Editeur : Albin Michel
Collection : Terres d’Amériques
Nombre
de pages : 339
Résumé : Short Creek, Arizona, 1974. Loretta, quinze
ans, vit au sein d’une communauté de mormons fondamentalistes et polygames. Le
jour, elle se plie à l’austérité des siens, la nuit, elle fait le mur et
retrouve son petit ami. Pour mettre un terme à ses escapades nocturnes, ses
parents la marient de force à Dean Harder, qui a trente ans de plus qu’elle,
une première femme et déjà sept enfants …
Un grand merci aux éditions Albin
Michel pour l’envoi de ce volume et à la plateforme Babelio pour avoir rendu ce
partenariat possible.
- Un petit extrait -
« Loretta se tourne et file vers la maison. Où veut-elle aller ? Lorsqu'elle pense à son avenir, elle imagine toutes sortes d'expériences et de libertés, s'achète toutes sortes de vêtements neufs, dévore des sucreries et du bœuf à longueur de journée, conduit une voiture rose et porte du rouge à lèvres Tussy. Mais où se trouve-t-il ? A quel endroit ? »
- Mon avis sur le livre -
Il semblerait que la plupart des lecteurs
aient été attirés par l’aspect « road-trip » de ce roman. Pour ma
part, c’est plutôt la consonance « religieuse » qui m’a poussée à
accepter la proposition de Babelio : le résumé promettait une véritable
immersion au cœur d’une communauté mormone intégriste et rigoriste, et je
voyais là un bon moyen pour en apprendre un peu plus sur ce mouvement
religieux, né du christianisme mais séparé de ce dernier. Mon objectif était
donc, en premier lieu, de mieux comprendre l’origine du schisme théologique
entre l’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours et le
catholicisme, mais également de mieux saisir les différentes « formes »
de ce courant religieux, car l’Eglise mormone est loin d’être unie et
uniforme : elle est elle-même divisée en plusieurs branches, plus ou moins
strictes et austères, et les divergences doctrinales elles-mêmes sont
nombreuses.
Fin des années 70. Loretta, quinze ans, ne
supporte plus son quotidien austère, fait de prières et d’étude des Saintes
Ecritures, faite de silence et de restrictions. Alors, chaque nuit, elle se
glisse hors de son lit, hors de chez elle, hors de cette communauté engluée
dans les traditions et les interdits, pour rejoindre Bradshaw, son petit ami.
L’espace de quelques heures, Loretta se glisse dans la peau d’une
« gentille », d’une non-mormone, avant de se replonger dans
l’immuabilité de son existence. Mais lorsque ses parents découvrent ses
escapades nocturnes, ils craignent pour son âme, pour leur âme, et décident de
la marier à Dean. Dean, qui dirige les Récoltes de Sion, Dean, qui a déjà une
femme et sept enfants. Selon le Principe, celui du mariage plural, Loretta est
désormais une « épouse-sœur », membre de cette famille céleste
appelée à s’élever ensemble vers le salut. Loretta étouffe, mais ses rêves ne
sont que cela : des chimères qui tournent et retournent dans son esprit
sans qu’elle ne sache comment les faire basculer dans la réalité …
La première partie de ce roman,
indéniablement la meilleure à mes yeux, nous offre donc une véritable plongée
dans le morne quotidien de Loretta qui peine à s’adapter à son nouveau statut
d’épouse-sœur au sein de cette communauté mormone fondamentaliste et polygame. Loretta
n’a pas choisi cette existence, elle la subit, elle la hait. Mais pourtant,
c’est la seule vie qu’elle connait. Il y a vraiment une dualité profonde dans
le cœur de la Loretta de la première moitié du récit : d’un côté, elle
rêve de s’enfuir, elle rêve de liberté, elle rêve d’une vie
« normale », mais de l’autre, elle a peur de l’inconnu, peur de
quitter tout ce qu’elle connait depuis toujours. Alors, Loretta accepte tout,
sans se rebeller, sans se révolter, elle accepte tout, elle suit le chemin
qu’on a tracé devant elle. Et elle s’enlise dans ce nouveau quotidien, aussi
monotone, aussi pénible que celui qu’elle avait chez ses parents, avec la
nouvelle obligation de « porter une glorieuse semence jusqu’au
Seigneur » … Il ne se passe pas grand-chose d’exceptionnel dans les
deux-cents premières pages, le rythme est trainant, languissant, pesant. Et
cela correspond tout à fait à l’ambiance, à l’atmosphère, de ce roman :
c’est oppressant, dérangeant. Mais clairement, cette partie est sans le moindre
doute la plus intéressante, la plus instructive.
En effet, à partir du moment où Loretta
rencontre Jason, le neveu de Dean, suite au décès du père de ce dernier, tout
s’effondre. Déjà, les chapitres consacrés aux « discours » d’Evel
Knievel, un motard cascadeur, faisaient tâches, s’incrustaient dans l’histoire
sans avoir aucun lien avec elle et sans rien lui apporter. Mais alors, ce
n’était rien comparé à ce que nous offre la dernière partie du roman ! Ça
part dans tous les sens et n’a donc plus aucun sens. L’auteur voulait nous
proposer une « ode à la liberté », un road-trip
« mémorable » … Pourquoi pas, mais encore faudrait-il que cela soit
cohérent avec le reste du roman. En l’espace de quelques pages, la personnalité
même des personnages change du tout au tout, sans raison apparente, et ça ôte
toute crédibilité au récit. Ce road-trip est invraisemblable, artificiel,
illogique, irrationnel, aberrant. Il n’avait rien à faire, du moins sous cette
forme, dans cette histoire. Quelle déception ! Je n’ai ressenti aucun
intérêt pour cette seconde partie, je l’ai lu uniquement pour savoir le fin mot
de l’histoire, parce que je n’aime pas abandonner une lecture, mais c’était
plus par devoir que par envie. C’est tellement dommage, ce tournant pris par
l’histoire, car tout était si intéressant jusqu’alors !
En bref, une lecture plus que mitigée. Après
un début prometteur, captivant, porté par une plume extraordinaire, d’une force
incroyable, qui vous prend aux tripes et vous transporte au cœur des Amériques
des années 70, l’histoire prend une direction bien moins profonde, caractérisée
par une bonne dose d’incohérence et d’invraisemblance. J’ai donc bien du mal à
savoir si j’ai aimé ce roman ou non : le déséquilibre entre les deux
parties, ainsi que l’insertion régulière de chapitres dédiés à un motard qui n’apporte
rien à l’histoire, me laisse plus que perplexe. Ce n’est pas une déception
totale, loin de là, j’ai vraiment terriblement apprécié la première partie,
mais c’est clairement une promesse qui n’a pas été tenue, et c’est quelque
chose qui a tendance à me frustrer légèrement. A conseiller donc à ceux que les
changements brusques et aberrantes de personnalités ne dérangent pas, et qui
aiment les road-trip improbables et invraisemblables … A noter toutefois :
de magnifiques descriptions de paysages qui vous feront rêver et voyager !
Ce livre
a été lu dans le cadre de la Coupe des 4 maisons
(plus
d’explications sur cet article)
Je serais vraiment très curieuse de lire ce livre après tous les avis négatifs que j'ai pu lire dessus. Peut-être que je me laisserai tenter malgré tout!
RépondreSupprimerIl est pas si mal que cela ... mais disons qu'il ne tient à mes yeux pas ses promesses. N'hésite pas à venir me dire ce que tu en penses si tu le lis !
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