samedi 7 septembre 2024

Outsphere, tome 4 : Ordres et Chaos - Guy-Roger Duvert

Outsphere4, Guy-Roger Duvert

Ordres et Chaos

 Editeur : Autoédition
Nombre de pages : 305
Résumé : C'est au tour de Vanessa Fulton de se réveiller d'un sommeil séculaire. Eden a encore évolué, s'enfonçant de plus en plus dans un monde quasi médiéval où la violence est reine. Pour autant, les vestiges de ce qui fut la civilisation terrienne ne sont peut-être pas tous éteints. Accompagnée de chasseurs de reliques d'un côté et de curieux rescapés de l'autre, elle entame une véritable odyssée à travers les terres connues en conservant un espoir ténu, mais qu'elle refuse d'abandonner : retrouver un jour celui qui était connu sous le nom du colonel Jake Bowman...

 Un grand merci à Guy-Roger Duvert pour l’envoi de ce volume et à la plateforme SimPlement pour avoir rendu ce partenariat possible.

 

- Un petit extrait -

« Le vaisseau parcourait l'espace dans un silence de mort. Il filait, tranquillement, à travers des cieux qu'aucun humain n'avait franchis depuis longtemps. Sa coque, d'un gris métallisé, était dramatiquement endommagée, tandis que des débris se détachaient régulièrement de la structure pour se perdre dans le vide sidéral.  »

- Mon avis sur le livre -

 Lorsqu’il sort de son sommeil artificiel à bord du vaisseau Hespéride, le colonel Lemoine découvre simultanément trois choses. La bonne nouvelle, c’est qu’ils sont bien arrivés à destination. La mauvaise nouvelle, c’est qu’ils ont plusieurs siècles de retard. La très mauvaise nouvelle, c’est que le vaisseau, terriblement endommagé, va se crasher sur Eden. Accompagné de quelques membres de son équipe, réveillés à la va-vite, l’officier parvient à rejoindre une capsule d’évacuation et à rejoindre « sans encombre » la surface de la planète, sans savoir ce qui les y attend. Loin du paradis espéré, Eden est une planète hostile où la faune et la flore semblent rivaliser d’inventivité pour tuer les rescapés du crash … Mais ils ne sont pas au bout de leurs surprises. Voici que des hommes semblant sortir tout droit du Moyen Age, avec flèches et épées, leur tombent dessus ! L’humanité s’est belle et bien installée sur cette planète. Mais l’ère de la technologie, elle, semble belle et bien révolue …

Nouveau tome, nouvelle ellipse temporelle : plusieurs siècles (si ce n’est millénaires) ont passés depuis que nous avons quitté Bowman. Et les choses ont bien changées. Au fil du temps, l’humanité a régressé, au point d’oublier qu’elle venait d’une autre planète, au point d’ignorer que d’autres espèces ont elles aussi foulé le sol d’Eden. Seuls quelques individus, chasseurs de reliques ou fanatiques mystiques, savent que Ceux d’Avant ont réellement existés et qu’ils ont laissés derrière eux des objets mystérieux qui se revendent à prix d’or. Outre la régression technologique, la nouvelle civilisation humaine a également connu un terrible déclin sociétal : ici règne l’anarchie la plus complète, sans foi ni loi, là règne au contraire une dictature implacable … La violence est omniprésente, banale pour les habitants de ce nouveau monde. Effrayant pour les quelques rescapés de l’Hespéride, déconcertant pour Vanessa Fulton enfin réveillée de son sommeil artificiel. Comment en est-on arrivé là ? Est-ce seulement le fruit de la nature humaine, si prompte à l’auto-destruction ? Ou bien est-ce la faute à une Menace plus grande encore, car invisible et indéterminée ? On se demande bien quelle éventualité est la plus terrible …

La bascule amorcée dans le troisième tome se confirme ici : peu à peu, nous quittons le domaine de la science-fiction pour nous introduire dans celui de la fantasy. Car la technologie a laissé place à la magie : auparavant, les choses « étranges » s’expliquaient scientifiquement, désormais elles relèvent du surnaturel, de ce qu’on ne peut pas comprendre. Nous ne sommes pas dans une société plus évoluée que la nôtre, comme c’est généralement le cas dans un roman d’anticipation ; au contraire, nous découvrons une société que nous qualifierons de « médiévale », d’archaïque donc. C’est vraiment ce qui fait selon moi toute l’originalité de cette saga : elle prend le schéma « habituel » à contre-pied, elle va à contre-courant. On se dit qu’une civilisation qui parvient à rejoindre et coloniser une planète dans une autre galaxie est forcément une civilisation si évoluée qu’elle ne fera qu’évoluer toujours plus … Mais Guy-Roger Duvert, lui, nous présente une civilisation qui, arrivée dans son nouvel environnement, semble avoir le « besoin » inconscient et collectif de revenir à l’origine de la civilisation humaine. Comme s’il fallait forcément repartir de zéro pour que puisse émerger une société vraiment nouvelle sur une nouvelle planète. Peut-être que la rupture est trop grande pour qu’on puisse seulement poursuivre « comme avant » …

