samedi 9 août 2025

Dans les yeux d’Orion - Jonathan Riant

Dans les yeux d’Orion, Jonathan Riant

 Editeur : Autoédition
Nombre de pages : 411
Résumé : Une puce ultra-intelligente implantée chez chaque citoyen permet de surveiller en temps réel toutes les constantes de santé. Créée par la puissante société VitaLink Corp, elle promet un monde plus sûr… à condition d’en payer le prix. Orion, 17 ans, est prêt à tout pour sauver sa mère atteinte d’un cancer du cerveau. Aidé par sa seule véritable amie, Vega, il plonge dans les secrets bien gardés de cette technologie omniprésente. Ce qu’il va découvrir pourrait bouleverser non seulement sa vie, mais aussi les fondements de toute la société. Et si le prix de notre santé, c’était notre liberté ?

 Un grand merci à Jonathan Riant pour l’envoi de ce volume et à la plateforme SimPlement pour avoir rendu ce partenariat possible.

 

- Un petit extrait -

« "O," ce petit surnom dont m'affuble Vega depuis notre rencontre. Elle dit trouver ça plus court et percutant. Pour ma part, il ne m'est jamais venu à l'idée de l'appeler "V", mais pourquoi pas. Je m'y suis fait à la longue et cela me fait penser à l'eau, ce liquide qui se fraye un chemin à travers tout ce qui l'entoure, esquivant, creusant tout doucement et subtilement, mais parvenant toujours à ses fins. Et j'aime bien cette idée. Je me dis qu'à la longue, je parviendrai bien à me faire une place dans ce monde. Et à force de travail et de petits contournements, je sauverai ma mère. Je suis l'eau qui parcourt le monde et ma mère en est la source.   »

- Mon avis sur le livre -

Dans un futur qui semble relativement proche, il n’a jamais été aussi facile de prendre soin de sa santé : grâce à la puce neuronale créée par VitaLink Corp, toutes vos constantes sont analysées en continu, et le moindre dysfonctionnement vous est signalé en direct. Malheureusement pour Orion, dix-sept ans, petit génie de l’informatique, et surtout pour sa mère, atteinte d’une grave tumeur au cerveau, les soins coutent chers. Bien trop cher pour eux. Le jeune homme a beau accumuler les petits boulots, plus ou moins légaux, en plus de ses études afin de se procurer des médicaments auprès de fournisseurs plus ou moins douteux, il voit l’état de sa mère se dégrader à vue d’œil. Il doit aller se rendre à l’évidence : s’il veut la sauver, il va lui falloir se rapprocher des milieux les plus malfamés qui soient … et prendre le risque d’attirer l’attention de la très efficace milice sécuritaire. Mais Orion ne reculera devant rien … pas même devant les découvertes les plus effrayantes.

Faire original, c’est difficile. En tant qu’apprentie écrivaine, je suis bien placée pour le savoir : notre cerveau, biologiquement programmé pour la paresse, cherche toujours la solution de facilité et se contente donc bien volontiers de ce qu’il connait déjà. Par ailleurs, quand on débute, c’est rassurant de s’inscrire dans la lignée de ce qui existe avant nous : on se dit que si ça a marché pour les autres, cela fonctionnera aussi pour nous. Mais la frontière est bien mince entre archétype et stéréotype, ainsi qu’entre code et cliché : cela demande une attention de tous les instants pour rester fidèles aux premiers sans tomber dans les seconds. L’équilibre est loin d’être évident à trouver : il faut inscrire son roman dans une certaine continuité avec les autres ouvrages du même genre (voire du même sous-genre), tout en lui insufflant une touche d’unicité qui lui permet de se démarquer de ces-dits ouvrages. Si le roman est trop différent, le lecteur amoureux du genre se sentira floué. Mais s’il est trop semblable, le lecteur coutumier du genre n’aura aucune surprise à se mettre sous la dent …

