mercredi 21 décembre 2016

U4.Jules - Carole Trébor



U4. Jules, Carole Trébor

Editeur : Syros Nathan
Nombre de pages : 382
Résumé : Jules vit reclus dans son appartement à Paris. Il n’a pas de nouvelles de ses parents, en voyage lorsque l'épidémie a commencé de se propager. Le spectacle qu’il devine par la fenêtre est effroyable, la rue jonchée de cadavres. Mais il sait qu’il ne pourra pas tenir longtemps en autarcie. Pour affronter l’extérieur, Jules redevient le guerrier impavide qu'il était dans le jeu. Il va alors retrouver son frère aîné, qui se drogue et dont il ne peut rien attendre, puis secourir une petite fille qui a mystérieusement échappé au virus et qu'il décide de prendre sous son aile. Son seul espoir : le rendez-vous fixé par Warriors of Times.


- Un petit extrait -

« Et de sentir en moi, à travers sa menotte gelée et poisseuse, me redonne du courage. Les enfants, d'habitude, ça m'indiffère. Mais elle a un truc spécial, cette petite fille. Je vais la protéger, personne ne lui fera de mal, jamais. Est-ce qu'elle a un manteau, un vêtement chaud? Elle enfile un anorak à l'effigie de Dora l'exploratrice. Mon cœur bondit dans ma poitrine. Comme elle me paraît dérisoire, cette joyeuse petite héroïne, sur le dos d'une minuscule fillette aux immenses yeux gris teintés de points d'interrogations. »

- Mon avis sur le livre -

Il ne me manque que deux choses pour être une lectrice comblée : un compte en banque illimité et des étagères capables d’accueillir un nombre infini de livres. Car c’est précisément ces deux raisons – budget limité et bibliothèques remplies à ras bord – qui m’ont obligée à patienter tellement longtemps avant de pouvoir enfin découvrir cette si intrigante saga. Un rendez-vous, quatre personnages, quatre volumes, quatre auteurs. Un véritable OVNI littéraire, en somme. Et pour parfaire le tableau, c’est de l’apocalyptique : tout pour me plaire. C’est en prévision du Salon du livre de Colmar que je suis enfin passé outre ces considérations purement matérielles pour me concentrer sur l’essentiel : la lecture. Parce que finalement, tant pis si mon bureau se transforme en annexe de ma bibliothèque, le plus important, c’est d’avoir du stock de lecture, non ?

Un message sur le forum d’un jeu vidéo, quelques jours à peine avant que l’électricité ne fasse défaut. Un rendez-vous fixé par le maitre du jeu, promettant aux Experts un moyen d’« éviter la catastrophe en réécrivant le passé ». C’est tout ce qui reste à Jules, reclus dans l’appartement familial avec pour seule compagnie son chat et le silence. Une lueur d’espoir dans la solitude et la frayeur qui succède à la catastrophe : les rues de Paris sont désespérément vides de vie. Suivant les indications de son grand-père, lors de leur dernière conversation téléphonique, Jules est resté chez lui tandis que la pandémie décimait les populations, est resté chez lui tandis que le monde tel qu’il le connaissait depuis sa naissance s’écroulait progressivement, ravagé par un mystérieux virus aussi foudroyant qu’incontrôlable. Mais quand les vivres viennent à manquer, Jules prend le risque : il sort. Et tombe sur Alicia, une petite fille qu’il ne connait ni d’Eve ni d’Adam, mais qu’il va cependant prendre sous son aile. Parce qu’elle est un véritable soleil dans cette obscurité. Parviendra-t-il à les garder en vie suffisamment longtemps pour se rendre au fameux rassemblement de Khronos, dans cette ville où on ne peut compter sur personne d’autre que soi-même ?

Je pense qu’un seul mot pourrait suffire à résumer ce livre : foudroyant. On ne sort pas indemne de cette lecture : on a tremblé avec et pour les personnages, on a senti notre cœur s’emballer à l’unisson avec leur course effrénée, on a retenu notre souffle en chœur avec eux. Parce qu’aussi surprenant que cela puisse paraître, on oublie terriblement facilement que tout ceci n’est que de la fiction. Peut-être parce qu’il est fort probable que si une situation pareille arrivait, tout se déroulerait à peu de chose près de la même façon que les choses se sont déroulées dans ce roman. Honnêtement, si vous pensez encore que l’être humain est foncièrement bon, ne lisez pas ce livre, vous serez fort déçus : cette histoire dépeint très fidèlement la triste réalité, qui veut que dans les situations les plus difficiles, c’est chacun pour sa pomme. La violence et les divisions prennent le dessus sur la survie et la coopération. La confiance est synonyme de mort imminente, car nul n’est digne de confiance. Même les âmes les plus droites et justes se voient contraintes de prendre des décisions contraires à leur éthique pour survivre, tout simplement. C’est une des choses qui m’ont fait apprécier ce roman : il est certes destiné à des adolescents, mais il ne les enferme pas dans un monde déconnecté de la réalité. Au contraire, et même si c’est douloureux, il les invite à se rendre compte de l’ordre réel des choses. Mais peut-être, aussi, à se poser des questions : si une telle catastrophe me tombait dessus, voudrais-je vivre dans cette incertitude constante, ou préférerais-je trimer à reconstruire un monde meilleurs ? Bref, un livre percutant qui ne laissera personne indifférent.

