mercredi 29 avril 2020

Iskari, tome 2 : Le combat des âmes soeurs - Kristen Ciccarelli


Iskari2, Kristen Ciccarelli
Le combat des âmes soeurs

Editeur : Gallimard jeunesse
Nombre de pages : 415

Résumé : Roa, héritière de la Maison des Chants et reine de Firgaard, a juré de défendre les peuples de la Terre des Brousses. Elle a levé une armée pour le jeune roi Dax en échange de son soutien. Mais son époux manque à sa parole. Roa se sent trahie et isolée alors que le lien magique qui l'unit à sa sœur faiblit. Seul le couteau de la tisseuse de Ciel, une légende ancienne, pourrait l'aider à sauver à la fois sa sœur et son peuple...






- Un petit extrait -

« Voici ce que ça faisait d’avoir perdu sa sœur … C’était tendre la main dans la nuit pour ne trouver que les couvertures aplaties, vides et froides. C’était l’histoire qu’elle ne raconterait jamais et le secret qu’elle ne chuchoterait jamais sous les couvertures. C’était le rire qu’elle n’entendait plus. Et la douleur qui ne s’arrêtait jamais. Et le vide qui ne pourrait jamais être comblé. […] C’était se réveiller d’un cauchemar et se tourner vers celle qui l’aidait toujours à se rendormir en lui chantant une chanson, pour s’apercevoir qu’elle était seule dans le noir. Seule dans le noir pour toujours. Voilà ce que ça faisait d’avoir perdu sa sœur. »

- Mon avis sur le livre -

J’espère ne pas être la seule, mais ça m’arrive fréquemment, lorsque j’entre dans une librairie en me disant « je n’achète que celui que je suis venue chercher », de sortir finalement avec un, ou deux, voire parfois trois, livres imprévus en plus … Et pourtant, c’est promis, j’essaye d’être raisonnable ! Mais voilà, j’avais lu le premier tome il y a quelques semaines, je l’avais adoré, donc quand j’ai vu le second opus sur la même étagère que le nouveau tome de La guerre des clans que je venais acheter, je n’ai pas pu m’empêcher de le prendre par la même occasion ! Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il n’a pas fait long feu : moins d’un mois dans la PAL, presque un record pour un livre qui n’est pas un service presse ! Exceptionnellement, je n’ai pas relu le premier opus avant de me plonger dans Le combat des âmes sœurs, déjà parce que ma lecture était plutôt récente, et aussi parce que l’autrice les présente comme des livres compagnons, pouvant être lus indépendamment l’un de l’autre. Et c’est plutôt vrai, même si j’étais bien contente d’avoir lu le premier, l’histoire ayant tout de même lieu après les événements relatés dans Asha, tueuse de dragons !

Roa, héritière de la Maison des Chants, a aidé le prince Dax et sa sœur Asha à destituer le Roi Dragon pour lui prendre son trône. En échange, elle demande à celui qui est devenu son mari de lever les sanctions qui pèsent sur le peuple de la Terre des Brousses. Mais Dax, nouvellement couronné, ne tient pas les promesses qu’il a faites à sa reine … Cette trahison attise la colère de Roa, qui a déjà bien des choses à reprocher au Roi, en particulier la mort de sa sœur jumelle, Essie. Car le lien qui continue à les relier, le lien qui empêche Essie de quitter définitivement le monde des vivants pour rejoindre celui des esprits, faiblit progressivement au fil des années … La jeune femme décide donc de faire d’une pierre deux coups : retrouver son double et se débarrasser du parjure. Pour cela, elle part en quête d’un légendaire couteau, celui de la Tisseuse de Ciel. Mais pour parvenir à ses fins, elle va devoir nouer de nouvelles alliances, sans savoir si celles-ci seront honorées ou non …