Et malheureusement, c’est un peu ce qui m’est arrivé avec ce livre. Pour son premier roman, l’auteur nous offre une dystopie tout ce qu’il y a de plus classique … et pour moi qui en ait lu des tas et des tas depuis mes douze ans, cela a même été beaucoup trop classique. Vraiment trop classique. Sans nul doute, c’est un genre que l’auteur connait lui aussi très bien, et il a visiblement fait des recherches pour s’assurer que son récit correspondait bien aux conventions du genre … Mais, probablement pris dans l’enthousiasme de l’auteur débutant, il a appliqué ces-dits conventions un petit peu trop à la lettre. Résultat des courses : je dois bien avouer m’être un peu ennuyée. Au milieu du chapitre trois, j’avais énoncé mes petites prédictions sur la suite de l’intrigue à ma maman, ayant déjà perdu tout espoir que le récit s’écarterait de ce schéma bien balisé … et effectivement, tout s’est déroulé exactement comme je l’avais imaginé. Et du coup, tout m’a semblé bien trop prévisible, et mon intérêt pour l’histoire s’est peu à peu émoussé …

Cela ne veut pas dire que c’est un mauvais roman : je reconnais que c’est une dystopie qui répond fidèlement aux attentes du genre. Juste trop fidèlement pour les lecteurs déjà très familiers du genre, justement. Je pense vraiment que c’est un livre qui s’adresse plutôt à des lecteurs qui n’ont pas encore lu beaucoup de dystopies : ils y trouveront un récit qui mêle mystère, action et émotion, et ils seront probablement bien plus « éblouis » que moi par certaines révélations et certains retournements de situation. Pour une première immersion dans le genre, ce roman est idéal. Pour une centième immersion dans le genre, pas vraiment. Je n’étais donc clairement pas le bon public pour ce roman, et je dois donc honnêtement avouer ne pas avoir eu une expérience de lecture bien transcendante … Mais si vous voulez découvrir le genre, ne vous laissez pas décourager par ma déception : elle n’est pas liée au livre en lui-même, mais bien plus à ma relation déjà ancienne avec le monde de la dystopie !

vendredi 9 mai 2025

Les Chroniques occultes, tome 5 : Croisière Macabre - Guy-Roger Duvert

Les chroniques occultes5, Guy-Roger Duvert

Croisière macabre

Editeur : Autoédition
Nombre de pages : 295
Résumé : Printemps 1935. Le SS Haronga, élégant paquebot en partance de Hong Kong pour San Francisco, emporte avec lui nos quatre investigateurs, animés par une quête : suivre la trace d’un riche occultiste en possession d’un texte ancien qu’ils comptent récupérer. Mais à mesure que le navire fend les eaux du Pacifique, des phénomènes inexplicables commencent à se multiplier. Bienvenue à bord. Mais ne soyez pas trop pressés d’arriver à destination...

 Un grand merci à Guy-Roger Duvert pour l’envoi de ce volume et à la plateforme SimPlement pour avoir rendu ce partenariat possible.

 

- Mon avis sur le livre -

 Au bout d’un certain nombre de tomes, il devient difficile de savoir quoi dire de nouveau sur une saga … Vous qui connaissez déjà les Chroniques occultes, qui avez déjà lu les quatre premier opus, et peut-être même celui-ci, je n’ai plus besoin de vous convaincre : vous savez déjà tout aussi bien que moi qu’on en redemande toujours plus ! Quand à vous, qui n’avez pas encore découvert la saga, ou qui n’avez pas encore lu ce tome, je ne voudrais surtout pas risquer de trop vous en dire : cela serait vous gâcher le plaisir de la pure découverte !

