Editeur : Gulf Stream
Collection : Electrogène - Dystopie
Nombre
de pages : 320
Résumé : Alta. Une cité où les femmes sont soumises
à l'autorité des fils-du-soleil. Gia, comme toutes les sang-de-lune, doit
docilement se plier aux règles édictées par le conseil des Sept, sous peine de
réclusion, ou pire, de mort. Impossible d'échapper au joug de cette société où
règne la terreur. Pourtant, le jour où sa petite sœur Arienn découvre la carte
d'un monde inconnu, les deux jeunes filles se prennent à rêver à une possible
liberté.
Un grand merci à lecteurs.com pour l’envoi de ce roman dans le cadre de l’opération
Explobooks.
- Un petit extrait -
« A force de ployer sous le joug des traditions et des lois, les gens oublient qu'ils sont humains. L'insupportable devient pour eux une norme. Et certains, comme notre génitrice, se prévalent d'en être les garants. »
- Mon avis sur le livre -
Gulf Stream + collection Electrogène +
dystopie, ce roman avait absolument tout pour me plaire, et c’est sans aucune
appréhension que je me suis lancée dans cet ouvrage à peine ma précédente
lecture terminée. Déjà, je tiens à préciser que l’objet-livre est
particulièrement magnifique : non seulement l’illustration est superbe –
avec ce bleu symbole de vérité qui correspond parfaitement à l’intrigue – mais
en plus, comme tous les romans de cette collection, la tranche est de couleur –
ici le brun, couleur de la terre au sein de laquelle se cache la cité d’Alta.
En allant un peu plus loin dans la symbolique des couleurs, ce contraste
marron-bleu annonce déjà une part de l’intrigue : du tréfonds de la terre,
on cherche l’envol dans le ciel …
Gia, comme toutes les sang-de-lune d’Alta,
doit se méfier des ténèbres qui grondent en elle. C’est là une des premières
choses qu’on apprend aux filles de cette cité : le mal se cache au
plus profond d’elles, et pour le chasser, il faut suivre les règles avec
humilité et ferveur. Et suivre les règles, à Alta, c’est obéir aux hommes, les
fils-du-soleil, les servir, rester à sa place. Le moindre écart est violemment
sanctionné, par la réclusion dans un couvent lunaire ou par la mort. Durant
toute son enfance et son adolescence, Gia supporte cette existence sans
broncher, sans exprimer les doutes qui grandissent en elle, sans s’attarder sur
cette culpabilité ancienne qui la ronge un peu plus chaque nuit sous la forme
de cauchemars atroces. Mais quand sa petite sœur, rebelle dans l’âme, trouve un
plan, Gia s’autorise enfin à rêver d’une liberté inespérée …
Alors déjà, je dois bien avouer être
parfaitement et totalement époustouflée par le talent de l’auteur : en l’espace
de quelques pages, quelques phrases, quelques mots même, elle parvient à nous
mettre dans l’ambiance si particulièrement qui règne à Alta. En quelques
lignes, on comprend quelle est la situation des femmes dans cette société,
quelle est l’attitude de Gia à l’égard de cette hiérarchie dictée par la
religion. On sent également l’amour qui lie cette jeune fille à sa petite sœur,
Arienn, qui porte depuis toujours la révolte en son cœur et pour qui Gia se
fait tellement de soucis, de crainte de la perdre. Très rapidement, on saisit
toute la complexité du caractère de Gia : à la fois passive, endoctrinée
depuis toujours, et survoltée par la vie servile qui l’attend. C’est par amour
pour sa sœur puis, plus tard, pour une connaissance retrouvée, que Gia va
trouver le courage de se libérer de ses chaines pour oser, enfin, être
pleinement elle-même.
Autre point vraiment stupéfiant : le
rythme. Il est, à mes yeux, parfait : ni trop rapide, ni trop lent.
Suffisamment rapide pour ne pas s’ennuyer, suffisamment lent pour ne pas se
sentir dépassé par les événements. Il se passe, finalement, énormément de
choses au cours de ses trois-cent pages, mais jamais on a le sentiment que cela
va trop vite, que l’action est survolée … L’intrigue est bien menée, tout
simplement, avec une vraie gestion de la tension dramatique, avec des scènes d’action
entrecoupées de moments plus calmes, tournés vers l’émotion ou l’interaction.
Les dialogues sont vivants, rythmés, percutants : ils ne sont pas là pour
combler un vide, mais bien pour servir l’intrigue. De la même façon, les
introspections de Gia sont bien amenées, elles nous aident à comprendre sa
personnalité, mais également le monde qui l’entoure, son passé, ses espoirs,
ses craintes, ses préoccupations.
A travers ses yeux, on rencontre d’autres
personnages tout aussi authentiques, tout aussi attachants pour certains, plus
antipathiques pour d’autres, mais toujours essentiels. Ici, Gia ne mène pas son
combat seule, mais accompagnée : elle n’est pas celle qui mène l’action,
elle l’accompagne. Gia aide autant qu’elle est soutenue, elle donne autant qu’elle
reçoit de quelqu’un d’autre. Gia est le maillon d’une chaine, à la fois
essentiel et insignifiant : c’est la cohésion des maillons qui forme la
chaine, pas la présence d’un maillon seul. Et au bout du chemin, au bout du
tunnel, se trouve l’objectif ultime qui fait battre à l’unisson tous les cœurs :
la liberté, mais aussi l’égalité. La vérité sur laquelle on pourrait creuser
les fondations d’une société nouvelle, plus juste, moins oppressante. Une
société où la peur ne guiderait pas les pas des uns et la haine ceux des
autres. Une société unie, guidée par la lumière du soleil et non par les
ténèbres d’une mythologie ancienne.
Ode à la liberté et à l’égalité homme-femme,
hymne à l’amour fraternel et à l’amitié, Sang-de-lune est surtout une dystopie où l’action se
mêle habilement à l’émotion, un roman à la narration soignée et aux personnages
étudiés, en bref, une histoire dont on ne sort pas indemne. C’est à la fois
beau et cruel, doux et violent, lumineux comme l’espoir et sombre comme l’oppression.
On suit les aventures d’une jeune fille clouée au sol par les traditions
ancestrales, mais dont le cœur est celui d’un oiseau : aspirant à étendre
ses ailes pour prendre son envol vers la liberté.
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