Le coq et l’enfant
Editeur : Lynks
Nombre
de pages : 283
Résumé : Matéo Soler sait que les fantômes existent.
Il le sait parce que sa mère en a aidé des dizaines à trouver le repos, jusqu'à
ce qu'elle-même meure, des années auparavant. Ce que le jeune garçon ne pouvait
pas deviner, par contre, c'est qu'il hériterait de son pouvoir. Devenu
Passageur à son tour, le voilà contraint de lutter contre un trushal odji, une
âme affamée. Pour s'en libérer, Matéo n'a d'autre choix que de rejoindre l'âme
dans son époque d'origine afin d'y apaiser sa mort. Mais alors qu'il est
propulsé au temps de la Commune et au milieu des horreurs de la semaine
sanglante, il comprend que sa tâche ne sera pas si facile...
Un grand merci aux éditions
Lynks pour l’envoi de ce volume et à la plateforme SimPlement pour avoir rendu
ce partenariat possible.
- Un petit extrait -
« La Dévoreuse se tient au centre du tourbillon. Ce ne sont plus des pleurs, ce sont des cris, des morceaux d’âmes que l’on arrache et qui produisent ce son. Dressée au milieu des ombres, la silhouette est un spasme de lumière qui se contorsionne dans le courant, comme si on le torturait. Je lutte comme un forcené pour l’atteindre et soudain je crève la bulle. Au centre du cyclone, le courant se meurt et disparaît pour rugir à l’extérieur de nous. La Dévoreuse est à deux pas de moi, et cette fois-ci, je la vois. »
- Mon avis sur le livre -
J’ai toujours été fascinée par l’objet-livre.
Lorsque j’étais toute petite déjà, avant même de savoir lire, parait-il, j’emmenais
un livre avec moi dans mon lit pour faire la sieste. Je pouvais passer des
heures à tourner les pages d’un dictionnaire pour le simple plaisir de sentir
le grain du papier sous mes doigts, de sentir l’odeur de l’encre voler autour
de moi. Je n’ai pas changé. Aujourd’hui encore, je passe la majeure partie de
mon temps avec un livre sur les genoux, même lorsque je ne lis pas, parce que j’aime
faire défiler sous mes doigts les pages, parce que j’aime passer ma main sur la
couverture … Je pense que Le Passageur va devenir mon compagnon préféré : j’adore la texture de cette
couverture cartonnée, j’adore la dorure du titre qui danse en fonction de la
lumière … Et que dire de cette illustration, certes un peu effrayante, mais
vraiment jolie et qui reflète à merveille l’ambiance qui règne dans le récit ?
Ce livre est tout simplement magnifique, je pense bien lui trouver une place de
choix dans la future bibliothèque !
Matéo a seize ans. Exclu par ses camarades de
classe parce qu’il appartient à la communauté Sintis, rejeté par les siens car
sa famille s’est sédentarisée, haï par son père qui le tient pour responsable
de la mort de sa sœur et de sa mère, le jeune homme peine à trouver sa place dans
ce monde. Et comme s’il n’avait pas assez de soucis comme cela, voici qu’il
hérite du don - ou plutôt de la malédiction - de sa mère : le voici devenu
Passageur, chargé d’apaiser les âmes dévoreuses afin qu’elles acceptent enfin de
quitter cette terre … Le soucis, c’est qu’il ne sait pas comment il est censé s’y
prendre, et que personne ne semble pouvoir l’aider … Hormis peut-être ce
fantôme qui l’accompagne sans cesse, cette petite fille qui le guide et l’exhorte
à accepter le pouvoir qui est désormais le sien, contre toutes attentes.
Propulsé dans le passé, au temps de la Commune, tandis que Paris se dresse
contre Paris, que les flammes dévorent la ville et que les cadavres s’empilent
dans les rues, Matéo va faire tout son possible pour aider une âme qui pleure à
trouver le repos.
Ce roman, c’est avant tout l’histoire d’un
adolescent rongé par la culpabilité, une culpabilité que son père s’acharne à
raviver jour après jour, semaine après semaine, en lui crachant sans cesse à la
figure qu’il aurait dû mourir avec sa sœur et sa mère, voire même à leur place,
lui qui a amené la maladie dans la famille. C’est un adolescent qui subit
également la haine de ses camarades de classe, de ses professeurs, de la
société toute entière, à cause de ses origines. Parfois ignoré, souvent insulté,
régulièrement harcelé, Matéo est victime des préjugés et des aprioris. On s’attache
facilement à ce jeune homme sensible, qui n’a pas eu une vie bien facile et qui
se retrouve soudainement investi d’un rôle aussi important qu’effrayant :
guider les âmes affamées à trouver le repos … sans perdre la raison au passage.
