samedi 27 juillet 2019

Demain les hommes - Valentin Auwercx


Demain les hommes, Valentin Auwercx

Editeur : Autoédition
Nombre de pages : 133
Résumé : Il l’avait marqué d’une croix rouge sur son bras numérisé, Charly Leers avait attendu ce jour toute sa vie. C’était le 2 janvier 2112 qu’il allait réaliser son plus grand rêve – celui de toucher le pactole, celui d’être riche. Mais il ne se doutait pas qu’après avoir tout gagné, il allait tout perdre au cours de cette même journée.
Quand l’Homme le plus puissant du monde décide d’appuyer sur l’interrupteur, c’est toute l’Humanité qui se retrouve plongée dans le noir.

Un grand merci à Valentin Auwercx pour l’envoi de ce volume et à la plateforme SimPlement pour avoir rendu ce partenariat possible.

- Un petit extrait -

« Non, personne ne croyait la fin possible, là était le véritable danger.
Quand l’Homme vomissait son quotidien sur la planète, il ne voyait pas l’impact direct de son geste. Un quelconque individu montrait son déni de conscience dès la première heure d’une journée. Il se levait, allumait sa lumière fournie au nucléaire, restait 20 minutes sous la douche car ça réveille et ça détend, enfilait son 5ème pantalon de la semaine, son 8ème tee-shirt alors qu’il n’était que jeudi, utilisait des cosmétiques de torture animale, avalait un verre de jus d’oranges pressées à l’autre bout du monde, compacté dans du plastique qui finira sur le 7ème continent, ne mangeait qu’à moitié une tartine recouverte d’un chocolat saveur déforestation de masse, chaussait des baskets fabriquées par des orphelins payés à la cacahuète, de l’autre côté des océans, se blottissait dans un manteau raffiné au pétrole et montait dans sa voiture fumante de CO².
Tout le monde faisait ce genre de chose, mais tout le monde n’était qu’un petit moi qui n’était pas responsable. Ils étaient des milliards de petit moi, en participant à ce déni universel, tous se suivaient vers une fin du monde – quelle qu’elle soit »

- Mon avis sur le livre -

Il faut savoir que je suis toujours assez « sceptique » face aux préquelles et autres récits imbriqués dans l’univers d’un autre roman de l’auteur … Tout simplement parce que ces « histoires complémentaires » tombent généralement dans deux travers : soit elles présentent des incohérences avec le récit principal, soit, au contraire, pour coller parfaitement avec ce qui est raconté dans ce-dit récit principal, elles n’apportent absolument rien de nouveau. C’est un équilibre fort délicat à trouver pour les auteurs qui désirent se lancer dans ce genre de projet : raconter une histoire complète, autonome et nouvelle sans créer de contradiction avec le récit original … Je vais le dire tout de suite : Valentin Auwercx a parfaitement su trouver cet équilibre. La preuve en est qu’il n’est absolument pas nécessaire d’avoir lu Le temps d’une étoile pour comprendre cette novella, qui est donc parfaitement indépendante et autosuffisante ! Mais quel plaisir pour le lecteur du roman de découvrir cet « avant », évoqué pour poser le contexte mais suffisamment peu développé pour laisser la possibilité à l’auteur de nous le raconter dans une autre histoire …

2 janvier 2112. Cette date, Charly Leers et Dormund Portef l’attendaient avec impatience … mais pas pour la même raison. Le premier comptaient les jours qui le séparaient de son grand rêve, celui de devenir millionnaire, d’être Riche, d’être Important, d’être plus Grand que la populace qu’il regarde du haut de son immeuble. Le second, quant à lui, exulte : dans quelques heures, l’avenir tout entier de l’Humanité sera bouleversé, grâce à lui. Lui qui sait que l’Humanité court à sa perte si personne ne se dévoue pour changer drastiquement les choses. Lui qui sait que le Grand Zéro est tout proche et que, très bientôt, toute la richesse du monde ne sera plus rien, une fois que les chiffres inscrits dans les comptes en banques ne pourront plus jamais s’afficher sur aucun écran. 2 janvier 2112. Pour Charly, ce qu’il pense être le début de sa nouvelle existence. Pour Dormund, ce qu’il sait être la fin d’une ère.

