Editeur : Gallimard
Nombre
de pages : 338
Résumé : Prise dans la spirale vertigineuse de ses
pensées obsessionnelles, Aza, seize ans, n'avait pas l'intention d'enquêter sur
la disparition du milliardaire Russell Pickett. Mais c'était compter sans
Daisy, sa meilleure amie, et une récompense de cent mille dollars. Aza renoue
alors avec le fils Pickett, Davis. L'improbable trio trouvera en chemin
d'autres mystères et d'autres vérités, celles de la résilience, de l'amour et
de l'amitié indéfectible.
- Un petit extrait -
« Je n'ai rien contre les gens inquiets. S'inquiéter est la bonne façon de voir le monde. La vie est inquiétante. »
- Mon avis sur le livre -
Généralement, lorsqu’un nouveau roman de John
Green passe le seuil de la porte, il ne passe même pas par la case « PAL »
et finit immédiatement sur le bureau à la place destinée à ma lecture en cours …
Mais celui-ci a patienté deux longues années sur les étagères avant que je n’ai
le courage de le commencer … et je pense honnêtement que sans le challenge « Livra'deux
pour pal'Addict », il y serait resté encore un certain temps. Non par peur
d’être déçue : John Green ne m’a jamais déçue, je savais donc que je n’allais
pas l’être. Mais je savais également qu’après cette lecture, il ne me sera plus
possible de faire l’autruche : les « jolies » étiquettes
métaphoriquement collées sur mon front par divers psychiatres et autres
thérapeutes n’ont pas atterri là par hasard … Mon intuition me soufflait que la
rencontre avec Aza allait réduire à néant les œillères que je m’efforçais de
maintenir en place, et je n’étais pas certaine d’être prête à cela. Finalement,
je suis heureuse d’avoir franchi le cap : oui, ce fut dur, douloureux
même, mais je pense que cette prise de conscience ne peut que m’aider par la
suite, alors c’est plutôt positif.
Lorsque Daisy, sa Meilleure et Plus Intrépide
Amie, entend parler de la disparition du richissime Russell Pickett et de la
récompense de cent mille dollars promise à qui participerait à sa localisation,
le petit quotidien bien rodé et pourtant incroyablement angoissant d’Aza
bascule. Engluée dans la spirale infernale de ses pensées invasives, incapable
de résister aux injections obsessionnelles de son cerveau que tout effraye, la
jeune fille se retrouve embarquée bien malgré elle dans cette folle enquête qui
va la conduire à renouer avec Davis Pickett, ami d’enfance – si tant est qu’on
puisse parler d’amitié dans le fait d’avoir passé deux étés dans la même
colonie de vacances pour enfants ayant perdu un parent … Mais est-ce bien
Russell Pickett qu’Aza cherche ? Ne serait-ce pas, plutôt, le sens de la
vie et sa propre place dans le monde ?
Comme toujours chez John Green, la grande
force de ce roman, ce sont ses personnages. L’enquête autour de la disparition
de Russell Pickett n’est qu’un prétexte pour nous présenter Aza, Daisy et
Davis, trois adolescents incroyablement attachants à la personnalité riche et
profonde. Aza est notre narratrice, et le lecteur n’a d’autre choix que de la
suivre dans ses terribles spirales de pensées engendrées par son trouble
anxieux généralisé et par ses troubles obsessionnels compulsifs. Aza a
littéralement peur de tout : « la vie est inquiétante », nous
dit-elle. Je ne peux pas la contredire, la phrase que je répète au moins une
fois par jour étant « la vie est effrayante ». Mais la plus grande
crainte d’Aza, c’est de mourir d’une infection par la bactérie clostridium
difficile. Et sa plus
grande question, c’est de savoir si la notion de « moi » existe
sachant que la moitié des cellules composant notre corps viennent de l’extérieur ?
Il suffit d’un rien pour faire basculer ses pensées « du mauvais côté »,
et à partir de cet instant, plus rien n’existe en dehors de ces pensées, qui
tournent et retournent sans lui laisser le moindre répit, sans jamais se tarir,
devenant toujours plus obsédantes et toujours plus affolantes au fur et à
mesure que la spirale se resserre autour d’elle …
Et cela, John Green l’a merveilleusement bien
écrit, au point que j’envisage de forcer mon père à lire ce roman pour qu’il
cesse de me hurler « mais cesse donc d’être anxieuse ! », s’imaginant
sans doute que je contrôle tout cela et que je choisis volontairement de me
lever à quatre heures du matin pour vérifier compulsivement qu’aucun insecte
bibliophage ne se cache dans mes bibliothèques remplies à ras bord … Et ce qui
est extraordinaire avec John Green, c’est qu’il ne se contente pas de décrire
avec brio l’interminable tsunami de pensées qui assaille Aza, mais également l’incroyable
souffrance qui accompagne tout trouble psychique. La douleur d’être un fardeau,
une inquiétude perpétuelle pour son entourage. La douleur d’être incompris par
le monde entier, y compris par les soi-disant « spécialistes » qui ne
font que sortir des expressions toutes faites du style « ce n’est pas rare ».