Et sans être soutenu par les siens, qui le considèrent comme un menteur :
seules les femmes sont Passageuses. Seuls son frère ainé et sa sœur cadette le
croient, mais que peuvent-ils faire pour lui ? Lorsqu’il se retrouve
propulsé en pleine période insurrectionnelle dans un Paris à feu et à sang, il
est seul …
Ce roman, c’est un véritablement page-turner.
L’auteur écrit magnifiquement bien, on entre dans le récit sans vraiment s’en
rendre compte, on se laisse entrainer par cette narration si vivante, on se
laisse porter par cette plume si délicate et poétique … On ressort de ce livre
comme on ressort d’un rêve, sans savoir si ce qu’on vient de vivre par
procuration est vrai ou non. Pour Matéo comme pour sa famille, cela ne fait
aucun doute : les fantômes existent, et il faut les guider pour qu’ils
acceptent de quitter véritablement ce monde. C’est une évidence, et le lecteur
finit par intégrer cette évidence et oublier qu’il s’agit d’une simple fiction.
Et c’est toute la force de ce récit : embarquer le lecteur dans cette
réalité parallèle que l’auteur a inventé. Plus encore, l’auteur a réussi le
tour de force de faire ceci très simplement, très sobrement, sans s’encombrer d’explications
interminables : la belle place est donnée à l’intrigue, et non aux longs
exposés.
Et quelle intrigue, saperlipopette, quelle
intrigue ! Pleine d’action et de tension, oui, mais également pleine d’émotion :
et c’est ce bel équilibre qui rend ce livre si extraordinaire. Matéo ne chasse
pas les fantômes. Matéo les aide, les apaise. Et pour cela, il doit d’abord accepter
ce qu’il est, son passé, son avenir … c’est un livre bien plus profond qu’il n’en
a l’air, car il évoque finalement à demi-mots les grands questionnements de l’adolescence
sur le sens de la vie, sur la difficulté à faire face à son identité profonde,
sur les relations familiales qui peuvent être aussi bénéfiques que toxiques …
Les âmes que Matéo doit aider ne parviennent pas à accepter qu’elles sont
mortes car elles ont le sentiment de ne pas avoir terminé ce qu’elles devaient
faire. Matéo, lui, n’arrive pas à accepter qu’il a survécu là où sa mère et sa sœur
sont mortes … Il va lui falloir se débarrasser du poids de la culpabilité s’il veut
accomplir sa tâche de Passageur. Tâche bien périlleuse, d’autant plus lorsque
sa course contre la montre l’oblige à voyager dans le temps et qu’il se
retrouve propulsé dans un Paris en pleine guerre civile ! On a peur pour
Matéo, du coup on dévore chapitre après chapitre en croisant les doigts pour qu’il
s’en sorte … Et quand on tourne la dernière page, on souffle de soulagement,
puis on commence à trépigner d’impatience en attendant la suite …
En bref, vous l’aurez bien compris, c’est un
vrai coup de cœur pour ce premier tome ! Je suis vraiment tombée
amoureuse de ce livre à l’ambiance si particulière, à la narration si riche et
si belle … C’est un livre particulièrement bouleversant, un livre qui évoque
avec douceur tellement de thématiques difficiles, un livre qui cache tellement
de beaux messages. Et à côté, c’est un livre tellement palpitant, avec une
intrigue au rythme effréné, un compte un rebours à l’issue effrayante. Et voilà
que l’auteur décide de situer le voyage dans le temps de Matéo dans une époque
très intéressante mais finalement fort méconnue de l’histoire française, mais c’est
tout simplement merveilleux, cela ! Mon seul regret, finalement, c’est que
la suite ne soit pas encore sortie : même si l’histoire se suffit amplement
à elle-même, j’ai vraiment envie de retrouver Matéo, je me suis vraiment
attachée à lui et à sa petite famille ! Que j’ai hâte d’avoir le tome deux
sous la main, que j’ai hâte !
Ce livre
a été lu dans le cadre de la Coupe des 4 maisons
(plus
d’explications sur cet article)
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