Avec Le temps d’une étoile, Valentin Auwercx nous proposait une magnifique histoire d’amour, teintée d’espérance. Avec Demain les hommes, il nous propose de vivre « en direct » une terrible apocalypse programmée : celle d’une Humanité dopée à la technologie, droguée à l’argent, qui ne sait plus ce qu’est la vie. Il nous invite à faire la rencontre de deux hommes, liés par une transaction économique, mais que tout oppose. Charly est ce que j’appellerais un « homme infect ». Sa seule préoccupation au monde, c’est son compte en banque. Car il est persuadé que l’argent fait le bonheur, qu’il sera le plus heureux des hommes une fois qu’il fera partie du cercle des millionnaires. Il trompe sa femme, mais ce n’est pas sa faute, c’est elle qui ne lui consacre pas assez d’attention et ne comble pas suffisamment ses attentes insatiables. Il est égoïste et hypocrite, mais ce n’est pas sa faute, c’est la société qui l’a modelé ainsi. A ses yeux, rien n’est jamais de sa faute, il n’est responsable de rien, ce sont toujours les autres ….  

Mais ne serions-nous pas un peu comme Charly, au final, lorsque nous haussons les épaules quand quelqu’un évoque le réchauffement climatique et les mesures écologiques, en disant que « c’est inutile, il faudrait que tout le monde le fasse, pas uniquement moi ». On se dédouane en insinuant que ce sont les autres, les méchants, les autres qui refusent de faire des efforts, les autres, toujours les autres. On refuse d’admettre que l’on est tout autant coupable qu’eux … Car le gros problème, c’est que personne n’a le courage de montrer l’exemple, de faire le premier pas, d’aller à contre-courant en se détournant du mode de vie « à la mode ». A la fois parce que c’est tellement plus facile, de demander sa route au GPS saturé d’électricité nucléaire (qui n’a absolument rien d’une énergie propre comme on veut le croire … vous savez que dans plusieurs départements français, vous marchez littéralement sur des déchets radioactifs ? ou vous ne voulez pas le savoir ?) que de regarder sur une carte routière. Et parce que c’est mal vu, de ne plus être un petit mouton docile qui suit le troupeau sans se poser de question. Dans un monde où le conformisme est roi, où l’argent est souverain, où la technologie est une divinité, difficile d’être la brebis galeuse qui revient à la terre et tire la sonnette d’alarme.

Dormund, lui, a choisi l’option radicale. Tout raser pour reconstruire. Tout détruire pour recycler. Puisque personne ne veut se salir les mains, il prend sur lui la décision de mener l’Humanité vers une nouvelle ère, qu’elle n’aura pas choisi mais qu’il estime être nécessaire. C’est un homme fort complexe, difficile à cerner, que l’on perçoit tantôt comme un homme qui se prend pour un dieu, tantôt comme un homme qui sait qu’il n’est rien. La moralité de ses choix est discutable, mais il a le mérite d’agir, de ne pas rester les bras croisés à regarder le monde s’éteindre à petit feu dans l’indifférence général des Hommes abrutis par l’hyperconnexion. Bien qu’il ne soit pas le narrateur, on sent une certaine complicité, une certaine connivence, entre Dormund et ce dernier, qui ne se contente pas de raconter objectivement une histoire mais laisse transparaitre son opinion – et, je le pense, celle de l’auteur – dans ses propos. On retrouve ici le style très poétique découvert dans Le temps d’une étoile, mais il s’est teinté d’une bonne dose de cynisme et d’ironie qui met le doigt sur les choses qui fâchent … Ce court récit est bien plus engagé, bien plus contestataire que ne pouvait l’être le premier roman de l’auteur. Dans cette ambiance de fin du monde imminente, il interpelle vivement le lecteur : il n’est plus temps d’hausser les épaules en repoussant la faute sur autrui, mais bien de changer de comportement. Ici et maintenant. Avant qu’il ne soit définitivement trop tard. Car peut-être que ce jour est le dernier …

En bref, vous l’aurez bien compris, avec Demain les hommes, Valentin Auwercx nous propose un récit bref mais percutant. Au lecteur du roman Le temps d’une étoile, cette novella apporte un éclairage nouveau sur un événement relaté dans le roman : Dormund, on le connaissait déjà … mais pas de la même manière. J’ai trouvé cela très intéressant, de voir qui était réellement cet homme, comparé à la vision que les générations futures ont de lui. Mais comme je l’ai déjà dit, nul besoin de connaitre le roman pour comprendre et apprécier cette histoire ! Aux côtés de Charly et Dormund, qui n’ont rien de héros louables et attachants mais qui sont bien humains – au plus grand dépit du lecteur qui doit bien admettre avoir des points communs avec eux, même si ce n’est guère flatteur –, le lecteur se retrouve embarqué dans la plus cruelle des histoires : celle qui pourrait bien être un jour la nôtre si nous ne faisons rien. Un vrai électrochoc, à lire et faire lire !HyHul

