samedi 19 mai 2018

La rage d'aimer - Emery Lord


La rage d’aimer, Emery Lord

Editeur : Dreamland
Nombre de pages : 329

Résumé : Depuis la mort de son père, Jonah est devenu le chef de famille. À seulement 17 ans, il règne sur une tribu de cinq frères et sœurs et sur le restaurant familial dont il a la responsabilité. Tout s'éclaire quand Vivi, une jeune fille de son âge et véritable tornade, débarque dans sa vie : elle est pleine d’énergie et de joie de vivre. Dans ses bras, le jeune homme oublie ses soucis. Mais derrière son enthousiasme, Vivi cache un secret : elle est bipolaire et refuse de prendre des médicaments pour réguler son humeur. La jeune fille veut vivre intensément, se libérer de toute dépendance. Au risque de mettre sa vie et sa relation avec Jonah en danger…

Un grand merci aux éditions Dreamland pour l’envoi de ce volume.

- Un petit extrait -

« Je ne sais pas si vous vous êtes déjà allongé dans un champ immense pour contempler l’azur du ciel et sentir la planète bourdonner tout autour de vous, mais c’est l’impression que je retire des journées passées ici. Le monde s’y déplace à une allure plus lente - si lente que mes mouvements ressemblent à des décharges, des crépitements d’énergie à travers les rues. »

- Mon avis sur le livre -

Il y a des livres que l’on aime beaucoup, passionnément, à la folie, sans véritablement savoir pourquoi, sans vraiment parvenir à déterminer ce qui a entrainé un tel coup de cœur. C’est un peu le cas pour ce livre : il m’a plu, il m’a terriblement plu, et pourtant je suis complétement incapable de comprendre comment il a pu me chambouler ainsi. Car ce livre a été une véritable surprise : à la lecture de la quatrième de couverture, je m’attendais à quelque chose de finalement assez dramatique, assez tragique. « Comment pourrait-il en être autrement avec un livre évoquant des thèmes aussi graves que le deuil et les troubles bipolaires ? », me disais-je bien naïvement … En effet, comment aurais-je pu deviner que l’auteur allait justement faire le choix de ne pas tomber dans cette évidence et de proposer à ses lecteurs une histoire profondément lumineuse malgré ces deux thématiques ? Quelle belle surprise, qui fait du bien au cœur et à l’âme !

Jonah et Vivi semblent n’avoir rien en commun : le premier est sérieux, responsable et placide tandis que la seconde est dynamique, fantasque et insouciante. Le calme et la tornade. Et pourtant, tous deux ont de sacrés démons intérieurs à combattre, jour après jour … Depuis la mort de son père, c’est sur les épaules de Jonah que pèse la responsabilité d’élever ses trois petits frères et sœurs, tandis que ses frères et sœurs ainé se chargent des finances et que leur mère se morfond dans sa chambre. Vivi, quant à elle, malgré toute son exubérance et toute son excentricité, risque à tout instant de sombrer dans un épisode dépressif, ou de perdre une fois de plus tout contrôle de ses actes et pensées … Chacun va trouver dans l’autre une ancre à laquelle se raccrocher, une bouée à laquelle se harponner. Et, malgré leur fardeau respectif, ou peut-être grâce à cette fragilité commune, ils vont s’aimer, le temps d’un été …