Je dois l’avouer, au début, j’étais plutôt triste à l’idée qu’Asha et Torwin ne soient plus au cœur de l’histoire : non seulement je m’étais attachée à eux, mais en plus j’étais plutôt perplexe quant à l’idée de changer de personnages principaux en cours de saga. D’autant plus que Roa ne m’avait pas laissé une très bonne impression dans le premier opus …  Et c’est justement là toute la magie de ce nouveau tome : nous faire découvrir cette jeune femme sous un jour nouveau, avec un regard nouveau. Et alors, on se rend compte qu’elle est bien moins détestable que ce l’on pouvait penser jusqu’à présent. C’est même tout le contraire : elle s’avère tout aussi attachante, si ce n’est plus, qu’Asha ! Roa, c’est une jeune femme esseulée : sa sœur jumelle est morte, et elle a tourné le dos à son fiancé pour épouser l’homme qu’elle haït le plus au monde, pour sauver son peuple de la misère. Mais son mari ne tient pas ses promesses, et elle est plus désespérée que jamais. Désespérée au point de songer à commettre l’impensable, pour sauver la seule personne qui ne l’ait jamais abandonnée : Essie. Sa sœur, enfermée dans le corps d’un faucon depuis sa mort, car son esprit n’a pas voulu la quitter. Essie, morte à la place d’un autre : c’est bien cela qui donne l’idée à Roa de rétablir l’ordre de choses en échangeant l’âme de sa sœur et celle de celui qui aurait dû mourir ce jour-là …

Mais on a beau comprendre la terrible douleur de Roa, qui peine à faire son deuil, on a beau comprendre également sa légitime colère face à cet homme qui piétine allégrement ses engagements pour se plier aux exigences d’un Conseil refusant de perdre une miette de privilèges, on ne peut s’empêcher de se demander si Dax mérite le funeste sort qui l’attend si Roa parvient à mettre la main sur ce légendaire couteau. Dax est vraiment un personnage insaisissable, incernable : déjà dans le premier tome, j’oscillais entre la haine et l’amour à son égard. Tantôt il apparait comme un monstre sans cœur, qui renie sans le moindre remord ses promesses, tantôt il apparait comme un jeune homme sensible, qui ne veut que le meilleur pour son royaume. Plus généralement, c’est vraiment difficile, dans cette saga, de savoir à qui faire confiance, de qui se méfier : entre machinations et trahisons, entre complots et manipulations, nul ne dévoile jamais ses véritables objectifs, ses véritables forces et faiblesses. Et ça, j’aime beaucoup : on se laisse mener par le bout du nez, on tente d’anticiper mais on se laisse surprendre d’un bout à l’autre du récit … Du génie, vraiment !

En bref, vous l’aurez bien compris, ce second opus est clairement à la hauteur du premier ! Je dois reconnaitre toutefois avoir eu un peu de mal à m’immerger dans le récit : l’histoire est un peu longue à se mettre en place, et il faut attendre une bonne centaine de pages pour comprendre où on va. Mais une fois l’intrigue lancée, rien à redire : c’est palpitant, captivant et même émouvant. Car Roa va devoir faire des choix, va devoir faire le bon choix, celui avec lequel elle arrivera à vivre. Et c’est déchirant, car parfois, le bon choix, c’est aussi se sacrifier, sacrifier son propre bonheur. Faire le bon choix, c’est parfois renoncer. Et derrière ces jeux de pouvoir, derrière ces ribambelles de machinations qui s’entremêlent, derrière les doutes et les trahisons, se cache finalement une magnifique histoire d’amour. Un amour plus fort que tout, qui résiste à tout, même à la mort. Surtout à la mort. Sachez-le : après avoir tremblé d’inquiétude et d’effroi pendant une bonne partie du récit, vous allez probablement verser quelques larmes (voire même plus si vous êtes aussi sensibles que moi) ! Ce fut donc une belle lecture, et je n’ai maintenant plus qu’une seule hâte : que le troisième et dernier opus sorte en France ! Avec ce questionnement : de qui va-t-il être question cette fois-là ?

dimanche 26 avril 2020

Top 5 : Vos opinions impopulaires


- Top 5 : Vos opinions impopulaires -

C’est le retour des tops ! Et cela grâce à Mange-Nuages qui a mis en place un petit challenge/jeu que je vous invite à retrouver sur Livraddict ! Un thème par semaine, rien de plus simple, d’autant plus que j’ai décidé de faire ceci sous forme de mini-article pour ne pas me surcharger … C’est l’heure de répondre au thème de la semaine que voici :

Vos opinions impopulaires

Cette semaine, parlez-nous de ces livres que vous semblez être seul.e.s à avoir aimé... Ou détesté. Seul.e.s contre toutes ? C'est ce qu'on va voir !

