dimanche 25 novembre 2018

Mes nuits à la caravane - Sylvie Deshors


Mes nuits à la caravane, Sylvie Deshors

Editeur : Rouergue
Collection : doado
Nombre de pages : 153
Résumé : Lucile a perdu sa mère adorée il y a quatre ans, et depuis, son père a sombré. Un jour, exaspérée, elle quitte la maison et s’installe dans une caravane, au bout du pré, dans laquelle sa mère aimait se réfugier pour peindre. Avec l’aide de trois copains, elle se construit un refuge, mais mène aussi l’enquête sur les raisons de la faillite du restaurant de ses parents…

Un grand merci à lecteurs.com pour l’envoi de ce roman dans le cadre de l’opération Explobooks.

- Un petit extrait -

« Mais pendant mes promenades nocturnes, je suis le plus souvent heureuse. Au cœur de la nuit, je suis une autre, fille des bois et des taillis. Dans le silence suspendu des animaux inquiets de ma présence, j’avance. Bientôt, les petits mammifères vont reprendre leurs activités. Le chemin de la belette, du renard ou du lièvre croisera le mien, si j’ai de la chance. La lune monte brusquement derrière les feuillus dont certains sont encore nus, puis elle franchit leur cime et rayonne dans le ciel. Comme je n’ai pas cours demain, je me cherche un nid de mousse sec où, le plus silencieusement possible, je m’enroule dans la couette et m’endors sous la caresse de l’air et d’un croissant de lune. »

- Mon avis sur le livre -

Reçu le samedi, lu le dimanche et chroniqué le lundi, ce tout petit livre à la couverture pleine de douceur et de poésie n’a pas fait long feu : aussitôt entré dans la pile à lire, aussitôt sorti, quelle belle vie pour un livre ! Après une lecture fort laborieuse qui m’avait vidée de mon énergie, je sentais que ce roman était ce dont j’avais besoin … Blottie dans mon lit, entourée de ma ménagerie de peluches – je le revendique haut et fort : j’aime les animaux en peluche et ne compte pas m’en séparer ! –, je me suis plongée dans cette histoire qui a illuminée mon après-midi par sa simplicité et son originalité. En moins de deux-cent pages, l’auteur est parvenu à me faire rêver toute éveillée avec cet ouvrage qui a tout du « livre-doudou », à relire à chaque fois que la vie est morne et triste, à chaque fois que l’existence est pesante et lourde …

Depuis la mort de sa mère, quatre ans auparavant, Lucile est seule. Bien sûr, son père est physiquement présent, mais son esprit s’est perdu dans les méandres alcoolisés de sa dépression. Un matin, exaspérée par le comportement de son père, fatiguée de devoir supporter seule le poids du quotidien, la jeune fille décide de s’installer dans la petite caravane au fond du pré, où sa mère venait s’isoler pour peindre et faire réserve de solitude. Petit à petit, ce lieu devient le point de ralliement des jeunes du bourg, qui n’ont nulle part ailleurs pour se retrouver : ce petit hameau du Limousin, comme bien d’autres en France, se meurt à petit feu tandis que les désertions pour la grande ville se multiplient. Lucile elle-même le sait bien : pour poursuivre ses études, pour trouver du travail, il lui faudra quitter Bellac, quitter tous ses amis, tous ses repères … Alors que Lucile hésite à remuer le passé pour comprendre les raisons de la fermeture du restaurant familial, son père semble enfin revenir à la vie …

Ce livre, loin de nous proposer une intrigue palpitante pleine de mystères et de rebondissements, nous conte au contraire une histoire somme toute assez banale, celle d’une adolescente à la croisée des chemins. Quatre ans après la mort de sa mère, Lucile commence à reprendre gout à la vie, mais est bloquée dans son élan de reconstruction par le laisser-aller de son père, qui semble avoir oublié qu’il avait une fille. Alors, Lucile s’échappe pour se retrouver : retranchée dans la caravane de sa mère, la jeune fille réfléchit à son avenir, à sa vie qui ne fait que commencer. Le temps passe, les amitiés enfantines se transforment en amours balbutiants, les après-midi au terrain de jeux laissent place aux soirées festives … et les certitudes deviennent des doutes. Pour pouvoir prendre son envol, Lucile doit tirer un trait sur le passé : elle veut savoir ce qui s’est passé, pourquoi le restaurant de son père a fermé, pourquoi il s’est ainsi laissé submergé par le chagrin au point de ne plus la voir, elle sa fille unique.

Pour Lucile, penser à l’avenir est aussi exaltant qu’angoissant : il va lui falloir quitter ce petit hameau qui l’a vu naitre et grandir, quitter sa belle campagne pour l’immense ville. En effet, même s’ils s’ennuient, même s’ils n’ont qu’une vieille caravane comme lieu de rassemblement, les jeunes de Bellac ne sont pas malheureux de leur sort, et c’est très réjouissant que de montrer que l’adolescence, ce n’est pas uniquement les sorties en ville et les soirées en boite. C’est aussi, tout simplement, une soirée au coin du feu, au son des guitares, à l’orée de la forêt. Quitter ce cocon de verdure est un déchirement pour beaucoup, et certains s’y refusent et choisissent ainsi un métier qui leur permettra d’y rester … Lucile l’exprime à plusieurs reprises : il n’y a que dans la nature qu’elle trouve la paix et l’apaisement, qu’elle trouve le bonheur. Perdue au milieu des bois, couchée à côté de la rivière, la jeune fille se sent bien, tout simplement. Je me suis ainsi sentie très proche de Lucile, puisque tout comme elle, j’ai souvent besoin d’aller m’isoler dans la nature pour retrouver la sérénité et la joie. J’ai d’ailleurs hâte de déménager dans notre futur petit village de 200 habitants perdu au milieu de 1600 hectares de forêt, je me sens étouffer dans ma grosse vallée bien trop peuplée et trop urbanisée pour la petite sauvageonne que je suis !

En bref, c’est bien simple : je suis tombée amoureuse de ce tout petit livre, véritable condensé de douceur qui invite à ouvrir son cœur au bonheur, véritable ode à la nature et à l’amitié, à la musique et à l’avenir … Sylvie Deshors a vraiment une très belle plume, pleine de poésie, elle raconte cette histoire comme on chuchoterai un conte à l’oreille d’un ami. C’est un livre plein de tendresse, de délicatesse, c’est comme une feuille qui virevolte dans les airs avant de se poser doucement au sol, c’est comme un ronronnement de chat. Ça fait du bien. Ça rend heureux. En toute simplicité, l’auteur nous offre une histoire riche en émotions et en enseignements. Pas besoin de faire long, pas besoin de faire compliqué, pour transmettre des messages forts et profonds, pour toucher le lecteur au plus profond de son être …

Ce livre a été lu dans le cadre du Challenge de l’été 2018
(plus d’explications sur cet article)

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