Editeur : L’école des loisirs
Collection : Medium
Nombre
de pages : 250
Résumé : Qu’est-ce qu’on va faire de toi ? Cette
question, tout le monde se la pose à propos de Robin. Il vient d’être exclu du
collège. Sa mère ne veut plus s’occuper de lui. Son père, pris entre son
travail à l’imprimerie et sa nouvelle histoire d’amour, n’a pas beaucoup de
temps à lui consacrer. Robin doit attendre le mois de septembre maintenant pour
envisager une formation. Et c’est loin, septembre. D’ici la prochaine rentrée,
Robin doit trouver à s’occuper.
- Un petit extrait -
« Ma mère et moi avons été heureux ensemble jusqu'à ce que j'aie dix ans. Entre nous deux l'amour coulait de source. Après ça a été plus difficile, je ne sais pas pourquoi. Quand j'ai grandi, elle m'a moins aimé. Elle a dit de plus en plus souvent que je tournais mal. C'est plus facile de dire que les enfants tournent mal. D'ailleurs, c'est peut-être vrai. Quand on les aime moins, les enfants tournent mal. »
- Mon avis sur le livre -
Après deux ans d’abonnement à l’Ecole des
Max, il serait peut-être plus que temps que je me plonge enfin dans la lecture
des différents romans reçus au fil des mois ! D’autant plus qu’à chaque
fois, je suis toute excitée lorsqu’ils arrivent dans la boite aux lettres :
je m’extasie devant les couvertures (vraiment, l’Ecole des loisirs a le chic
pour trouver des photographies absolument magnifiques : ces couleurs, ces
ambiances … je fonds !) et devant les titres (toujours si poétiques), je
sautille de joie devant les résumés qui promettent toujours des histoires
riches et émouvantes … Et puis, mon regard se pose sur la pile des services de
presse, et je me rappelle que j’ai des engagements à tenir, et je remets à plus
tard la lecture de ces ouvrages. Maintenant que j’ai retrouvé un bon rythme de
lecture et suis ainsi parvenue à prendre suffisamment d’avance dans le
traitement des services de presse, je peux enfin m’autoriser à piocher dans ces
livres !
Robin vient d’être viré du collège et expulsé
de l’appartement maternel, le tout en l’espace d’une journée : c’est son
père, qui va désormais le prendre chez lui, qui lui a annoncé. Plus le temps
passe, plus il a le sentiment que son prénom n’est plus Robin mais « Qu’est-ce
qu’on va faire de toi ? », tant cette interrogation soupirée fuse
autour de lui. Robin ne sait pas qui est ce « on », mais surtout, il
ne sait pas trop ce qu’il va faire de lui-même. L’avenir, c’est tellement loin :
ne pourrait-on pas le laisser d’abord vivre son présent avant de penser au
futur ? Robin n’a pas envie de penser orientation professionnelle, n’a
plus envie de passer ses journées enfermé entre quatre murs à ingurgiter des
informations qui ne lui sont et seront jamais d’aucune utilité. Robin aimerait
qu’on s’intéresse au lui-présent et non pas au lui-à venir qui n’existe que
dans l’imagination des adultes …
En ouvrant ce livre, je ne savais pas trop à
quoi m’attendre … mais assurément pas à ça. Je me suis retrouvée face à un
ouvrage qui se rapproche plus du documentaire que du roman : l’idée n’est
pas de raconter une histoire mais bien de figer sur le papier une tranche de
vie. Tandis que défilaient les pages, tandis que s’écoulaient les chapitres, c’est
un film qui se joue devant nos yeux : un film aux plans fixes et larges,
un film sans musique, un film « sans histoire, sans sujet, sans héros,
sans début ni fin » mais tellement passionnant par sa sobriété même. On marche
aux côtés de Robin, de cet adolescent complétement perdu, livré à lui-même au
milieu de ce monde cruel qui est le nôtre : un monde qui s’acharne à
briser tous les rêves de l’enfance, un monde dans lequel il faut rentrer dans
le moule sans poser de questions, un monde où la solitude est omniprésente
malgré l’essor des réseaux sociaux, un monde qui veut tout rationaliser … alors
que la vie est tout sauf rationnelle, la vie est une multitude de petits
instants mis bout à bout. La vie, c’est le soleil qui se lève ou les insectes
nocturnes qui chantent, c’est le sourire d’une maman et le ronronnement d’un
chat. La vie, comme ce livre, est fait de petit rien qui forme un tout.
Il m’est extrêmement difficile de parler de
ce livre, de vous extraire les grandes thématiques et les grandes questions qu’il
fait naitre comme je le fais d’ordinaire : c’est en effet un livre qui se
vit plus qu’il ne se lit, un livre qui ne se raconte pas. Alors bien sûr, je
peux vous affirmer que ce livre évoque l’inégalité sociale, la transgression
des interdits, les relations parentales, le harcèlement scolaire … Mais cela ne
fait pas honneur à ce roman qui est bien plus qu’une simple accumulation de thèmes.
Ce que je peux vous dire, c’est que c’est un roman lumineux, un roman plein d’espoir,
un roman qui fait du bien. C’est un roman plein de surprises, j’ai
particulièrement apprécié la présence de « Jujube », ce petit garçon
un peu étrange mais finalement tellement lucide, ce petit garçon qui transforme
la musique en arc-en-ciel … mais ce que j’ai surtout aimé, c’est que
finalement, à son sujet, il n’est jamais question d’autisme : Jujube est
Jujube, tout comme Robin est Robin. Dans ce livre, les personnages ne sont pas
enfermés dans une case … et ça fait plaisir à voir, dans cette société où tout
est catégorisé, et où tout ce qui ne correspond pas aux étiquettes pré-écrites
est rejeté …
En bref, je pense qu’il est inutile de s’acharner
pour agrandir artificiellement cette chronique : tout ce que vous devez
retenir, c’est que ce roman est d’une beauté, d’une puissance rare, par sa simplicité
même, par sa justesse, par sa douceur. En l’espace de quelques centaines de
pages, l’auteur dépeint l’adolescence, pas l’adolescence rebelle mais l’adolescence
fragile : lorsque l’on n’est plus tout à fait un enfant mais pas encore un
adulte, lorsque l’on ne peut plus se réfugier dans l’insouciance mais que l’on
n’a pas encore acquis la maturité attendue d’un adulte, comment faire pour
satisfaire les nombreuses attentes qui pèsent sur nous ? lorsque l’on ne
sait plus vraiment qui on est, comment se projeter dans l’avenir ? lorsque
la vie n’a plus de sens, comment la remettre à l’endroit ? « Ici
personne ne me demande ce que je vais devenir, peut-être parce qu’il est
évident que c’est ce que je suis en train de faire. Devenir », voilà ce qu’affirme
Robin à la fin de cet ouvrage : et si l’on méditait un peu là-dessus ?
Ce livre
a été lu dans le cadre de la Coupe des 4 maisons
(plus
d’explications sur cet article)