Et voici donc mon petit top 5 :

Twilight de Stephenie Meyer
En troisième, pressée de toutes parts par mes camarades de classe, y compris celles qui détestaient lire mais a-do-raient cette saga dont absolument tout le monde parlait, j’ai emprunté le premier tome au CDI. Echec total. C’était plat, insipide, creux, mal écrit. Impossible de comprendre cette fascination pour ce ramassis de vide.

Antigone de Jean Anouilh
Je l’ai lu pour les cours de français, et si je n’ai pas détesté, on peut clairement dire qu’il m’a laissée complétement et parfaitement indifférente. Je ne comprends pas l’engouement pour cette pièce, elle n’a à mes yeux rien de plus par rapport à d’autres tragédies. Je n’y trouve ni poésie ni grandeur particulière, c’est juste une pièce de théâtre comme une autre.

Roméo et Juliette de William Shakespeare
Pareil, je ne dis pas que c’est mauvais, mais je ne comprends pas non plus pourquoi tout le monde s’extasie sur cette histoire d’amour. Les personnages sont agaçants au possible, les dialogues sont clichés à souhait, et l’intrigue n’a rien d’exceptionnel, donc c’est comme juste avant : c’est une belle pièce de théâtre parmi les autres, mais elle ne se démarque pas.

Le Clan des Otori de Lian Hearn
Je n’avais lu que le premier tome à la bibliothèque, et je n’étais pas allé plus loin. J’avoue ne plus me souvenir avec certitudes pourquoi (il ne m’a laissé aucun souvenir), mais je n’avais clairement pas accroché. Il me semble que j’avais trouvé ça trop confus, trop « maniéré » à force de vouloir être poétique, donc bon, ça m’avait laissé de marbre.

Tara Duncan de Sophie-Audouin Mamikonian
Certes, la saga a une moyenne honorable sur Livraddict, mais en général, quand j’en entends parler, c’est plutôt négatif : il est dit que c’est cliché, banal, que ça part trop dans tous les sens, que l’humour est lourd … Pour ma part, rien n’éteindra jamais l’amour profond que je ressens pour cette saga, drôle et captivante, originale et passionnante !

samedi 25 avril 2020

Five feet apart - Rachael Lippincott, Miki Daughtry et Tobias Iaconis


Five feet apart, Rachael Lippincott, Mikki Daughtry et Tobias Iaconis

Editeur : Albin Michel
Nombre de pages : 306
Résumé : Depuis son plus jeune âge, Stella a l'habitude de tout contrôler. Surtout à l'hôpital, où ses poumons défaillants l'envoient régulièrement. Traitement, régime, suivi médical, rien n'échappe à son organisation. Tout l'inverse de Will, qui n'attend qu'une chose : avoir dix-huit ans, sortir d'ici et vivre enfin. Ils n'ont rien en commun, en dehors de leur maladie, celle-là même qui leur impose une distance de trois pas à tout instant. Peut-on vraiment aimer quelqu'un sans jamais l'approcher ?

- Un petit extrait -

« Quand on a la mucoviscidose, on ne sait jamais combien de temps il nous reste. Mais finalement, on ne sait pas non plus combien de temps il reste à ceux qu’on aime.  »

- Mon avis sur le livre -

Si je devais trouver un seul véritable défaut à ce livre, c’est bien d’avoir été vendu avec une jaquette reprenant l’affiche du film … Je ne supporte ni les jaquettes ni les fameux bandeaux rouges : c’est super fragile, ça glisse tout le temps, et ça ne sert absolument à rien (à part, peut-être, servir de marques pages d’urgence). Et quand en plus, il y a l’affiche du film alors que je viens acheter un livre, ça m’exaspère encore plus. Alors certes, dans ce cas bien précis, le roman est la novélisation du scénario, et est donc lié au film mais … il n’empêche, je peux vous affirmer que la jaquette a valsé à la seconde même où je l’ai acheté ! D’autant plus que la couverture « normale » est à mes yeux bien plus jolie, bien plus puissante, que celle du film ! C’est elle qui m’a donné envie de regarder le résumé, qui m’a lui-même convaincu d’acheter aussitôt ce livre … Je savais que j’allais probablement pleurer toutes les larmes de mon corps, mais ça faisait tellement longtemps que je n’avais pas croisé le chemin d’une petite romance qui m’attirait autant ! 