Je dois bien reconnaitre que cette saga n’est pas celle que je préfère de l’auteur : je garde un attachement tout particulier pour Outsphere, sans doute parce que c’est avec elle que j’ai découvert la plume de Guy-Roger Duvert. Par ailleurs, je ne suis pas forcément une grande adepte des mythes lovecraftiens, et nul besoin d’être un grand spécialiste du genre pour comprendre rapidement que les Chroniques occultes s’inscrivent dans cette lignée. Toutefois, j’ai vraiment apprécié ce cinquième tome, plus que le précédent par exemple !

Je pense que le côté « huis-clos » y est pour quelque chose : je trouve que cela confère immédiatement une ambiance toute particulière au récit. La tension est d’autant plus grande que nos héros ne peuvent pas échapper aux potentielles menaces : quoi qu’il arrive, ils seront obligés de faire face, sans pouvoir se défiler. Car admettons-le : un des petits plaisirs coupables de la lecture, c’est vraiment de prendre plaisir à voir les personnages embourbés dans des situations inextricables et particulièrement mortelles … Bien en sécurité de l’autre côté du livre, on frissonne d’excitation à laisser les héros se mettre en danger à notre place : grâce à eux, on vit par procuration des aventures incroyables, sans risquer la moindre égratignure, n’est-ce pas fabuleux ?

Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’avec Milton, Kristen, Lillian et Howard, on ne s’ennuie pas une seule seconde. Pas de repos pour les braves : nos quatre investigateurs ne prennent pas le bateau pour profiter d’une agréable croisière, mais bel et bien pour traquer de dangereux occultistes en possession d’un manuscrit plus dangereux encore … Et le temps presse : il faut agir avant qu’ils ne mettent en branle le mystérieux rituel contenu dans le livre ! Et tandis que des passagers disparaissent les uns après les autres, une palpitante course contre la montre débute : préparez-vous à retenir votre souffle, à sentir votre cœur s’accélérer et à ressentir le besoin de tourner les pages à toute vitesse pour découvrir la suite de l’histoire !

Histoire qui, comme souvent avec Guy-Roger Duvert, s’articule autour d’un très subtil équilibre entre des ressorts narratifs assez « connus » (si l’on fait bien attention aux indices disséminés par-ci par-là et si on est quelque peu familier du genre, on parvient à deviner ce qui se cache derrière toutes ces choses étranges) et de véritables coups de théâtre très difficilement prévisibles. J’aime bien, car c’est ce qui génère vraiment un effet de surprise : comme on baisse la garde en pensant avoir compris, on est d’autant plus étonné quand la seconde (voire troisième) révélation survint ! L’auteur est vraiment doué pour cela, et je ne m’en lasse vraiment pas !

Plus généralement, cet opus a vraiment ravivé en moi la « flamme » pour cette saga : elle reste toujours un peu en-deçà d’Outsphere selon moi (d’ailleurs … l’auteur a-t-il vraiment une fascination pour les raies manta volantes au point d’en mettre dans tous ses univers, ou bien est-ce les prémices d’une nouvelle convergence entre les sagas ?!), mais j’ai vraiment terriblement envie de découvrir la suite des aventures de nos quatre aventuriers ! Je pense que ce qui est vraiment le plus sympa, c’est que chaque tome a en quelque sorte son ambiance « propre » : bien sûr, il y a une continuité indéniable, mais il y a toujours un souffle de « nouveauté », et j’aime énormément !

dimanche 13 avril 2025

Lever de soleil sur la moisson - Suzanne Collins

Lever de soleil sur la moisson, Suzanne Collins

Editeur : Pocket Jeunesse
Nombre de pages : 465
Résumé : À l'aube des cinquantièmes Hunger Games, la peur s'empare des districts de Panem. Cette année, en l'honneur des Jeux de l'Expiation, le nombre de tributs arrachés à leur famille pour participer à ces jeux cruels sera doublé ! Dans le district 12, Haymitch Abernathy tente de ne pas trop penser au terrible tirage au sort. Alors, quand le destin le désigne comme tribut, son monde s'écroule. Alors que les Jeux sont sur le point de commencer, Haymitch comprend que les épreuves sont truquées et qu'il n'a aucune chance. Pourtant, quelque chose en lui le pousse à se battre... pour que ce combat dépasse les frontières de l'arène mortelle. 


