Editeur : Gallimard jeunesse
Nombre
de pages : 312
Résumé : La guerre est imminente. Lorsque le père de
Peter s'engage dans l'armée, il oblige son fils à abandonner Pax, le renard
qu'il a élevé depuis le plus jeune âge et envoie le garçon vivre chez son
grand-père à cinq cent kilomètres de là. Mais Peter s'enfuit à la recherche de
son renard. Pendant ce temps, Pax affronte seul les dangers d'une nature
sauvage et se trouve confronté à ceux de son espèce.
- Un petit extrait -
« - Qu’est-ce que tu veux réellement ? Ton renard, ou ta maison ?- C’est la même chose, dit Peter sans hésiter, même s’il était lui-même surpris de cette réponse. »
- Mon avis sur le livre -
Quelques secondes. C’est le temps qu’il m’a
fallu pour décider d’acheter ce livre à partir du moment où je l’ai aperçu dans
les rayonnages. Je n’ai pas eu besoin de lire le résumé : la couverture a suffi
pour me convaincre que ce petit roman illustré devait absolument rejoindre les étagères de ma bibliothèque …
Par acquis de conscience, et aussi parce que je savais que j’avais du temps
devant moi – quand papa est lâché dans un hypermarché en période de soldes,
cela peut durer littéralement des heures –, j’ai lu les premiers chapitres … Et
ma conviction première s’est confirmée : il était absolument hors de question que je sorte du magasin
sans lui. Il ne restait plus qu’à convaincre papa – qui considère que j’ai déjà
beaucoup trop de livres comme cela – de me l’acheter ! Je n’arrive
toujours pas à y croire mais … il n’a pas protesté une seule seconde. Je crois
que le magnifique petit renard a fait son effet ! C’est donc en sautillant
de joie – il n’y a rien de plus beau que d’acquérir un nouveau livre – que
j’ai rapporté Pax et le petit soldat à la maison … Où il aura attendu plusieurs années avant d’être lu, l’expansion
de ma PAL étant plus rapide que mon rythme de lecture !
Pax aime son garçon, et Peter aime son
renard. Depuis que l’adolescent endeuillé par la mort de sa mère a recueilli le
renardeau orphelin, les deux amis sont inséparables. Jusqu’au jour où le père
de Peter s’engage dans l’armée, obligeant le jeune homme à partir vivre chez
son grand-père … et à abandonner Pax dans la forêt. Le renard, ignorant tout de
la vie sauvage, décide d’attendre sagement le retour de son petit maitre … Même
si cela signifie d’empiéter sur le territoire de chasse d’une autre renarde
fort méfiante ! Peter, le cœur gros, choisit quant à lui de partir à la
recherche de son compagnon à quatre pattes … Même si cela signifie de devoir
parcourir cinq cent kilomètres à pieds ! Les deux amis finiront-ils par se
retrouver ?
C’est un livre qui commence comme un roman d’aventures
… Pax, renard apprivoisé, se retrouve brusquement esseulé en pleine forêt,
nature sauvage et indomptée qu’il n’a jamais réellement connu et dans laquelle
il est aussi vulnérable qu’un nouveau-né. Il ne sait pas chasser, il ne sait
pas comment trouver de l’eau, il ne sait pas se défendre. Les coyotes rodent,
et une renarde dominante semble bien décidée à protéger son jeune frère contre
cet intrus qui empeste l’humain … Autant vous dire qu’on tremble d’effroi pour cet
adorable petit renard qui ne comprend pas pourquoi son garçon est parti en
pleine séance de jeu ! De son côté, Peter, pris de remords, dégouté d’avoir
céder aux exigences de son père et d’avoir abandonné son renard sans défense,
se lance dans un bien périlleux périple pour un adolescent d’à peine douze ans …
Cinq cent kilomètres à pieds, en plein cœur d’une zone évacuée car l’armée s’apprête
à attaquer. Sans lampe torche pour éclairer son chemin la nuit, sans vêtements
de rechange pour affronter le froid nocturne … On s’en doute, son épopée va s’avérer
plus délicate encore que prévue, et on attend avec crainte le moment où une
embûche plus grande que les autres va stopper net son avancée …
Mais ce livre se transforme progressivement en