Stella a dix-sept ans, et ça fait déjà onze ans qu’elle arpente régulièrement les couloirs de l’hôpital Sainte-Grâce : atteinte de mucoviscidose, la jeune fille vit au rythme sporadique de ses poumons défaillants, et la moindre petite toux ou fièvre la conduit irrémédiablement à de longues semaines d’hospitalisation. Mais Stella ne se plaint pas : elle sait que si elle respecte scrupuleusement les protocoles, que si elle suit scrupuleusement ses traitements, elle pourra prétendre à une greffe de poumon qui lui accordera cinq belles années de répit. Will, bientôt dix-huit ans, est trimballé d’hôpitaux en cliniques depuis qu’une bactérie résistante aux antibiotiques s’est installée dans ses poumons déjà envahis par le mucus. Mais sa mère, combattante pour deux, l’oblige à participer à tous les tests possibles et inimaginables dans l’espoir d’éradiquer cette saloperie qui l’empêche de prétendre à la greffe. Mais Will n’en peut plus de tous ces médicaments, de toutes ces interdictions : il veut vivre, vivre le temps qui lui reste, découvrir le monde et non pas uniquement les panoramas offerts par les toits des hôpitaux … Le voici arrivé à Sainte-Grâce, où il croise la route de Stella …

Outre l’ambiance Nos étoiles contraires, ce qui m’a attirée dans ce roman, c’est bien le fait qu’il y soit question de la mucoviscidose : lorsque j’étais enfant, j’étais copine avec une petite fille qui souffrait de cette maladie, mais j’étais à l’époque bien trop petite pour comprendre véritablement ce qui se cachait derrière ce nom imprononçable. Et puis, un déménagement nous a séparées, et je n’ai jamais véritablement cherché à en savoir plus que cela, puisque ce que je retenais d’elle, c’était bien plus ses doigts de fées qui nous faisaient des coiffures extraordinaires que ses toux chroniques … Mais je me rend maintenant compte que c’est une maladie que tout le monde connait de nom, mais qu’on croise finalement très rarement dans la littérature ou le cinéma, et j’étais ravie de tomber enfin sur un roman traitant de cette maladie. Et j’en suis d’autant plus ravie désormais que j’ai appris énormément de choses : c’est un livre très bien documenté qui n’idéalise pas la maladie, mais ne la diabolise pas non plus. J’ai apprécié la justesse qui se dégageait de l’histoire : on le sent, le quotidien de Stella, Will et Poe est parfaitement semblable à celui de tous les jeunes atteints de mucoviscidose. Un quotidien rythmé par les nombreux médicaments, par le port d’un gilet qui fluidifie le mucus, par l’espoir de pouvoir bénéficier enfin d’une greffe … et par la sacro-sainte règle des trois pas d’écarts entre eux pour éviter le risque des infections croisées.

Et c’est bien cette règle qui va gâcher la vie de nos deux jeunes héros, qui n’ont bien évidemment rien trouvé de mieux que de tomber amoureux l’un de l’autre malgré toutes leurs différences. On le voit venir à des kilomètres à la ronde, ce coup de foudre tragique et impossible, mais c’est précisément ce qu’on vient chercher en se plongeant dans ce genre de livre. Mais le moins que l’on puisse dire, c’est que je ne m’attendais tout de même pas à une histoire aussi forte, aussi puissante, que celle que l’autrice et les scénaristes m’ont offert avec Five feet apart. Dès les premiers chapitres, on comprend que nos deux tourtereaux ne voient pas la vie et la maladie de la même manière : elle veut survivre à tout prix pour protéger ses parents qui se remettent déjà difficilement d’une tragédie, lui considère que tous ses essais sont une perte de temps puisque la bactérie est increvable et souhaite croquer à pleines dents le peu de temps qui lui reste plutôt que de s’enfermer dans des hôpitaux. On s’y attend, leur rencontre est explosive … Mais petit à petit, chacun va finir par comprendre le point de vue de l’autre. Voire même par se laisser convaincre du bien-fondé de l’opinion de l’autre … Et c’est alors que le drame peut survenir.