La douleur de ne pas être aux commandes de son propre corps, de son propre
cerveau, et d’en avoir conscience. Et puis, il y a le regard d’autrui, de l’inconnu
et de l’ami, regard tantôt compréhensif et bienveillant, tantôt agacé et
méprisant. Il y a les envies et les rêves qui finissent tôt ou tard par être
rattrapés par la réalité de la maladie, par les peurs et les angoisses. Il y a
les moments de désespoir, les instants de détresse que l’on cache à tout le
monde, même à soi-même parfois.
Mais John Green ne s’arrête pas à cette
souffrance, il ne veut pas faire pleurer dans les chaumières. Aza est bien plus
qu’une jeune fille atteinte de troubles psychiques : elle est elle, avant
tout. Et c’est justement ce qu’elle va découvrir au cours de cette improbable
enquête qui se transforme en véritable quête d’identité. Et cette révélation,
elle va naitre d’une rencontre avec un tuatara héritier d’une incommensurable
richesse, de la visite d’une exposition sous-terraine, de l’observation des
étoiles cachées derrière les nuages … Elle va naitre d’une magnifique histoire
d’amour et d’une formidable histoire d’amitié. Ce livre n’est pas déprimant,
bien au contraire, il est incroyablement drôle. John Green a un humour bien à
lui, qu’il distille dans la narration comme dans les dialogues et qui marche à
tous les coups avec moi : je ressors toujours de ses romans avec un grand
sourire et les joues endolories d’avoir tant ri ! Il a un don pour
transformer une histoire finalement atrocement banale, simple tranche de vie de
personnages tout aussi banals, en quelque chose d’incroyablement captivant et
palpitant. Il métamorphose la vie en quelque chose d’incroyable, et il nous
adresse alors un formidable message d’espoir et de joie.
En bref, vous l’aurez bien compris, avec ce
livre, John Green m’a émue aux larmes et m’a fait éclater de rire. Il évoque
avec justesse, tendresse et délicatesse la thématique fort difficile des
maladies psychiques, invisibles mais parfois si handicapantes, en nous
plongeant au cœur même de l’esprit torturé d’une adolescente contrôlée par ses
peurs irrationnelles. Mais il aborde également avec brio la question du sens de
la vie, de la quête de « moi », du deuil et des responsabilités. Et
tout cela sans jamais sombrer dans le pathétique ou le cliché : c’est
émouvant, oui, mais c’est drôle aussi. On ne s’apitoie pas sur le sort d’Aza,
mais on se réjouit avec elle des petites victoires et des petits bonheurs du
quotidien. Avec humour et poésie, comme il le fait si bien, John Green nous
raconte une histoire sans prétention, une histoire si simple mais si profonde,
à la fois bouleversante et réjouissante. Il nous livre une petite partie de lui-même,
et cela rend ce livre d’autant plus poignant … A lire absolument !
Ce livre
a été lu dans le cadre du Tournoi des 3 Sorciers
(plus d’explications
sur cet article)
Je l'ai lu il y a peu et malheureusement, je n'ai pas trop accroché… Mais je suis heureuse de voir qu'il plaît à d'autres personnes, je me rappelle avoir souhaité ça à la fin de ma chronique ^^
RépondreSupprimerJ'ai effectivement remarqué qu'avec ce livre, ça passe ou ça casse ... comme souvent avec John Green visiblement ! Personnellement, je suis vraiment sensible à sa plume, et il a le chic pour évoquer des thématiques qui me touche d'une façon ou d'une autre, donc ça passe très bien, mais je peux comprendre que ça ne plaise pas à tout le monde :)
SupprimerToujours pas lu John Green, mais ta chro m'a donné le goût de le découvrir pour Glace et fudge avec ce titre. J'essaierai de le caser d'ici la fin de l'année :)
RépondreSupprimerYes ! Enfin une chronique qui réussit à me donner envie de lire ce roman ! Parce que ça fait un moment qu'il doit s'ennuyer dans ma PAL mais je n'ai jamais osé le lire. J'ai peur qu'il ne me plaise pas et je ne sais pas du tout à quoi m'attendre... :/
RépondreSupprimer