Mais ce livre, s’il nous présente les bases d’une humanité confrontée à une véritable apocalypse, est surtout l’histoire de Jules … et d’Alicia. Car finalement, l’un ne va pas sans l’autre et c’est ensemble qu’ils affrontent ce monde dévasté. Jules, c’est l’adolescent lambda qui, avant toute cette fâcheuse histoire, passait ses journées sur son ordinateur à dégommer des ennemis – tout en sachant qu’ils étaient pas vraiment morts. Jules, c’est le jeune homme qui, quand la violence qui hante ces jeux vidéo s’invite dans la rue au pied de son immeuble, comprend que tout cela ne l’aidera pas à survivre. Jules, c’est juste un gamin que les événements ont poussés à grandir d’un coup, mais qui n’arrive pas toujours à suivre la cadence. Et Alicia, c’est la petite fille qui, par son innocence-même, s’avère être bien plus sage que beaucoup d’adultes. C’est la petite fille qui remet les choses à leur juste place, qui remet un peu de vie dans ce monde dévasté, qui créé des liens, qui console, qui soutient. Alicia, elle m’a touchée, vraiment, parce qu’elle est à la fois super courageuse et terriblement fragile, parce qu’elle est à la fois celle qu’on veut protéger et celle qui protège, à des niveaux différents. Et ce duo … Bah ce duo, si inhabituel et inattendu, il fait la force de ce récit. Parce qu’on a qu’une seule envie : les voir s’en sortir, tous les deux, ensemble, envers et contre tout. Et même si les autres personnages nous interpellent, nous agacent, nous attendrissent ou nous intriguent, on en revient toujours à ces deux-là. Jules et Alicia, dans le fond, ils ne sont qu’un, et c’est juste beau, cet amour tout simple entre un grand gaillard un peu maladroit et une gamine qui invite tout le monde dans son univers …

Ce livre, donc, se lit à une vitesse folle. Parce qu’à chaque fin de chapitre, on ne peut pas s’empêcher de commencer le suivant, parce qu’ils se finissent toujours par un suspense insoutenable. Parce qu’il se passe toujours quelque chose, que rien ne se déroule jamais comme prévu. Parce qu’on veut avoir le fin mot de l’histoire : c’est quoi ce virus ? pourquoi certains ont survécu et pas d’autres ? c’est quoi ce rendez-vous ? et il va proposer quoi ce fameux maitre du jeu ? vont-ils réussir à s’y rendre ? seront-ils toujours tous en vie à la fin de l’histoire ? resteront-ils ensemble ? untel est-il digne de confiance ? c’est qui qui a trahi ? Bref, que d’interrogations qui rendent toute pause terriblement frustrante et presque impossible. Mais le pire dans toute cette affaire, c’est que même si on a certains éléments de réponse (et même que bien des fois, on en reste tout simplement comme deux ronds de frite parce qu’on s’attendait à absolument tout sauf à cela), il reste des dizaines et des dizaines de questions à élucider. J’ose espérer que cela appelle à une suite sinon je hurle à la fourberie ! C’est tout simplement cruel, de laisser le lecteur face à une telle incertitude ! Alors une seule question persiste encore : c’est quand la suite ?

Pour conclure, je vais me contenter de m’auto-flageller : mais pourquoi diable avoir mis tellement de temps avant de passer outre cette histoire de budget et de place pour acheter ce roman ? Franchement, je me suis privée d’un récit terriblement addictif et douloureusement percutant pendant si longtemps ! Des personnages attachants, des mystères captivant, de l’action à gogo et de l’émotion bien cachée mais bien présente, bref, tous les ingrédients réunis pour faire de cette histoire un vrai coup de cœur ! Maintenant, tout ce qu’il me manque, c’est : 1. de lire les trois autres romans pour avoir d’autres points de vue sur la situation (ça tombe bien, j’en ai déjà un autre dans ma bibliothèque) et 2. une suite. Et pour résumer clairement les choses : tu attends quoi pour courir chez ton libraire et lui hurler « J’VEUX LES QUATRE U4 ! » ?

Ce livre a été lu dans le cadre de la Coupe des 4 maisons
(plus d’explications sur cet article)

4 commentaires:

  1. Très belle chronique ! J'hésite un peu à me lancer dans cette série, déjà parce que j'ai pas les livres et ensuite parce que j'ai vu des avis assez divergents (ah et aussi j'aime pas les couv', ça a aussi son importance). Le tien en tout cas donne envie ! Du coup, je viens de vérifier le site de ma bibli et ils y sont, joie héhé !
    Bisous et bonnes fêtes !
    Kin

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    1. Quand on hésite, le mieux est effectivement de tenter en bibliothèque, ça permet de tâter le terrain, et si vraiment on aime pas, on a pas de regrets à avoir d'avoir acheté le livre ;)
      J'espère que cela te plaira en dépit des couvertures :p

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  2. Il fait partie de maWishList, je rêve de l'avoir !! <3
    Au passage, ton blog est très agréable et chaleureux, félicitation !

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    1. J'espère pour toi que tu pourras te le procurer prochainement alors ;)
      Merci beaucoup :)

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