Car ne nous mentons pas : c’est une belle histoire d’amour bien romantique, bien sûr, mais c’est avant tout une histoire d’amour entre deux jeunes, malades, aux poumons défaillants, que le moindre échange de bactérie peut condamner. A partir du moment où ils commencent à flirter avec la règle des trois pas, on commence à craindre le pire. Et le pire arrive, mais pas de la façon dont on l’attendait. On passe littéralement des rires aux larmes. Certains passages sont tout simplement déchirants, et d’une injustice révoltante. Car la vie est parfois terriblement injuste. Stella nous le dit bien : « Ça fait longtemps que je me suis faite à l’idée de mourir. Je sais que ça va arriver. C’est l’issue inéluctable avec laquelle j’ai toujours vécu. En revanche, je n’ai jamais été préparée à la perte ». Car derrière cette jolie histoire d’amour se cache finalement un vrai questionnement sur la vie, la maladie, l’amour, la mort, le deuil, la culpabilité, et j’en passe. Tout ce qui occupe les pensées quotidiennes de ces jeunes qui se savent en sursis, mais aussi de tout individu finalement, chacun à sa manière. Et alors, on se sent terriblement proche de Stella et Will, quand bien même on ne souffre pas de la même manière qu’eux, quand bien même nos poumons fonctionnent correctement. On se sent si proches d’eux qu’on souffre avec eux. Et, peut-être, on surmonte la douleur avec eux.

En bref, vous l’aurez bien compris, j’ai eu un véritable coup de foudre pour cette magnifique histoire d’amour, aussi émouvante que déchirante. Stella et Will sont deux personnages particulièrement attachants, on aimerait pouvoir leur offrir le bonheur de s'aimer sans restriction, mais on sait que c'est impossible s'ils veulent rester en vie ... J’ai eu beaucoup de peine pour eux, mais surtout, j’ai admiré leur courage face à ce qu’ils savent être l’inéluctable. J’ai également été très émue par l’histoire de Barb, l’infirmière, qui peut apparaitre si stricte et insensible au premier abord … Rachael Lippincotta vraiment su magnifier le scénario que lui ont confié Mikki Daughtry et Tobias Iaconis, et je n’ai maintenant plus qu’une envie : découvrir le film. Pour retrouver Will et Stella, pour les découvrir autrement. Et pour pleurer, une fois de plus, face à cette histoire vraiment sublime, d’une puissance rare, que je conseille donc à tous ceux et toutes celles qui ont apprécié Nos étoiles contraires ou Everything, everything, mais plus globalement encore à ceux et celles qui ont envie de se laisser attendrir par une jolie romance mignonne à souhait. Parce qu’on a tous besoin de réconfort de temps en temps, et aussi étonnant que cela puisse paraitre, Stella et Will peuvent vous l’apporter !

mercredi 22 avril 2020

L'héritage des rois-passeurs - Manon Fargetton


L’héritage des rois-passeurs, Manon Fargetton

Editeur : Bragelonne
Nombre de pages : 376
Résumé : Ombre, univers peuplé de magie, et Rive, le monde tel qu'on le connaît, sont les deux reflets déformés d'une même réalité. Enora est unique : elle peut traverser d'un monde à l'autre. Lorsque sa famille est brutalement décimée par des assassins masqués, elle se réfugie au seul endroit où ses poursuivants ne peuvent l'atteindre. Au royaume d'Ombre, sur la terre de ses ancêtres. Là-bas, Ravenn, une princesse rebelle, fait son retour après neuf ans d'exil passés à chasser les dragons du grand sud. Sa mère, la reine, est mourante. Ravenn veut s'emparer de ce qui lui revient de droit : le trône d'Ombre. Et elle n'est pas la bienvenue.