- Un petit extrait -

« - Tu ne peux pas affirmer qu'une chose se produira demain sous prétexte qu'elle s'est toujours produite jusqu'à maintenant. C'est une logique douteuse.

- Ah bon ? Pourtant, c'est ainsi que la plupart des gens raisonnent.

- Justement. Croire que certaines choses sont inévitables, qu'on ne peut rien y changer, fait partie du problème.  »

- Mon avis sur le livre -

 Vous n’imaginez même pas à quel point j’étais ravie d’apprendre qu’un hors-série sur Haymitch allait voir le jour, et à quel point j’étais terriblement impatiente de le découvrir ! En effet, Haymitch a toujours été mon personnage favori de la trilogie « Hunger Games », et j’avais vraiment hâte de découvrir son passé avant le début de « l’ère Katniss ». Je désirais vivement « faire la connaissance » de l’Haymitch pré-arène, du gamin qu’il était avant que les Jeux ne le brisent à tout jamais … Et le moins que l’on puisse dire, c’est que je n’ai clairement pas été déçue ! Bien sûr, on peut ressentir un peu de « fan-service » à certains moments, mais je trouve que c’est vraiment un hors-série qui apporte un vrai éclairage sur ce personnage à la fois très complexe et très « banal ».

Car c’est vraiment ce que je retiens de tout ce roman : contrairement à Katniss qui a toujours eu en elle cette étincelle de révolte, cette propension à briser les interdits et à s’affranchir des obligations, le jeune Haymitch a plutôt tendance à tout faire pour ne pas se faire remarquer. Prendre des risques, ce n’est clairement pas dans sa nature profonde : bien sûr, il fait tout ce qu’il peut pour aider sa mère et son petit-frère et pour améliorer leur quotidien (tout, y compris filer un coup de main à une fabricante d’alcool de contrebande : il semblerait que tout habitant du district Douze ait quand même cette attirance pour l’illégalité, comme un papillon de nuit pour la lumière), mais ce n’est clairement pas le genre d’ado rebelle qui va publiquement remettre en cause le système. Et tout au long du livre, on se rend bien compte qu’il n’a rien d’un véritable héros : sans être foncièrement égoïste pour autant, il n’a rien d’un « brave chevalier » prêt à mourir pour une cause qui le dépasse ou pour quelqu’un d’autre. Il a, humainement, très envie de rester en vie, même si cela signifie la mort d’autrui … Et je trouve que cela fait du bien, parfois, de se retrouver face à des personnages « normaux », qui nous ressemblent. On a certes besoin de modèles à la Katniss pour oser faire front contre l’injustice, mais on a aussi besoin d’être un peu « rassurés » : c’est normal de ne pas être à la hauteur de ces grands héros de romans, nous ne sommes qu’humains, après tout.

En bon petit gamin du Douze, le jeune Haymitch a tout de même tout au fond de lui cet appel à la lutte contre l’oppression et au dévouement pour les plus fragiles : du début à la fin, il enchaine les petits actes de rébellion, de défi vis-à-vis du Capitole. Il veut leur montrer qu’il ne jouera pas à leur petit jeu, qu’il ne servira pas volontairement leur propagande. Et même s’il se rend lui-même compte que, bien malgré lui, il se retrouve prisonnier du système et donc qu’il sert les intérêts de Snow, il a au moins le mérite d’essayer. Et essayer « c’est toujours mieux que de ne rien faire », même si l’essai se solde par un échec … Tout au long du livre, on oscille entre l’envie de féliciter cet ado qui tente de garder la tête haute, et celle de le réconforter lorsqu’il se rend compte qu’il n’a pas réussi à atteindre les objectifs qu’il s’éteint fixés ou à remplir la mission qu’on lui avait confié. Haymitch est vraiment très attachant, on sent qu’il a grand cœur, que c’est un brave garçon, qu’il n’est pas guidé par la haine mais plutôt par le désir de rendre les choses plus belles pour tout le monde … C’est vraiment un jeune héros qu’on a envie de soutenir de toutes nos forces, parce que si le monde était rempli de plus de personnes comme lui, les choses iraient sans doute mieux. Il n’est pas parfait, loin de là, mais il essaye d’être la meilleure personne possible … et c’est déjà beaucoup.