samedi 20 juillet 2019

Ma vie de cavalière, tome 1 : Le cheval de mes rêves - S.J. Vogel


Ma vie de cavalière1, S.J. Vogel
Le cheval de mes rêves

Editeur : Autoédition
Nombre de pages : 289
Résumé : Anna est passionnée par les chevaux depuis son enfance. L'un de ses rêves est d'avoir son propre cheval. Il va se réaliser lorsque ses parents lui annoncent qu'ils vont lui en offrir un! Pour Anna, c'est le plus beau jour de sa vie! La jeune fille va commencer ses recherches et sait exactement comment devra être son nouveau compagnon. Cependant, elle va vite découvrir que le cheval de ses rêves n'est pas celui qu'elle croit.

Un grand merci à S.J. Vogel pour l’envoi de ce volume et à la plateforme SimPlement pour avoir rendu ce partenariat possible.


- Un petit extrait -
« Mon cheval et moi galopons dans des champs de blé. Le paysage est magnifique ! Les couleurs rosées dans le ciel sont sublimes. Nous sommes seuls ! Il file aussi vite que l’éclair. La brise d’été caresse mon visage, je ferme les yeux et lève les bras. Cette sensation de liberté, je ne la ressens que sur le dos d’un cheval. Je me sens si bien avec lui. J’oublie tous mes problèmes, mes responsabilités. Pendant un instant je ne pense à rien. Je me laisse aller au rythme de ses foulées. Sans selle, sans filet, il est libre d’aller où bon lui semble. Je lui fais entièrement confiance ! »
- Mon avis sur le livre -

En tant que grande amoureuse des chevaux et passionnée d’équitation – même si je ne monte plus pour le moment –, il était tout simplement hors de question que je passe à côté de ce roman ! La couverture – magnifique au demeurant – me promettait quelque chose de frais et léger, et le résumé – bien que classique – annonçait une histoire pleine de douceur et de complicité. Le livre idéal pour affronter la canicule ! Je me suis donc tranquillement installée sur le canapé, dans la ligne de mire du ventilateur, avec un chat roulé en boule à côté de moi et un autre affalé à mes pieds …. Et j’ai relevé la tête, quelques heures plus tard, toute surprise : c’était déjà terminé ! Plusieurs raisons expliquent cette brièveté, et j’y reviens très vite …

Anna a dix-huit ans et vient d’obtenir son baccalauréat avec mention. Ravie, elle l’est encore plus lorsque ses parents lui annoncent qu’ils vont lui offrir un cheval … Un cheval ! Cela fait depuis qu’elle est enfant qu’elle rêve d’en avoir un ! Car Anna n’est pas seulement une bonne élève, elle est aussi une bonne cavalière – même si elle doute de ses capacités. Accompagnée de sa meilleure amie et de son oncle, cavalier professionnel, Anna part à la recherche du cheval de ses rêves … Elle sait parfaitement ce qu’elle veut : une jument Quater Horse, entre huit et dix ans, pie noir ou pie alezan, pas trop rapide. Mais tandis qu’elle se rend dans un élevage pour rencontrer et monter deux jeunes juments correspond à ses critères, Anna croise le regard d’un magnifique hongre Appaloosa de quatre ans … Et si c’était lui, le cheval de ses rêves ?

Avec ce premier tome, l’autrice nous offre effectivement une histoire légère, sans prise de tête, qui fait passer un agréable moment de lecture. On prend plaisir à rencontrer Anna, une jeune cavalière à laquelle tous les passionnés d’équitation pourront s’identifier : quand on aime les chevaux, on a rapidement envie d’en avoir un à soi, pour créer un lien unique avec lui, pour progresser ensemble … On partage sa joie lorsque ses parents lui annoncent qu’ils vont lui en offrir un, on partage son excitation tandis qu’elle cherche celui qui va devenir son compagnon équin … et son émerveillement quand elle se retrouve face à celui qui fait battre son cœur ! Car il faut le savoir : entre les humains et les chevaux, il y a parfois de véritables coups de foudre. Les regards se croisent, et quelque chose de presque magique se passe … et alors aucun autre cheval ne trouve grâce aux yeux du cavalier, qui ne pense plus qu’à celui-ci. Et cela même si ce cheval ne correspond absolument pas aux critères qui lui semblaient indispensables jusqu’à présent !