La grande richesse de ce roman, c’est sa double narration : nous suivons Vivi le temps d’un chapitre, puis Jonah le temps d’un autre, et ainsi de suite, ces deux points de vue s’alternent et se répondent. C’est un peu comme si nous avons deux histoires en une, tant nos deux protagonistes sont différents : les pensées de Vivi s’éparpillent sans cesse, volettent d’un sujet à l’autre, s’attardent sur des considérations poétiques, artistiques ou philosophiques, tandis que Jonah est plus terre à terre, plus pragmatique aussi. Ce livre montre ainsi très bien qu’il n’existe pas qu’une seule vérité, que chaque événement est vécu et interprété différemment par chaque personne, mais également qu’il est parfois bien difficile de communiquer avec autrui, et peut-être même surtout avec ceux qu’on aime. Jonah n’ose pas parler avec sa mère de leur chagrin commun, n’ose pas lui expliquer à quel point cela lui pèse d’être désormais seul à gérer la maisonnée, n’ose pas la brusquer en lui proposant d’aller chercher de l’aide auprès d’amis ou de médecins. Vivi, elle, n’ose pas avouer à sa mère qu’elle ne veut pas prendre ces médicaments qui, s’ils calment ses ardeurs hypomaniables, lui donnent également le sentiment que le monde est gris et froid, elle n’ose pas lui parler de ce père qu’elle ne connait pas et dont elle ignore jusqu’au prénom, mais qui lui manque malgré tout …  

Ce livre aborde donc une ribambelle de thématiques toutes aussi difficiles les unes que les autres : secrets familiaux, deuil, culpabilité, dépression, responsabilités, tentatives de suicide … Et pourtant, ce roman ne tombe jamais, pas une seule seconde, dans le cliché. On sent que l’auteur est bien renseignée sur ces différents troubles psychiatriques, qu’elle ne s’est pas laissée influencée par les croyances populaires sur ces maladies, qu’elle ne raconte pas n’importe quoi. Premier excellent point : il n’y a à mes yeux rien de plus agaçant qu’un auteur qui véhicule sans même s’en rendre compte d’insupportables inepties sur ces pathologies ! Si chaque écrivain faisait autant attention qu’Emery Lord, alors peut-être que l’on cesserait d’utiliser les termes « schizophrénie » et « bipolarité » à torts et à travers et que, du coup, les personnes souffrant de ces maladies n’auraient plus à batailler pour expliquer la réalité de leur trouble …  

Mais, bien plus important encore, comme je le disais dans mon introduction, ce roman se démarque des autres récits similaires en restant profondément, intensément, léger et rafraichissant. C’est un livre qui fait du bien, un livre qui ne se contente pas de montrer les « mauvais jours » qu’entrainent ces maladies, mais qui invite à se concentrer sur les bons moments, sur cette certitude que notre vie peut être géniale malgré les difficultés rencontrées sur le chemin. C’est un livre qui respire la joie de vivre, qui sent bon le bonheur. Ce fut pour moi une belle surprise que de croiser le chemin de ce roman qui ne cherche pas à faire pleurer dans les chaumières, qui ne conduit pas à plaindre les personnages et par extension ceux qui sont dans la même situations qu’eux, mais qui au contraire invite à voir dans la vie une promesse, voire même une infinité de promesses qui n’attendent que notre enthousiasme pour devenir réalité. C’est un livre plein d’espoir qui nous exhorte à ne pas se laisser abattre par nos peines et nos douleurs, aussi nombreuses et profondes soient-elles, parce qu’il y a tellement de belles choses à vivre …

Ce roman, donc, a été une excellente surprise ! Des personnages attachants et sensibles, portant tous au fond d’eux-mêmes une ou plusieurs blessures plus ou moins visibles, une histoire d’amour tout simplement magnifique, une histoire tout court qui donne le sourire et qui met du baume au cœur. Je conseille tout d’abord ce roman à tous ceux qui apprécient les ouvrages de John Green ou de Sarah Dessen : vous retrouverez ici la puissance qui caractérise les livres du premier et l’espérance qui teinte chaque roman de la seconde. Mais, plus globalement, je conseille ce livre à tous ceux qui aiment les belles histoires, celles qui font du bien à l’âme, celles qui remontent le moral, à tous ceux qui veulent vibrer au rythme du premier grand amour, celui dont on se souvient toujours. Quel beau livre, vraiment, quel beau livre !

Ce livre a été lu dans le cadre de la Coupe des 4 maisons
(plus d’explications sur cet article)

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