samedi 16 décembre 2017

La noirceur des couleurs - Martin Blasco



La noirceur des couleurs, Martin Blasco

Editeur : L’école des loisirs
Collection : Medium +
Nombre de pages : 246

Résumé : 1910, Buenos Aires. Une jeune femme réapparaît au domicile de ses parents des années après avoir disparue, une nuit alors qu’elle dormait dans son berceau. Une jeune femme sans aucun souvenir, un homme qui se comporte comme un chien, les images hallucinées d’une session d’hypnose, sont les pistes qui conduiront Alejandro à remonter le fil de cette sombre histoire jusqu’à un dénouement aussi terrifiant qu’inattendu.




Un grand aux éditions L’école des loisirs pour l’envoi de ce volume ainsi qu’à la plateforme Babelio pour avoir rendu ce partenariat possible.

- Un petit extrait -

« Il y en avait sur les murs, sur le sol, sur le plafond. Des lignes et des figures qui montaient, descendaient, se tordaient et s'entrecoupaient, explosion de formes et de couleurs. L'œuvre était fraîche, encore palpitante de vie. Au milieu du tableau, en plein centre, une étrange structure s'élevait à quarante centimètres de hauteur. La tête de Brian en constituait la base. Les yeux étaient ouverts. La bouche également, lui donnant une expression de surprise infinie. Sur la tête, un empilement d'os formait une espèce de pupitre où des feuilles étaient posées.  »

- Mon avis sur le livre -

Ce n’est plus un secret pour personne : j’aime énormément L’école des loisirs. Pas uniquement parce que ce sont les albums et petits romans de cette maison d’édition qui m’ont donné le gout de la lecture, mais aussi parce que leurs ouvrages sont toujours de grande qualité et qu’ils éditent un peu de tout - du contemporain, de la dystopie, du thriller, de l’atypique … C’est donc très enthousiaste que je me suis plongée dans La noirceur des couleurs, un thriller dont le résumé m’intriguait énormément : quelle est donc l’expérience menée sur ces cinq enfants disparus ? comment et pourquoi ce journaliste se retrouve-t-il mêlé à cela ? et surtout, c’est quoi cette histoire de couleurs ? Autant vous dire que ce roman, pas bien gros, n’a pas fait long feu … malgré mon manque de temps chronique, j’ai réussi à le dévorer en deux petits jours à peine !

1885. Cinq bébés, de cinq nationalités différentes, disparaissent mystérieusement la même nuit. 1910. Trois d’entre eux réapparaissent tout aussi mystérieusement, sans le moindre souvenir de ces vingt-cinq dernières années. Alejandro, journaliste, est engagé par le père d’Amira pour découvrir ce qui est arrivé à la jeune fille durant son absence. Aidé dans ses recherches par un talentueux mais fantasque hypnotiseur, Alejandro se lance à corps perdu dans cette enquête … Sans se douter un seul instant que les découvertes qu’il fera au cours de son investigation pourraient bouleverser son existence toute entière …

Je dois bien l’admettre, j’ai eu quelques difficultés à me plonger dans l’histoire : le début me semblait plat, futile, inutile. Ce n’est qu’arrivée au dernier chapitre que j’ai compris l’intérêt de cette longue et lente introduction, de ce « passage à vide » qui a failli me décourager à poursuivre ma lecture. Je ne suis définitivement pas douée pour repérer les indices semés ci et là par les auteurs de thriller : je me suis laissée surprendre du début à la fin, contrairement à d’autres collègues blogueurs qui regrettaient vivement la prévisibilité du dénouement ! Et même si c’est parfois un peu frustrant de se faire ainsi mener par le bout du nez, cela est finalement la preuve que l’auteur a bien fait son travail : j’avais tellement envie de savoir le fin mot de l’histoire, que je n’ai pas été capable de deviner par avance, que je dévorais pages après pages, chapitres après chapitres, afin de comprendre ce qui s’était passé … et ce qui était en train de se passer.

Car c’est bien là la grande particularité de ce roman : deux histoires nous sont contées simultanément et parallèlement. D’un côté, nous avons la narration « traditionnelle », qui suit Alejandro dans sa quête de vérité. Et de l’autre, nous avons le journal intime du docteur Andrew, à l’origine de l’enlèvement des enfants, qui nous explique son grand projet et l’avancement de cette expérimentation. J’ai énormément apprécié cette alternance de points de vue, qui a fait naitre en moi de nombreuses interrogations. Plus le récit avançait, plus je me demandais comment ces deux histoires, séparées de plus de vingt ans, allaient finir par s’entremêler, comment le passé allait-il rejoindre le présent. Alejandro découvrira-t-il la sinistre réalité qui se cache derrière ces longues disparitions ? Mais plus encore, ma curiosité se portait sur l’évolution de la situation : après avoir appris les horreurs subies par ces enfants au nom de la science, comment réagira-t-il ? L’histoire allait-elle s’arrêter une fois la vérité mise en lumière, ou bien les résultats de cette terrible enquête allaient-ils entrainer de nouveaux rebondissements ?

Ma crainte était là : que l’auteur se contente d’amener le personnage principal jusqu’à la connaissance, et s’arrête là. Fort heureusement, cette crainte s’est révélée infondée : les révélations finales, qui je le répète m’ont laissée bouche-bée tellement je ne m’attendais pas à cela (alors que, rétrospectivement, je me rend compte que j’aurai du m’en douter, les indices étaient suffisamment éloquents … c’est juste que l’auteur a réussi son pari avec moi : il voulait nous faire oublier un personnage, et je l’ai effectivement oublié, ce qui a causé ma perte), ouvrent la voie aux conséquences de cette découverte. Il y a du sang, des larmes, de la haine, de l’incompréhension, il y a de la vengeance, de la violence, de l’émotion. Et puis, il y a le retour à une vie « normale », une existence bouleversée par les répercussions de cette enquête, mais une vie qui reprend progressivement son cours … Je dois d’ailleurs avouer être restée quelque peu sur ma faim : j’aurai vraiment aimé une vraie conclusion qui nous dise clairement ce que sont devenus tous les personnages, au lieu de ce grand flou qui est tout sauf artistique. Cette fin n’en est pas une : alors que ce livre est censé être un one-shot, tout n’est pas réellement résolu, l’esprit du lecteur est encore en questionnement, et c’est fort dommage !

Malgré ce petit bémol final, j’ai passé un très bon moment de lecture en compagnie de La noirceur des couleurs, titre très bien trouvé au passage. Ce livre, très bien écrit, est à la fois une enquête policière et la porte ouverte  à un questionnement éthique : jusqu’où la science peut-elle et doit-elle aller ? peut-on tout accepter au nom de la science ? suffit-il d’avoir l’intention d’agir pour le mieux pour être dédouané de toute culpabilité ? A côté de ces interrogations, une autre question, plus sociologique, s’impose également : sommes-nous le fruit de notre nature humaine, ou bien de notre éducation ? Pour tout dire, j’ai ressorti mes cours de sociologie de terminale afin de replonger un peu dans cette grande thématique qui oppose nature et culture ! En bref, un roman très intéressant, surprenant et captivant, que je conseille à tous ceux qui ont le cœur bien accroché, car certains passages sont à la limite du gore …

Ce livre a été lu dans le cadre de la Coupe des 4 maisons
(plus d’explications sur cet article)

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