Mais l’émotion qui a vraiment prédominé ma lecture, c’est vraiment la peine : pauvre, pauvre Haymitch. La Moisson est déjà un système horrible et injuste, mais alors la façon dont il s’est retrouvé tribut (et le fait que cette irrégularité ait été si habilement masquée, ce qui prouve que la « vérité » est une chose bien fragile et bien manipulable) est absolument atroce. Et ces Jeux d’Expiation, avec deux fois plus de tributs et donc deux fois plus de morts nécessaires pour être le vainqueur … c’est horrible, vraiment. Surtout pour un jeune aussi sensible que ne l’ait Haymitch : c’est vraiment le genre de personne qui s’attache à tout le monde, et qui ne peut pas s’empêcher de prendre sous son aile tous ceux qui sont fragiles et délaissés … Et perdre tous ses petits protégés un à un, sans avoir pu rien faire pour les sauver, en ayant de plus cette culpabilité d’être resté en vie, cela doit vraiment être infernal à porter. On comprend donc bien pourquoi, au retour de cette épreuve, il sombre si rapidement dans l’alcool et devient, année après année, ce mentor las et désabusé que nous connaissons. Bien sûr, certains estimeront qu’il aurait dû lutter plus que cela, mais pour ma part, j’estime qu’Haymitch mérite plutôt la compassion que le mépris : très personnellement, je ne pense pas que j’aurai réussi à vivre avec ce poids, ce fardeau qui est le sien … alors je comprends qu’il tente d’oublier toutes ces horreurs. La résilience est un beau concept, mais c’est un concept très élitiste : tout le monde n’a pas cette force de caractère, et c’est normal, ce n’est pas être « un moins que rien », c’est juste être un humain « standard » …

En bref, je me suis vraiment « régalée » du début à la fin, car ce fut un plaisir de retourner dans cet univers si riche et si intéressant, et surtout, ce fut un plaisir de faire la connaissance du jeune Haymitch, même si on aurait préféré que cela se fasse dans d’autres circonstances … J’ai également beaucoup aimé rencontrer petit à petit d’autres personnages que nous retrouvons dans la trilogie originelle, on comprend bien mieux certaines choses maintenant. Mention spéciale à la toute jeune Effie : je ne m’attendais pas du tout à ce qu’elle apparaisse de cette manière, et cela la rend encore plus sympathique également ! J’espère que l’autrice nous proposera d’autres hors-séries de ce genre, je suis sûre qu’il y a encore des tas de personnages secondaires sur lesquels se concentrer pour nous offrir un tableau toujours plus complexe de l’histoire que nous connaissons déjà !

mercredi 5 février 2025

Les clans du ciel, tome 1 : La quête d'Ellie - Jessica Khoury

Les clans du ciel1, Jessica Khoury

La quête d’Ellie

 Editeur : Bayard jeunesse

Nombre de pages : 374

Résumé : Alors qu’elle participe à un concours pour devenir apprentie chevaleresse, Ellie, une Moineau, rencontre le Corbeau Nox, un voleur. Malgré leurs différences, tous deux doivent s’unir pour rejoindre Thelantis, la capitale du royaume. Les voilà qui s’envolent pour une aventure pleine de magie, mais aussi de dangers. Car les gargouilles, ces monstres venus du ciel, ne sont jamais très loin…

 