véritable récit initiatique. Aux côtés d’Hérissée, de l’Avorton et du Gris,
trois renards aussi différents que complémentaires – la rivale, le protégé et
le sage –, Pax va progressivement renouer avec sa nature profonde d’enfant de
la nature. Il va découvrir que tous les humains ne sont pas aussi bienveillants
que son garçon, que certains commettent des atrocités sans nom au nom du « pouvoir »,
de la « richesse », qu’ils sont indéniablement aveugles, sourds et
dépourvus de tout bon sens. Il va apprendre le sens du devoir et de l’honneur,
la loyauté et la liberté … sans pour autant oublier son garçon, à qui il doit
la vie, et qu’il se sent obligé de protéger. Peter, quant à lui, va croiser sur
sa route Vola la solitaire. Anciennement militaire, la jeune femme fait
désormais pénitence : dégoutée d’elle-même d’avoir tué et dépouillé d’illustres
inconnus pour obéir aux ordres, elle a choisi de s’isoler du monde et de
réparer ses torts en donnant vie à l’histoire préférée de ce jeune soldat mort
par sa faute. Jour après jour, elle fabrique des marionnettes, boitillant sur
la lourde jambe de bois qu’elle s’est fabriquée pour remplacer la légère
prothèse qu’on lui a donnée suite à son amputation. Aux côtés de Vola, Peter va
progressivement découvrir quel homme il veut être, il va apprendre à se
connaitre pour mieux avancer … D’enfant buté et obstiné, il devient jeune homme
posé et déterminé.
Ce livre, enfin, c’est un véritable plaidoyer
contre la guerre. A travers le regard innocent et lucide des renards, le
lecteur découvre sous un jour nouveau cette réalité que l’on sait si meurtrière
mais qui, pourtant, semble profondément ancrée dans la nature humaine. J’ai
énormément apprécié la façon dont les renards nomment les soldats : « malades
de guerre », comme si cette soudaine volonté de s’entretuer pour des
raisons aussi futiles qu’incompréhensible était une épidémie contre laquelle il
n’existait aucun vaccin, aucun antidote. Et les animaux fuient, car ils savent
que les hommes ne prêtent attention à rien et qu’ils n’auront aucun scrupule à
tout détruire sur leur passage pour aller affronter des inconnus qui ne savent
même pas pour quoi ils se battent. « Crois-tu que, dans l'histoire de ce
monde, quelqu'un ait jamais décidé de se battre du mauvais côté ? »,
demande Vola à Peter lorsque celui-ci affirme que son père se bat « du bon
côté » … Pourquoi la guerre ? La guerre qui laisse des enfants
orphelins, qui séparent fratries et amis, qui tue des milliers d’animaux
innocents et mutile la nature nourricière … L’autrice n’impose pas son opinion
sur la guerre, elle s’efforce seulement de « dire la vérité sur le prix à
payer lors d’une guerre », pour reprendre les mots de Vola. A chacun de se
forger sa propre opinion, désormais …
En bref, vous l’aurez compris, c’est un vrai
coup de cœur ! Je ne sais même pas comment exprimer tout ce que j’ai
ressenti à la lecture de ce récit : c’est triste et c’est beau, c’est dur
et c’est beau, c’est beau, tout simplement. L’histoire est bien plus profonde
que ce qu’elle n’en a l’air au premier abord, elle aborde avec douceur et
poésie de grandes et cruelles questions, elle évoque le sens de la vie, l’Amitié
avec un grand A, le deuil … Pax et le petit soldat, ce n’est pas un simple « livre pour enfant ». C’est un
roman d’une richesse rare, à la narration exceptionnelle, qui bouleverse et
émeut. C’est un livre qui transforme … et c’est un livre qui se vit, mais ne se
raconte pas. Que vous soyez jeune ou moins jeune, que vous aimiez ou non les
renards, n’hésitez pas une seule seconde à vous plonger dans ce récit incroyable !
Cerise sur le gâteau : les illustrations de Jon Klassen sont magnifiques,
un régal pour les yeux et pour le cœur …
Ce livre
a été lu dans le cadre du Tournoi des 3 Sorciers
(plus
d’explications sur cet article)
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