Mais qu’à cela ne tienne : science-fiction ou fantasy, le cœur de cette saga, c’est tout de même l’aventure. L’exploration. Et quoi de tel qu’un nouveau dépaysement pour relancer la soif de découvertes et de compréhension ? Entre l’arrivée d’un nouveau vaisseau et le réveil de Fulton après des centaines et des centaines (et des centaines) d’années, les personnages sont en quelques sortes aussi perdus que le lecteur. Nous avons tous tout à apprendre ou réapprendre. Les dangers sont nombreux, mais surtout nouveaux. Difficile de savoir à qui se fier, de qui se méfier : tous les personnages sont finalement issus d’une époque, d’une société différente. Ce qui est banal, normal, évident, pour les uns est étrange, déconcertant, effrayant pour les autres, et vice-versa. Et pourtant, ils parviennent à se trouver des buts communs, à cheminer ensemble pour une épopée des plus périlleuses … et donc, forcément, palpitantes pour le lecteur. Alors il faut bien le reconnaitre, à force de lire du Guy-Roger Duvert, on connait bien ses petites habitudes, ses péripéties préférées, ses embûches favorites : il n’y a plus forcément d’effet de surprise, mais cela n’est pas bien grave. Ça marche à tous les coups : à chaque fin de chapitre, on meurt d’envie de se jeter sur la suite. Et généralement, on le fait aussitôt !

Si je veux être parfaitement honnête, il y a bien un petit quelque chose qui m’a plus chiffonnée dans ce tome que dans les précédents : nous sommes tellement centrés sur l’action que les personnages manquent parfois de profondeur. Ils ont plutôt tendance à être des « rôles » : d’ailleurs, bien souvent, ils sont désignés par leur fonction. Le soldat, la pilote, le chasseur de reliques, la scientifique, et non pas Olsen, Kim, Salvatore et Fulton. Ni même le téméraire, l’indécise, le pragmatique, la réfléchie. Ils sont parfois « réduits » à leur métier ou leurs compétences, comme s’ils n’étaient que cela. Alors qu’ils sont humains, donc forcément plus,  normalement. Au bout de quatre tomes, j’aurai aimé me sentir plus « attachée » à Vanessa, mais c’est difficile, car elle apparait parfois comme une coquille vide. Un cerveau plein, comme on s’y attend d’une brillante scientifique, mais pour le reste, elle n’a pas de consistance : il lui manque de l’émotion, de l’émotivité, de la personnalité. Et c’est de même pour tous les autres : ils font beaucoup de choses, mais ne sont pas assez. Le livre étant finalement assez court, et se lisant assez vite, cela n’aurait à mes yeux pas été superflus de s’attarder un peu plus longuement sur ce qui se tapit au cœur de chaque personnage, au lieu de ne s’attacher qu’à leurs actes. Mais disons que c’est un détail.

Car, je pense que vous l’aurez bien compris : une fois encore, ce fut un réel plaisir que de retrouver la plume de Guy-Roger Duvert. Il offre toujours au lecteur des récits terriblement palpitants, prenants, qui se lise vite et bien. Qui se dévore, pour ainsi dire. Quand bien même, parfois, on a le sentiment de tourner un peu en rond, ou que l’intrigue traine inutilement en longueur, on ne peut pas s’empêcher de trouver chaque péripétie absolument fascinante. Quand bien même, parfois, on regrette de ne pas se sentir proche des personnages, on ne peut pas s’empêcher de trembler d’effroi ou soupirer de soulagement pour eux. On se laisse, en quelque sort, prendre au jeu, comme si c’était nous qui étions sur Eden, comme si c’était nous les héros de cette épopée. Et ce genre d’immersion, c’est quelque chose que peu de livres offrent, je trouve. Mais ceux de Guy-Roger Duvert, eux, l’offrent systématiquement. La cerise sur le gâteau, c’est que l’intuition et l’espoir qui me traversaient en lisant le second tome des Rodeurs de l’Empire étaient justifiés : oui, les deux sagas se rencontrent, et ça, c’est quelque chose de vraiment très audacieux que je trouve absolument génial ! Du coup, j’ai vraiment hâte de voir ce que cela va donner … pour les deux sagas !

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