- Un petit extrait -

« Je veux un autre monde, dans lequel les rois se soucient du bien-être de leur peuple, et où les règles sont faites pour aider les gens à s’élever, pas pour les oppresser et les écraser.  »

- Mon avis sur le livre -

 Trop souvent, les auteurs de littérature jeunesse s’imaginent qu’il suffit de divertir les enfants, de leur faire aimer l’histoire : je ne dis pas que c’est faux, mais j’estime que c’est insuffisant. Pour moi, un bon livre pour enfant ou jeune adolescent doit non seulement plaire au jeune lecteur, mais aussi le faire grandir. Lui faire prendre conscience que le monde est bien plus vaste que son petit quotidien, et que la vie est plus complexe que ce qu’il pouvait imaginer jusqu’alors. Tout le monde s’accorde pour dire qu’un héros de roman, s’il est bien construit et qu’il vit des aventures dignes de ce nom, évolue au cours de son parcours ; la force d’un roman, c’est de permettre au lecteur de tirer lui aussi les mêmes leçons que ce héros, mais sans avoir à risquer sa vie pour cela. Ce que j’aime donc, ce sont les romans jeunesse qui ne prennent pas les petits lecteurs pour des idiots, mais bien comme de petits héros « de la vraie vie » en devenir, à qui il faut offrir l’opportunité de mûrir grâce à sa lecture.

Et sur ce point-là, ce roman a tout bon. L’autrice nous plonge au cœur d’un univers qui, au premier abord, fait rêver : des humains-oiseaux, n’est-ce pas féérique au possible ? Je pense qu’on est nombreux à s’être déjà demandé ce que cela ferait, de pouvoir s’envoler, s’extirper de la pesanteur, être parfaitement libre d’aller dans toutes les directions, de danser avec le vent, de prendre de la hauteur. J’ai donc trouvé l’idée vraiment sympathique, et assez originale car je n’ai pas le souvenir d’avoir déjà croisé ce genre de « croisement » dans une lecture ! Mais pour moi, la grande force de cet univers est ailleurs : derrière ce côté un peu féérique se cache une réalité sociale (sociétale ?) bien plus compliquée, bien moins réjouissante d’ailleurs. Des castes supérieures, des castes inférieures. Des destins bien tracés pour les uns ou les autres, sans possibilité de s’échapper de cet ordre bien établi pour s’élever plus haut que sa « condition » de naissance : si tu es né Moineau, on estimera que tu es condamné à être paysan, que tu es « fait » pour cela et pour rien d’autre. Et bien évidemment, aucun membre d’un Clan « supérieur » ne s’abaissera à faire quelque chose d’aussi dégradant, alors que le simple fait d’être né Faucon fait de vous un noble.

Et voici qu’Ellie, une jeune Moineau, orpheline de surcroit, est bien déterminée à prouver sa valeur et à devenir une Aile d’Or, une super-sentinelle des cieux. Jamais aucun enfant d’un Clan inférieur n’a revêtu l’uniforme de ce corps d’élite. Il faut dire que jamais aucun enfant d’un Clan inférieur n’a essayé de participer aux courses de sélection : le règlement ne l’interdit pas, mais « cela ne se fait pas ». De toute manière, un Moineau, c’est trop fragile pour porter l’épée, pas assez endurant, pas assez rapide, trop petit, trop … inférieur. Mais Ellie refuse de laisser qui ou quoi que ce soit la décourager. Déterminée, et même obstinée, la fillette est prête à tout pour réaliser son rêve … Ellie est tellement attachante, tellement adorable, qu’on lui souhaite de réussir, même si en tant qu’adulte, je pressentais que les choses n’allaient pas être aussi simples, et j’avais donc beaucoup de peine par anticipation pour elle. Car c’est vraiment une enfant avec un cœur d’or, qui ne désire rien d’autre que de faire le bien, que de rendre la vie plus sure et plus belle pour tout le monde. J’ai aimé sa candeur, sa naïveté, son altruisme, son dévouement : elle représente ce qu’il y a de meilleur dans la nature humaine …

