient à donner une partie de leur gibier aux chats errants – et pas qu’une seule fois, mais chaque jour. Ciel Bleu gonfla son pelage pour lutter contre le froid matinal. Alors que la mauvaise saison venait tout juste de s’abattre sur la forêt, le gibier se faisait déjà rare. Il serait difficile de convaincre Tonnerre, Ombre Noire, Rivière Ondoyante et Vent Vif. Accepteraient-ils seulement de rencontrer Balafre ? »

- Mon avis sur le livre -

 Mon arrière-grand-mère, sage parmi les sages, avait parait-il coutume de déclarer que « l’habitude rend la chose facile » …  Bien loin de moi l’idée de la contredire, mais je reste persuadée qu’elle aurait modéré ses propos si elle avait eu l’occasion de lire La guerre des clans : au bout de cinq cycles, je devrais théoriquement être « habituée » au déchirement de fin de cycle … mais cela ne rend nullement la chose plus « facile » ! Bien au contraire. J’ai même plutôt le sentiment que c’est un petit peu plus difficile à chaque fois, comme si les autrices affinaient progressivement leur capacité à nous faire pleurer toutes les larmes de notre corps dans les tous derniers chapitres, comme si elles savaient désormais où frapper pour nous faire le plus « mal » possible. A vrai dire, j’espérais fort naïvement que les choses seraient quelque peu différentes avec ce cinquième cycle : après tout, c’est un cycle vraiment à part, une escapade fugace en dehors du « cours normal de l’histoire », une « interruption spéciale » qui nous invite à laisser derrière nous les protagonistes que nous suivons depuis plus de vingt tomes pour en rencontrer de nouveaux, de parfaits inconnus … Je pensais que ce serait donc plus facile de les quitter, que je serai même heureuse de retrouver les « vrais » héros de la saga, mais j’avais complétement tort : c’est vraiment un crève-cœur que de devoir laisser derrière moi Gris Poil et les autres !

Après bien des lunes de conflits, après bien des souffrances et bien des peines, les chats entrevoient la douce lueur de la paix scintiller au bout du tunnel obscur dans lequel ils s’étaient engagés : suivant les conseils énigmatiques mais avisés des chats-esprits, victimes de leur aveuglement et de leur peur, ils ont fini par se scinder en cinq groupes. Mais voilà que, déjà, une nouvelle menace vient contrarier cet équilibre si durement acquis et encore si fragile : la compagne de Ciel Bleu a été enlevée par un chat errant des plus tyranniques, Balafre. Celui-ci est prêt à rendre la jeune reine à son compagnon, à « une seule et unique condition » : que les chats des cinq groupes s’engagent à lui donner chaque jour la moitié de leur gibier. Au moment de rencontrer les quatre autres chefs pour leur faire part de ces exigences, Ciel Bleu se demande s’il a la moindre chance de les convaincre de l’aider : ils ont d’excellentes raisons de lui en vouloir et d’en vouloir à Fleur d’Etoiles qui les a tous trahis … De plus, la mauvaise saison est là, le gibier se fait de plus en plus rare et de plus en plus rachitique : aucun groupe ne peut se permettre de se séparer de la moitié de leurs misérables prises … Mais Balafre est loin d’être patient : si les chefs refusent de céder volontairement leurs proies, ses chats viendront les prendre par la force.

On retrouve dans cet opus tout ce qui fait l’essence profonde de la saga : il est question de courage, de loyauté, d’amour, d’amitié, de dévouement, de solidarité … On a presque le sentiment de revivre : cette fois-ci, ça y est, on est vraiment dans La guerre des clans ! Les errances passées sont belles et bien terminées, désormais chacun sait où est sa juste place, chacun se sent pleinement à sa place … Et maintenant qu’ils se sentent bien dans leurs coussinets, ils s’épanouissent enfin et dévoilent tout leur « potentiel ». Alors qu’ils avaient tous tendance à s’égarer dans le tome précédent, les voici redevenus fidèles à eux-mêmes … et ça fait du bien ! D’autant plus que les épreuves passées les ont aidé à prendre conscience de leurs propres défauts, de leurs propres faiblesses, et leur ont surtout donné l’envie de s’améliorer, de combattre leurs mauvais travers. Ciel Bleu regrette profondément tout le mal qu’il a fait auparavant, et il s’efforce désormais de ne plus commettre les mêmes erreurs, et il comprend aussi pourquoi son fils ainé lui en veut tellement, il comprend pourquoi les autres chefs sont si réticents à lui faire confiance … Auparavant, il s’en serait offusqué, il aurait tempêté, hurlé à l’injustice, mais maintenant, il admet qu’ils ont parfaitement raison de lui en vouloir ou de se méfier de lui. Son évolution est vraiment profonde et touchante, on a vraiment envie de l’aider dans son combat contre lui-même, et de lui dire que oui, il a le droit au bonheur malgré tout !