- Un petit extrait -

« Ravenn eut un sourire dubitatif. Elle ne croyait pas les gens capables de changer. Que des personnalités évoluent, que certaines facettes se développent au détriment d'autres, que des objectifs différents se révèlent avec le temps, pourquoi pas. Mais un changement véritable ? Non.  »

- Mon avis sur le livre -

J’ai très longtemps été une lectrice solitaire, qui dévorait livres sur livres dans son coin sans jamais en parler avec personne, sans jamais chercher à savoir ce que d’autres lecteurs pensaient de ces romans : je lisais, j’aimais, je n’aimais pas, et c’était tout. Et puis, j’ai découvert Livraddict et la blogosphère, et je suis enfin sortie de ma coquille : j’ai commencé à échangé avec d’autres lecteurs, j’ai ouvert mon blog … Et depuis quelques mois, je m’essaye aux lectures communes, et le moins que l’on puisse dire, c’est que j’adore ça (même si j’ai encore bien du mal à caler mon rythme de lecture avec celui de mon ou mes coéquipiers de lecture) ! C’est tellement sympathique de pouvoir échanger au fil de la lecture, partager nos impressions, questionnements, débattre sur tel ou tel point … Je pense vraiment que je n’aurai pas autant savouré ce roman si je ne l’avais pas lu en lecture commune ! Car désormais, il sera toujours associé au souvenir de ces conversations passionnées !

Le monde d’Enora éclate en morceau le jour de ses vingt ans : toute sa famille – frère jumeau compris – est massacrée par des assassins masqués, elle apprend l’existence d’un monde parallèle au nôtre et découvre par la même occasion qu’elle a le don d’ouvrir des passages entre les deux univers. Elle se réfugie alors au royaume d’Ombre avec Julian et Charly, deux frères l’ayant sauvé des griffes de l’Ordre, et fomente désormais sa vengeance : ceux qui ont tué les siens mourront. Mais il ne fait pas bon être la descendante du dernier Roi-Passeur en Ombre, et Enora devra ici aussi lutter pour rester en vie … Pendant ce temps, la princesse Ravenn, qui avait été exilée du royaume bien des années auparavant, revient afin de faire valoir ses droits d’héritière. Mais son retour et sa détermination à s’emparer du trône contrarient grandement son père, les magiciens et les prêtres, qui avaient déjà tout prévu afin de récupérer le pouvoir, pour l’instant transmis de mère en fille … Les deux jeunes femmes ne le savent pas encore, mais leurs destins sont liés, et c’est ensemble qu’elles combattront pour atteindre leurs objectifs respectifs …

Cela faisait tellement longtemps que ce roman dormait sur mes étagères (j’ai d’ailleurs un affreux trou de mémoire et suis totalement incapable de me souvenir comment et pourquoi il est dédicacé à mon nom alors que je n’ai encore jamais rencontré l’autrice) que je n’avais plus aucun souvenir du résumé … Pour moi, c’était juste un roman de fantasy écrit bien trop petit pour mon bien, mais qui m’intriguait chaque jour un peu plus. Vous imaginez donc ma surprise quand Enora a débarqué en moto, dans ce qui ressemblait trait pour trait à notre monde ! Plusieurs fois, j’ai vérifié que je ne m’étais pas trompée de livre, jusqu’à ce que notre pauvre Enora (qui, le jour de son anniversaire, se retrouve orpheline et privée de son frère jumeau) découvre l’existence d’Ombre, monde parallèle au nôtre, où va finalement se dérouler la majorité de l’intrigue. Autant le dire tout de suite, j’ai été conquise par cette idée d’univers miroirs, et plus encore par le principe des Noirs-Portraits : « pour chaque personne née en Ombre, une autre voit le jour en Rive », et ces deux individus sont liés, leurs parcours de vie seront similaires malgré les différences entre les mondes, et le jour où l’un d’eux vient à mourir, l’autre mourra également … J’aime vraiment beaucoup cette façon de lier inexorablement les deux mondes !