On ne va pas se mentir : c’est une histoire vraiment classique … peut-être même trop classique pour un roman destiné aux jeunes adultes. Alors certes, Anna a dix-huit ans, va passer son permis et entrer à l’université … Mais le reste de l’intrigue évoque bien plus un roman jeunesse : une riche petite peste entourée de son fan-club qui règne sur le centre équestre, l’amourette avec le frère de la meilleure amie, le possible rachat du centre équestre par un homme d’affaire infect évité de justesse … Les réactions d’Anna elle-même font parfois penser à celle d’une jeune adolescente de 12 ans plus qu’à une jeune adulte de 18 ans ! Ajoutez à cela des dénouements aussi rapides que facile et une narration très simple, et vous comprendrez pourquoi je conseille ce roman aux jeunes cavaliers et jeunes cavalières de 8 à 12 ans plus qu’aux adolescents et jeunes adultes ! Je pense que l’autrice a mal ciblé son public, finalement : ce n’est pas grave, mais cela m’a un peu décontenancée car je m’attendais vraiment à lire un roman sur les chevaux … mais pour ma tranche d’âge ! Ici, on est plutôt dans la continuité des Grand galop – ma saga favorite d’enfance !

 En bref, vous l’aurez bien compris, j’ai trouvé cette lecture fort sympathique : elle donne le sourire, remet du baume au cœur … C’est un roman sans prise de tête, qui se lit incroyablement vite quand on est « grand lecteur », une histoire où tout est bien qui finit bien – même si c’est « trop beau pour être vrai », on sait bien que ça ne se dénoue jamais aussi facilement et rapidement dans la vraie vie. C’est un roman parfait pour l’été, quand on a juste envie de trainasser avec un bon livre … ou bien un roman parfait pour l’automne, quand la pluie et le vent nous empêche d’aller trainer aux écuries ! Mais c’est surtout un livre parfait pour les jeunes lecteurs et jeunes lectrices de 8-12 ans passionnés de chevaux et d’équitation : ils s’identifieront facilement à Anna, qui vit sensiblement la même chose qu’eux dans leur centre équestre, et pourront rêver avec elle d’avoir un jour leur propre cheval … Alors si vous avez des enfants cavaliers dans votre entourage, n’hésitez pas à leur offrir ce livre : Anna a beau être plus âgée qu’eux, je suis sûre qu’ils passeront un beau moment au triple galop en sa compagnie !

Ce livre a été lu dans le cadre du Tournoi des 3 Sorciers
(plus d’explications sur cet article)

samedi 13 juillet 2019

Les bébés flingueurs - Sébastien Gayet


Les bébés flingueurs, Sébastien Gayet

Editeur : Ex Aequo
Nombre de pages : 34

Résumé : Zack et Malouka, 10 ans, sont inséparables. Ensemble, ils décident de devenir des justiciers anonymes pour lutter contre l’égoïsme, l'intolérance ou la méchanceté. Sous le nom de code "Les Bébés Flingueurs", armé d’audace, de discrétion, d’ingéniosité et … d’une carabine à fléchettes, le duo intrépide décide de donner une bonne leçon à plusieurs personnes de leur village ! Mais leurs interventions "un peu spéciales" créent pas mal de remous. Une enquête est ouverte. Les deux enfants seront-ils démasqués?


Un grand merci  aux éditions Ex Aequo pour l’envoi de ce volume et à la plateforme SimPlement pour avoir rendu ce partenariat possible.

- Un petit extrait -

« Mais si Zack et Malouka ont décidé de donner une bonne leçon aux trois adolescents, c’est en raison de leur cruelle habitude de s’en prendre aux chats de la ville. Plusieurs fois en rentrant de l’école, les deux amis ont vu la bande jeter des pauvres chats dans l’étang du parc Millefeuilles situé derrière le stade.
— Ze ne zupporte plus de voir zes pauvres bêtes rezortir de l’eau trempées jusqu’aux oz ! se lamente Zack.
Plus grave encore, il y a quinze jours, Jojo et sa bande ont rasé le chat persan de Madame Douceur. Et hier, Monsieur Rudesku a retrouvé sa chatte tigrée peinte en rouge et vert !
— Elle était trop chou en rouge et vert, la chatte de Rudesku, ricane Jojo.
— La prochaine fois, c’est au tour du chat de la mère Chandail de passer à la casserole, renchérit Marvin.
— Et les trois chatons des Duraton, faudra pas les oublier, s’esclaffe Tanguy.
Les trois garnements se sont bien trouvés. Jamais en manque d’idées lorsqu’il s’agit d’être cruels.
— Trop z’est trop ! s’emporte Zack
C’est décidé les deux justiciers vont passer à l’action ! »