Car ce tome nous rappelle aussi qu’il ne faut en aucun cas enfermer quelqu’un dans ses torts passés, qu’il faut toujours laisser une seconde chance et donner à l’autre l’occasion de se racheter et de devenir meilleur. Car pour que quelqu’un puisse changer, il faut qu’il ait le sentiment que changer pour quelqu’un, pour que quelqu’un se sente suffisamment fort pour lutter contre sa nature profonde, il faut qu’il sente que quelqu’un croit en lui, a confiance en lui. Il ne faut jamais laisser quelqu’un seul avec ses regrets, avec ses remords, avec ses combats intérieurs : il faut lui prouver que cela vaut la peine de faire tant d’efforts pour s’améliorer, il faut lui montrer qu’on le soutien dans sa volonté de devenir meilleur. De même, c’est un tome qui nous rappelle qu’il ne faut jamais mettre tout le monde dans le même sac, qu’il ne faut jamais s’arrêter aux préjugés et aux à priori avant de juger quelqu’un. C’est un tome qui rappelle que, certes, la confiance se mérite, mais qu’elle s’accorde aussi. Et que, parfois, c’est justement quand on refuse d’accorder pleinement sa confiance à quelqu’un que celui-ci finit par la trahir, car une « fausse confiance », ça fait mal. La confiance doit être réciproque : comment voulez-vous prouver à quelqu’un qu’il peut avoir confiance en vous s’il affiche ostensiblement qu’il ne vous fera quoi qu’il arrive jamais confiance ? Comment voulez-vous avoir envie de travailler main dans la main avec quelqu’un qui se méfie de vous sans vous connaitre le moins du monde ?

Pourtant, ainsi que nous le rappelle également ce tome, nous sommes bien plus forts ensembles. « L’union fait la force », dit le dicton, et c’est bien ce que vont expérimenter à plusieurs reprises les chats des différents groupes. C’est en œuvrant tous ensembles, patte dans la patte, chacun avec ses aptitudes propres, chacun avec ses compétences propres, qu’ils vont réussir à se sortir des terribles épreuves qui se dressent sur leur chemin. Même lorsque tout leur semblait perdu, lorsque la situation semblait désespérée, il y avait toujours un membre du groupe pour leur donner la force, le courage, l’envie de se battre jusqu’au bout pour ce qu’il leur semble être juste et bon. Envers et contre tout. Car ce tome rappelle enfin qu'il ne faut jamais se laisser abattre, qu'il y a toujours une lueur d'espoir au bout du tunnel ... Que c’est seulement quand on arrête d’y croire que tout est définitivement et réellement perdu. Depuis le début de ce cycle, et dans ce tome plus que jamais, Gris Poil est celui qui n’a jamais arrêté de croire, qui n’a jamais cessé d’espérer. Il n’est le chef d’aucun des groupes, et pourtant il est le plus solide pilier des cinq Clans. En toute discrétion, sans jamais demander la moindre faveur, le moindre privilège, en toute humilité, sans jamais se vanter, sans jamais prendre les autres de haut, Gris Poil est le ciment qui lie les groupes les uns aux autres, celui qui a posé fermement les fondations des Clans. Gris Poil est un vrai héros, de ceux qu’on oublie jamais, jamais, jamais …

En bref, vous l’aurez bien compris, ce tome, qui vous prend aux tripes à la fois dans les moments absolument palpitants et dans ceux qui sont tout bonnement déchirants, conclut en toute beauté ce cycle pas tout à fait comme les autres qui a su me convaincre pleinement ! Jamais je n’aurai pensé m’attacher aussi vite et aussi fort à de nouveaux personnages, jamais je n’aurai pensé que j’allais regretter profondément de devoir les quitter pour retrouver les protagonistes de l’histoire « principale ». Mais finalement, j’en viens à espérer de tout mon cœur que nous allons un jour retrouver Tonnerre, Vent Vif, Ciel Bleu, Rivière Ondoyante et Ombre Noire : après tout, même si les Clans sont désormais bel et bien formés, et même nommés, il reste encore bien du chemin à parcourir, donc je ne perds pas totalement espoir, peut-être les reverrons-nous un jour, dans un autre cycle. Ça m’aiderait peut-être à me remettre de cette fin, certes magnifique, mais surtout terriblement triste : j’ai rarement autant pleuré que lors du dernier chapitre de ce tome, c’est tout simplement déchirant au possible, comme si toute la tension accumulée au cours de l’histoire explosait dans une déferlante d’émotions et de larmes, comme si toute la puissance du récit s’était condensée dans un seul et unique chapitre pour nous offrir un final en apothéose, un final dont je me souviendrais sans doute toute ma vie, car c’est juste tragique et sublime. Qu’est-ce qu’elles sont douées, les Erin, n’empêche …

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