Editeur : Autoédition
Nombre de pages : 231
Résumé : Dans un futur proche, la population est passée du statut d'insouciance à celui d'inquiétude, pour enfin vivre dans la résignation : la planète est trop endommagée, le désastre climatique est en cours, la fin de notre civilisation approche. Casey se retrouve contacté par un homme qui prétend connaître la date exacte de la fin du monde, et qui parle d'un programme lancé pour permettre à notre civilisation d'y survivre. Un monde virtuel dans lequel seront copiées les personnalités de tous les plus grands scientifiques et artistes vivants, et duquel ils pourront sortir lorsque la planète sera à nouveau habitable. N'ayant rien à perdre, il accepte. Peu après, il tombe amoureux d'Eve ...
Un grand merci à Guy-Roger Duvert pour l’envoi de ce volume et à la plateforme SimPlement pour avoir rendu ce partenariat possible.
« - Qui décide qui a le droit ou non à sa place dans cette Arche de Noé ?
- Un comité restreint a été formé dans ce but. C'est une tâche difficile.
- Ça revient un peu à se prendre pour Dieu, non ? Choisir qui vit et qui meurt...
- Honnêtement, je ne voudrais pas être à leur place. Lorsque vous sélectionnez une personne, il est difficile de ne pas penser aux millions que vous laissez de côté. »
Si Guy-Roger Duvert continue dans cette lancée, il va vraiment falloir que je songe à lui réserver une étagère complète dans ma future bibliothèque : déjà cinq livres sortis en à peine trois ans, et deux autres sont d’ores et déjà prévus d’ici la fin de l’année 2021 ! On ne l’arrête décidemment plus ! Et contrairement à ce que certaines mauvaises langues pourraient assurément persifler en observant ce rythme de sortie et en constatant que c’est toujours de la science-fiction, il nous offre toujours la même qualité littéraire, et toujours quelque chose de nouveau à se mettre sous la dent ! C’est d’ailleurs pour cette raison que je me jette aveuglément dessus, souvent même sans avoir lu le résumé : il fait indiscutablement parti de ces auteurs dont je compte bien posséder toute la bibliographie, car ses histoires me font invariablement vibrer, trembler et pleurer, car j’apprécie énormément sa plume, très caractéristique, et car je trouve que ses visions du futur sont très justes, très réfléchies. Car la science-fiction, c’est aussi ça : dépeindre au lecteur divers avenirs possibles, pas forcément bien reluisant, mais rarement parfaitement sombre, car au cœur de la nature humaine, il reste toujours une petite étincelle de lumière.
Le monde est foutu, définitivement condamné : dans ce futur pas si lointain, cette terrible perspective est clairement établie, bien ancrée dans tous les esprits. Et alors, le fatalisme a remplacé l’insouciance et l’inquiétude des années 1970 à 2020. Puisqu’il n’y a plus rien à faire pour sauver cette planète, autant profiter pleinement de l’existence, en dépit des catastrophes naturelles toujours plus fréquentes et meurtrières et de cette fin du monde qui approche sans que quiconque sache exactement quand et comment elle aura lieu. Enfin, c’est ce que pense le grand public. Casey, compositeur de musiques de films ou de mondes virtuels, va découvrir que ce n’est pas tout à fait vrai : le voici contacté par une mystérieuse firme, qui affirme connaitre avec précision la date de la fin du monde et lui propose une place dans un programme de réalité virtuelle destiné à « sauvegarder » les esprits des plus grands scientifiques, penseurs et artistes de ce monde, afin de les réimplanter dans un corps cloné lorsque la Terre sera à nouveau habitable. N’ayant pas encore pu réaliser « l’œuvre de sa vie », il accepte : voici qu’un double numérique habite désormais dans un monde numérique, tandis qu’il sait que son « vrai lui » sera soufflé par l’apocalypse dans quelques mois. Mais voilà, il rencontre Eve, et il ne peut supporter l’idée qu’il « survivra » et pas elle …
Comme toujours, Guy-Roger Duvert nous présente un futur tout à fait possible, probable, et tout à fait glaçant, effrayant. L’inaction de l’homme, prompt à faire de grands discours pour se donner bonne conscience (« oh, la pollution, c’est vraiment terrible, nous devons tous faire notre possible pour protéger la planète ! ») mais réfractaire au moindre petit effort (« arrêter d’acheter le dernier jean à la mode, arrêter de prendre l’avion pour barboter sur une plage à l’autre bout du monde ? hors de question ! quoi, la pollution ? bah, c’est pas moi qui peut y changer quelque chose, autant continuer à profiter de la vie ! »), a précipité l’inexorable, l’inévitable. Le monde touche à sa fin : les catastrophes naturelles se multiplient et s’amplifient. La montée des eaux et les tsunamis ravagent tous les littoraux, les ouragans et les incendies dévastent l’intérieur des terres. Les réfugiés climatiques sont de plus en plus nombreux, et ces mouvements de population entrainèrent toujours plus de conflits armés. Mais après la panique et la colère (car bien sûr, c’est toujours la faute de l’autre, jamais la sienne), le reliquat d’humanité est retournée à ses vieilles habitudes : vu qu’il n’y a plus rien à faire, satisfaisons nos petits désirs égoïstes et continuons à faire comme si de rien n’était, comme si des milliards de personnes n’étaient pas mortes à cause de ce comportement égocentré et je-m’en-foutiste.
