Editeur : Bayard Jeunesse
Nombre
de pages : 254
Résumé : Angeline a huit ans, trois ans d'avance à
l'école et des poissons plein la tête... Quand ses camarades la traitent de
monstre ou de bébé, elle trouve refuge au milieu des immenses aquariums du
Musée océanographique. À moins qu'elle ne se console avec un bon livre
d'aventures et un grand verre d'eau salée... Angeline aimerait être une petite
fille comme les autres. Or elle vit dans son monde, extravagant et
fabuleux. Jusqu'au jour où elle sympathise avec Barry, le garçon le plus drôle
qu'elle ait jamais rencontré. II lui présente la merveilleuse Miss Terbone.
Deux amis d'un coup. Angeline n'aurait même pas osé en rêver !
- Un petit extrait -
« Plus personne n'essayait de comprendre pourquoi Angeline savait tout ce qu'elle savait avant de naître. Désormais, on se contentait de dire : « C'est un génie ! ». Et même si ça n'expliquait rien, chacun estimait que ça expliquait tout. Par exemple, Angeline savait toujours quel temps il ferait le lendemain. Alors si quelqu'un demandait : « Comment elle arrive à faire ça ? », on lui répondait : « C'est un génie », et apparemment, ça suffisait.Ainsi, personne n'avait jamais essayé de comprendre pourquoi Angeline savait tout ce qu'elle savait avant de naître. »
- Mon avis sur le livre -
Déjà à l’école primaire, je passais mes
récréations assise dans un coin, ou adossée contre un mur sous le préau, plongée
dans un roman, tandis que mes camarades jouaient, couraient et hurlaient autour
de moi. Certaines maitresses, plus perspicaces que d’autres, m’autorisaient
même à rester dans la classe pour m’éviter les railleries et autres méchancetés
enfantines, et je passais alors de merveilleux moments dans le coin lecture de
la salle, à dévorer les uns après les autres tous les romans que contenaient la
petite bibliothèque scolaire. Et cela a continué au collège, où j’hantais
littéralement le CDI à chaque intercours et récréations. C’est là que j’ai
croisé pour la toute première fois le chemin d’Angeline, la petite héroïne de
ce roman au titre incroyablement poétique. Entre elle et moi, ça a été un coup
de foudre amical immédiat : même si elle n’était que d’encre et de papier,
et non de chair et d’os, j’ai eu le sentiment qu’Angeline était la seule personne
au monde à pouvoir me comprendre. J’ai relu un nombre incalculable de fois ses
aventures lorsque adolescente. Et aujourd’hui encore, j’aime la retrouver de
temps en temps …
Angeline n’était encore qu’un bébé lorsqu’elle
prononça son premier mot : octopode. A partir de ce moment-là, on décréta
qu’Angeline était un génie : pour les adultes, cela explique tout. La
vérité, c’est qu’il y a des choses que l’on sait avant de naitre : la
plupart des enfants oublient tout à leur naissance, mais Angeline n’a rien
oublié. Aujourd’hui, Angeline a huit ans, elle aime les poissons et l’eau salée,
est en CM2 et suce encore son pouce, ce qui lui vaut d’être traité de monstre
par ses camarades et de bébé par son horrible maitresse. Son plus grand rêve
est de grimper dans le camion-poubelle que conduit son père, éboueur, qui ne
sait pas comment communiquer avec son étrange et si intelligente petite fille.
La vie d’Angeline est bien triste et monotone, jusqu’au jour où elle rencontre
Barry, spécialiste des blagues, et son institutrice Miss Terbone – ou Mister
Bone, au choix. Pour la toute première fois de sa vie, Angeline a le sentiment
d’être acceptée comme elle est …
Rares sont les romans jeunesses à évoquer la
question du haut potentiel intellectuel … et encore plus rares sont ceux qui
parviennent à le faire avec autant de justesse et de tendresse. Comme beaucoup
de « petits génies », Angeline est mal dans sa peau : elle a le
sentiment de n’être nulle part à sa place. Si on la laisse avec son groupe d’âge,
elle s’ennuie pendant les cours. Mais si on lui fait sauter des classes pour « exploiter
son potentiel », elle souffre de la différence d’âge avec ses camarades.