Mais nous ne le savons que trop bien : dans la vie, le meilleur côtoie le pire. Et c’est le jeune Nox qui se fait en quelque sorte le dépositaire de la noirceur de l’existence. Né dans un Clan brisé, un Clan déchu, un Clan qui n’a même plus le statut de Clan, il est encore plus inférieur que n’importe quel membre d’un Clan inférieur. Il fait partis des rebuts parmi les rebuts, des moins que rien, aux côtés de ceux qui souffrent de la terrible « lépraille » que l’on parque dans des « camps » de fortune, de ceux que les plus grands de son monde souhaitent garder bien caché, le plus loin possible d’eux. Car la misère, quand on fait partie des nantis, on ne veut pas la voir. Par pure indifférence, par mépris, voire même pour certains … par profit. Certains sont prêts à tout pour assouvir leur soif de richesse ou de pouvoir, y compris à exploiter la misère des plus petits, des plus fragiles, des plus désespérés … Nox est un jeune homme désabusé, profondément blessé par la vie, qui a tellement côtoyé la noirceur qu’il est incapable de voir la lumière. Si Ellie est attachante, Nox est touchant : on sent bien que derrière ses airs de voyous sans foi ni loi se cache un cœur sensible et torturé, et on espère vraiment qu’il retrouvera un jour un peu d’espoir …

Et comme on peut s’en douter, nos deux héros vont … se rencontrer. Et bien sûr, ça fait des étincelles : même si ce roman est bien plus profond qu’il ne peut en avoir l’air au premier abord, on reste dans un roman destiné en premier lieu à des jeunes lecteurs de 9 à 12 ans. Donc ça se crêpe le chignon, ça n’est jamais d’accord, ça s’envoie des noms d’oiseaux à la figure (presque littéralement, sur le coup), ça boude, ça se réconcilie pour recommencer trois heures plus tard … C’est vraiment le petit côté léger de toute cette histoire, leur relation, même si on voit venir la super belle histoire d’amitié à des kilomètres à la ronde. Mais voilà, même si c’est prévisible, j’aime toujours ces duos « mal assortis » et pourtant si complémentaires : c’est souvent bien plus intéressant à suivre que des amis « fusionnels » qui se ressemblent comme deux gouttes d’eau. Là, chacun est invité à se confronté à la vision de l’autre, ce qui aide le lecteur à en faire de même (surtout qu’il se sentira, de base, plus « proche » de l’un ou de l’autre). Face à toutes les embûches qui se dressent sur leur chemin, ils vont réagir différemment, et c’est souvent en trouvant une voie médiane entre leurs deux positions qu’ils parviennent à s’en sortir. Ils forment une bonne équipe, non pas parce qu’ils pensent pareil, mais justement parce qu’ils finissent par accepter que c’est normal de ne pas toujours penser pareil.

Je pense que je pourrais continuer à vous parler de ce premier opus pendant des heures et des heures ! D’un côté, c’est vraiment un récit d’aventure palpitant, avec beaucoup de rebondissements, le genre de roman qui se dévore d’une traite car il arrive toujours une nouvelle péripétie à nos héros et qu’on a terriblement envie de savoir comment ils vont pouvoir se sortir de ce nouveau mauvais pas … Et de l’autre, c’est aussi un roman qui véhicule pas mal de choses, qui illustre sans les nommer les inégalités sociales et les injustices qui en découlent, qui dénonce également l’indifférence et l’égoïsme des plus « grands » qui ne voient que leurs privilèges à conserver coute que coute (même si cela nécessite de laisser des gens souffrir), sans oublier l’hypocrisie et la jalousie qui gangrènent les relations entre les individus … Vraiment, je suis sous le charme, j’ai très envie de découvrir la suite de la saga, et je vous la conseille à 100 000% !