Plus globalement d’ailleurs, j’ai beaucoup aimé ce roman. Quelques détails ont éloigné le coup de cœur, j’y reviendrais tout à l’heure, mais le moins que l’on puisse dire, c’est qu’à chaque fois que j’ouvrais le livre, celui-ci me captivait tant et bien que je ne voyais plus le temps passer … Je me suis ainsi retrouvé bloquée sur la première marche de l’escalier, car je voulais « terminer le paragraphe » avant de monter, mais ai finalement lu plusieurs chapitres d’affilée (jusqu’à ce que petit frère ait besoin de monter) ! J’avais ce besoin irrésistible de savoir ce qui allait arriver aux personnages, car je me suis vraiment attachée à eux et craignais profondément pour leur vie : Ravenn a beau être rebelle et rusée, il y a tellement de personnes qui fomentent contre elle qu’on a vraiment peur que l’une d’elles parvienne finalement à l’atteindre, et Enora est tellement dévorée par le chagrin et la vengeance qu’on a peur qu’elle ne se méfie pas assez des dangers qui l’entourent … Et puis il y a le petit Lïam, Charly et Julian, que j’ai vraiment beaucoup aimé également. Ce que j’aime beaucoup, finalement, c’est qu’il n’y a ni véritable héros ni grand méchant, uniquement des hommes avec leurs qualités et leurs défauts, leurs forces et leurs faiblesses : ils sont nuancés, ils sont faillibles, et cela ne les rends que plus attachants encore !

Mon seul véritable regret, finalement, c’est le manque de surprise et d’enjeu : plus le temps passait, plus la mise en place s’éternisait, et plus le dénouement devenait prévisible … J’aurai vraiment aimé que l’autrice aille plus loin que le simple couronnement de Ravenn, plus loin que la quête de vengeance d’Enora : ça, on s’y attend depuis le tout début. Lorsque j’ai tourné la dernière page, les mots « tout ça pour ça ?! » m’ont traversé l’esprit. C’est un peu comme gravir longuement et douloureusement une montagne, pour tomber sur un mur qui bouche la vue : tant d’efforts pour si peu de résultats. Tant de pages pour une histoire qui me laisse tout de même sur ma faim, alors que j’ai pris tellement de plaisir à la dévorer. Je quitte les personnages, ces amis de quelques jours, avec un douloureux sentiment d’inaccompli, comme si leur histoire était terminée alors qu’elle ne fait finalement que commencer. C’est un déchirement tel que j’ai cru qu’il manquait une bonne centaine de pages à mon exemplaire : ça ne peut pas se terminer comme ça, alors qu’il y a encore tellement de questions en suspens ! J’espère vraiment que Les Illusions de Sav-Loar, que je compte me procurer lors des Imaginales, m’apporteront quelques éléments de réponse !

En bref, vous l’aurez bien compris, ce fut une très belle lecture, mais pas un coup de cœur, la faute à une intrigue qui met du temps à se mettre en place et à un dénouement un peu trop prévisible. Je suis tombée sous le charme de l’univers créée par l’autrice, et plus encore sous celui des personnages, et ce fut un tel plaisir que de les accompagner dans leurs quêtes respectives (qui finissent par se rejoindre et s’entremêler, parce que, finalement, nous sommes tous liés les uns aux autres) ! La plume de Manon Fargetton est vraiment belle, c’est un véritable régal ! A travers ce roman, l’autrice explore la question du pouvoir, de l’injustice aussi. Elle nous raconte également une belle histoire d’amour et d’amitié, de courage et de confiance. C’est un récit riche en actions, en rebondissements, mais plus riche encore en émotions : on est tellement immergé dans l’histoire que notre cœur vibre à l’unisson avec ceux des personnages, et on souffre quand ils souffrent, on exulte quand ils exultent, on doute quand ils doutent. Tant et si bien qu’on en oublie tout le reste, qu’on en oublie même nos réserves sur l’intrigue, car une seule chose compte finalement : marcher à leurs côtés, et vivre par procuration toutes leurs aventures. Un beau récit de fantasy que l’on ferme avec une bonne pointe de tristesse car c’est déjà fini …