Mais bien sûr, l’auteur ne s’arrête pas à ce « seul » constat : décrire un futur apocalyptique, cela ne suffit pas. Car si la majorité semble s’être résignée à cette fin du monde plus ou moins imminente, d’autres sont bien décidés à y survivre. Par tous les moyens possibles. Il y a ceux qui ne jurent que par la conquête spatiale et qui investissent dans des vaisseaux destinés à embarquer une partie de la population sur Mars ou ailleurs (ce qui nous ramène à Oustphere, d’une certaine manière), il y a ceux qui décident de fabriquer des immenses bunkers sous-marins dans lesquels une partie de la population sera préservée … et il y a ceux qui misent sur le sacro-saint numérique. Imaginez qu’il soit possible de « télécharger » toutes les données contenues dans votre esprit, votre personnalité, vos souvenirs (ce que nous retrouvons dans Backup d’une façon quelque peu différente), pour les insérer dans un programme de réalité virtuelle (un peu comme ceux de Virtual Revolution 2046) jusqu’au jour où la planète sera à nouveau habitable par des clones dans lesquels on retransférera les données. Il « suffit » d’installer les serveurs dans un lieu parfaitement sécurisé, avec un apport suffisant en électricité, et cette « vie numérique » peut durer littéralement des siècles ! Mais hors de question de « sauvegarder » n’importe qui : ces esprits vont être « confinés » ensemble pendant tellement longtemps qu’il faut s’assurer à la fois de leur « utilité » pour la reconstruction de l’humanité et de leur équilibre psychologique pour être certain que la « cohabitation virtuelle » se passera bien …
Et voilà que Casey, composition de génie, est sélectionné pour rejoindre le programme. Jusque-là, tout va bien, même si, tout comme lui, nous nous interrogeons sur la moralité de cette sélection : quel homme peut décider de qui « mérite » d’être sauvé et de qui doit mourir ? Une vie vaut-elle plus qu’une autre ? Visiblement, il suffit d’être un intellectuel pour être jugé « digne » d’être préservé de la mort, alors que le petit agriculteur du coin, qui s’échine pourtant à nourrir une humanité fort peu reconnaissante, est considéré comme un « moins que rien » qui ne mérite pas sa place dans ce paradis virtuel, dans cette « future » humanité … C’est d’autant plus terrible qu’on sait parfaitement que, si cela arrivait, c’est exactement comme ça que cela se passerait. Il y a un réalisme incroyable dans ce récit d’anticipation, et ça fait vraiment froid dans le dos. Et à côté de cela, il y a la lumière. Il y a l’amour qui nait entre Casey et Eve : je ne suis pas une grande romantique, mais il y a quelque chose de tellement tragique dans cette histoire d’amour sur fond de fin du monde que j’en ai eu la chair de poule ! Et tandis qu’ils se lancent dans une véritable course contre la montre pour qu’Eve puisse elle aussi intégrer ce programme, nous n’avons qu’une envie : les aider. On tremble vraiment pour eux, et on dévore chaque chapitre avec une inquiétude grandissante, avec le cœur qui s’emballe un peu plus à chaque fois, tandis que la fin approche beaucoup trop rapidement …
En bref, je pense qu’il est inutile de continuer, vous l’aurez bien compris : une fois encore, Guy-Roger Duvert a réussi à me captiver du début à la fin avec ce page-turner où se côtoient allégrement actions, émotions et réflexions ! Comme toujours, le décor est rapidement posé, les personnages sont rapidement présentés et les enjeux rapidement exposés : il sait vraiment aller à l’essentiel pour nous plonger le plus vite possible dans l’histoire, sans s’embarrasser d’une contextualisation à rallonge. Et comme toujours, je n’ai absolument rien à reprocher : la plume est toujours aussi incroyablement cinématographique, le rythme est toujours admirablement bien géré … Et comme toujours, derrière cette histoire admirablement palpitante et émouvante, se cachent de nombreuses pistes de réflexion pour le lecteur : l’humanité est loin d’être présentée sous ses meilleures facettes, mais force est de constater que dans notre présent, ce sont déjà ces facettes qui prédominent. Il n’y a qu’à songer au nombre d’étudiants qui considèrent qu’on devrait laisser les vieux mourir du Covid pour laisser les jeunes s’amuser sans aucune contrainte pour se rendre compte que l’égoïsme est bel et bien ancré dans nos mentalités contemporaines … Alors, prêts à embarquer pour la fin du monde avec ce one-shot dynamique et saisissant ?
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