Car malgré ses connaissances « exceptionnelles », Angeline reste une
petite fille de huit ans, solitaire et hypersensible, qui a besoin de sucer son
pouce pour se rassurer et qui pleure sans pouvoir se contrôler à la moindre « contrariété ».
Sa maitresse la déteste, ses camarades la rejettent : chaque journée d’école
est une épreuve. J’ai toujours beaucoup de peine pour Angelina, d’autant plus
que je comprends parfaitement son mal-être – bien que j’ai personnellement eu
la « chance » de n’être diagnostiquée qu’à l’âge adulte, ce qui m’a
évité la problématique du sautage de classes. Elle fait tout son possible pour
être acceptée, pour se comporter « comme il faut », mais elle ne
comprend pas les codes sociaux qui régissent la vie d’une classe de CM2, elle
ne comprend pas cette haine à son égard, et se réfugie donc dans l’imaginaire
et dans sa passion pour les poissons.
Mais ce roman n’est pas un roman sur le haut
potentiel. Non. Ce roman, c’est avant tout autre chose une magnifique histoire
d’amitié entre Angeline, cette petite fille rejetée à cause de son intelligence
hors norme et de sa sensibilité extrême, et Barry, ce petit garçon rejeté à
cause de ses blagues et autres jeux de mots, à cause de son extravagance. Entre
eux deux, l’alchimie est immédiate : ils sont fait pour s’entendre. Ils se
comprennent sans avoir besoin de parler, telles deux âmes sœurs en amitié. Barry
rend les journées d’Angeline plus belles, et Angeline rend les journées de
Barry plus jolies. C’est une belle histoire d’amitié comme on n’en trouve que
dans les livres, une amitié pure et sincère placée sous le signe de l’évidence.
Ils sont tellement adorables ces deux-là ! Ce roman, c’est aussi une
magnifique histoire d’amour entre un père et sa fille. Abel ne sait pas comment
agir avec Angeline : lui, simple éboueur, se sent bien trop bête pour être
le père d’une fille si intelligente. Il l’aime, il l’aime plus que tout, mais
ne sait pas comment lui montrer, ne sait pas comment lui parler. Son ami Gus
essaye de lui expliquer qu’Angeline est une petite fille comme les autres, qu’elle
aime qu’on lui raconte des histoires drôles et qu’on s’intéresse à sa vie, mais
il faudra un effrayant événement pour que se brise enfin la glace. Je verse
toujours toutes les larmes de mon corps à ce moment-là, et la scène finale est
tout simplement merveilleuse !
En bref, vous l’aurez bien compris, je suis
encore et toujours sous le charme de ce petit récit, et c’est toujours un régal
que de me replonger dans ce petit roman ! C’est une histoire pleine de
tendresse et de poésie, une histoire qui fait rire et pleurer. L’auteur nous
invite à faire la connaissance d’une petite fille atypique et attachante, une
petite fille qui a « des poissons dans la tête », symbole de ses
rêves et de ses espoirs. Angeline est comme un poisson enfermé dans un bocal :
elle tourne en rond dans un monde qui n’est pas le sien, elle est montrée du
doigt comme une bête de foire, alors qu’elle aimerait n’être qu’une petite
fille comme les autres. Avec beaucoup de douceur et d’humour, l’auteur nous
raconte une histoire qui met du baume du cœur, une histoire qui redonne le
sourire même quand tout nous semble si sombre, une histoire qui redonne de l’espoir
et ravive nos rêveries. C’est un petit roman que je conseille sans restriction :
aux petits lecteurs et petites lectrices en herbe, aux grands lecteurs et
grandes lectrices qui veulent renouer avec leur âme d’enfants … et même à ceux
qui n’aiment pas spécialement lire, car c’est vraiment une belle histoire qui
ravira tous les cœurs et toutes les âmes !
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