- Mon avis sur le livre -

La collection Saute-Mouton, le retour ! Je ne le dirais sans doute jamais assez, mais cette collection mérite vraiment à être plus connue dans le domaine de la littérature jeunesse : librairies spécialisés, bibliothécaires et institutrices, je vous conseille plus que chaleureusement de faire une petite place dans vos étagères pour ces petits romans qui accompagnent les petits lecteurs de leurs « premières lectures » jusqu’à leur entrée au collège, où ils seront fin prêts à découvrir de plus gros ouvrages ! Des thématiques variées (aventure, imaginaire, humour …), mais toujours tournées vers de belles valeurs (solidarité, amitié, respect du vivant, tolérance …). Des histoires parfois très joliment illustrées, et toujours très bien racontées … Bref, je ne peux que recommander cette collection, et ce roman-ci ne fait pas exception, même si pour la première fois, j’ai quelques bémols à apporter …

Jack – dit Zach du fait de son zozotement – et Malouka ont dix ans. Ils sont inséparables et n’ont pas froid aux yeux : bien décidés à lutter contre la méchanceté et l’égoïsme, les deux écoliers décident de faire justice dans le village. Le colonel perceur de ballons perdus ? Les collégiens harceleurs qui martyrisent des chats ? La femme égoïste qui se gare systématiquement sur les places réservées aux personnes handicapées pour ne pas avoir à marcher quelques centaines de mètres ? Le directeur d’une entreprise supra-polluante ? Le maire qui refuse d’accueillir dans son village une famille de réfugiés ? Tout le monde y passe : les « Bébés flingueurs » n’ont peur de rien ! Mais voilà, à force d’être victimes des blagues des deux enfants justiciers anonymes, les villageois commencent à en avoir marre ….

Je vais le dire tout net : j’ai énormément rigolé en lisant ce petit roman ! Nos deux garnements ne manquent pas d’idées pour « punir » les villageois trop égoïstes, trop intolérants, trop cruels : messages enroulés autour de flèches à ventouses qu’ils envoient droit entre les deux yeux, mise en scène audio de rugissements de lion pour faire fuir les noyeurs de félins, bombes à eau … Ils s’attaquent à toutes les incivilités du quotidien : le vieux grognon qui détestent les enfants et n’hésitent pas à crever les ballons qui ont le malheur de tomber dans son jardin, la dame parfaitement valide qui occupe les places pour personnes à mobilité réduite pour ne pas faire quelques pas de plus … Les adultes s’obstinent à apprendre les bonnes manières et la politesse aux enfants, mais force est de constater qu’ils sont les premiers à être incorrects envers les autres, trop centrés sur leur petite personne pour songer aux autres. 

Et bien souvent, les enfants ont envie de les mettre face à cette contradiction. Lorsque nous étions au primaire, mes camarades et moi n’avions pas hésité à réprimander sérieusement le maire qui nous remerciait « de veiller au bien être des habitants en participant à l’opération Haut-Rhin propre » … et qui, en parallèle, venait d’autoriser la construction d’une antenne-relais bien trop proche des premières habitations … Il ne fait absolument aucun doute que les petits lecteurs et les petites lectrices s’identifieront très facilement à Zach et Malouka : tous les enfants sont un jour témoins de ce genre de situation et rêvent de dire leurs quatre vérités à ces adultes totalement incohérents, intolérants, égoïstes et parfois même méchants ! Et c’est là qu’apparait mon petit bémol : j’ai un peu peur que ce livre n’incite certains enfants à suivre l’exemple des deux petits héros … qui vont parfois bien trop loin (ils ont tagués une voiture en pleine nuit !). Certes, à la fin, Zach et Malouka se rendent compte qu’il est temps d’arrêter ces « farces punitives », mais il n’empêche que ce roman valorise un peu trop l’action de ces mini-justiciers …

En bref, vous l’aurez bien compris, si j’ai beaucoup rigolé en lisant ce livre – qui a un côté franchement satisfaisant : les adultes ont parfois drôlement besoin d’être remis à leur place ! –, je suis un peu perplexe quant à l’idée de le proposer à des enfants qui risqueraient de prendre cela au pied de la lettre et de vouloir imiter Zach et Malouka … Je pense donc vraiment que ce n’est pas un petit roman à proposer en lecture autonome : il vaut mieux le faire en « lecture partagée », pour que l’adulte puisse tout de suite calmer les ardeurs des petits lecteurs désireux de devenir un petit justicier ! J’ai beaucoup aimé la plume de Sébastien Gayet, à la fois très simple mais très vivante : c’est vraiment un petit roman fait pour être lu à haute voix, il invite à une lecture théâtralisée ! Un appel à la bienveillance et à la tolérance … pour enfants farceurs !

Ce livre a été lu dans le cadre du Tournoi des 3 Sorciers
(plus d’explications sur cet article)