samedi 11 décembre 2021

Central Park - Guillaume Musso

Central Park, Guillaume Musso

 Editeur : XO éditions

Nombre de pages : 383

Résumé : New York, huit heures du matin. Alice, jeune flic parisienne, et Gabriel, pianiste de jazz américain, se réveillent menottés l’un à l’autre sur un banc de Central Park. Ils ne se connaissent pas et n’ont aucun souvenir de leur rencontre. La veille au soir, Alice faisait la fête avec ses copines sur les Champs-Élysées tandis que Gabriel jouait du piano dans un club de Dublin. Comment se sont-ils retrouvés dans une situation aussi périlleuse ? Pour comprendre ce qui leur arrive et renouer les fils de leurs vies, Alice et Gabriel n’ont pas d’autre choix que de faire équipe. La vérité qu’ils vont découvrir va bouleverser leur existence…

 

- Un petit extrait -

« Il est des épreuves que l'on ne surmonte jamais vraiment, mais auxquelles on survit, malgré tout. Une partie de moi était décousue, meurtrie, détruite. Le passé continuait à m'étouffer, mais j'avais la chance d'avoir auprès de moi des gens qui m'empêchaient de sombrer. »

- Mon avis sur le livre -

 Vous le savez, je ne suis généralement pas du genre à me laisser dicter ma conduite, en particulier sur le plan littéraire : je lis ce que je veux pour me faire mon propre avis sur la question, sans me préoccuper des avis plus ou moins divergents des uns et des autres … Mais je dois bien le reconnaitre, concernant le si fameux duo « Musso-Levy » qui phagocyte les trois-quarts des rayonnages des librairies et espaces culturels, je n’ai pas réussi à rester totalement neutre. Lorsqu’un livre ou un auteur ne récolte que des avis ostensiblement élogieux et étrangement similaires, une alarme se déclenche instinctivement dans mon esprit : méfiance, « c’est trop unanime pour être honnête », il y a forcément dans le lot des lecteurs plus circonspects qui n’osent pas faire de vague … Cette défiance a été renforcée par le fait que les (rares) avis discordants, quant à eux, sont particulièrement critiques, pour ne pas dire franchement hostiles. Autant vous dire que les quelques ouvrages de ces deux auteurs que j’ai acquis pour une bouchée de pain lors de diverses bourses aux livres n’ont donc pas cessés d’être relégué tout au fond de la pile à lire … Mais cette année, j’ai pris la décision d’enfin lire les romans qui m’ont été choisis par des camarades de challenges, et c’est ainsi que malgré mon manque profond d’enthousiasme, je me suis retrouvé à lire du Musso … et ce n’était clairement pas si mauvais que je le craignais.

Lorsqu’Alice, capitaine de police à la brigade criminelle de Paris, se réveille ce matin-là, ce n’est ni dans son lit, ni dans sa voiture ni même dans son bureau. Non, Alice se réveille sur un banc au beau milieu de la partie la plus sauvage de Central Park, le chemisier tout ensanglanté, avec pour seuls effets personnels sa montre et un flingue qui n’est pas le sien, auquel il manque une balle … et surtout, la main droite menottée au poignet gauche de cet illustre inconnu qui dort encore comme un bienheureux. Sans le moindre souvenir de comment elle a bien pu atterrir là, à plusieurs heures d’avion de chez elle, alors qu’elle était encore sur les Champs-Elysées avec des amies la veille au soir. Bien décidée à comprendre comment elle s’est retrouvée dans cette situation des plus incongrues et quelque peu terrifiante, la jeune femme embarque sans ménagement son compagnon d’infortune (Gabriel, pianiste, en concert à Dublin la veille au soir, du moins si elle en croit ses dires) dans une enquête improvisée en terre inconnue … enquête qui va raviver les souvenirs les plus douloureux de sa carrière, si ce n’est de toute son existence. Alice parviendra-t-elle à dénouer les fils de cette énigme ? Et surtout, peut-elle véritablement faire confiance à Gabriel ?

Le moins que l’on puisse dire, c’est que Musso commence fort, très fort même : la scène d’exposition est particulièrement originale et intrigante. Deux illustres inconnus, l’une vivant à Paris et l’autre en concert à Dublin, se retrouvent sans savoir comment ni pourquoi enchainés l’une à l’autre en plein cœur de Central Park, avec pour seuls « indices » des séries de numéros inscrits sur leurs bras … Une situation suffisamment inattendue pour balayer toutes mes réserves : ça commençait drôlement bien ! Alors bien sûr, il ne m’a fallu que quelques pages pour « deviner » qu’une horrible histoire de coup de foudre bien clichée allait venir parasiter ce qui apparaissait pourtant comme une intrigue particulièrement haletante, et mon intuition s’est bien évidemment révélée exacte, mais l’envie de savoir ce qui leur était arrivé était suffisamment grande pour que j’accepte de fermer les yeux sur cet insupportable travers pseudo-romantique qui gangrène beaucoup trop de récits actuels. Fort heureusement pour moi, malgré quelques passages dégoulinants qui m’ont fait lever les yeux au ciel, je n’ai pas eu trop à me plaindre de cette sous-intrigue, et j’ai donc pu me concentrer sans soucis sur l’histoire à proprement parler : cette enquête pas tout à fait comme les autres qui promettait d’être riche en rebondissements et en révélations !

Et le moins que l’on puisse dire, c’est que contre toutes attentes, Guillaume Musso a su tenir les promesses de son incipit. Il nous offre un thriller psychologique haletant, qui ne nous laisse absolument aucun instant de répit : pas le moindre temps mort pour nous permettre de reprendre notre souffle ou prendre un peu de recul sur la situation … Il nous tient en haleine du début à la fin, faisant monter la tension et la pression au fur et à mesure qu’Alice et Gabriel progressent dans leur enquête. Car chaque nouvelle découverte, chaque nouvelle révélation ravive un peu plus ce sentiment d’urgence latent depuis la première page : il n’y a plus une seconde à perdre. Il faut en finir, et vite. Pour Alice, il ne s’agit plus seulement de comprendre, il s’agit d’agir : si son ravisseur est bien celui qu’elle croit, il ne lui échappera pas une seconde fois. Cette fois-ci, elle ne laissera rien ni personne s’immiscer entre elle et lui. Le passé et le présent s’entremêlent et se répondent, dans un va et vient constant qui nous fait tourner la tête. Alors même que nous tentons de suivre le rythme effréné de l’intrigue, le rythme survolté d’Alice, nous avons parfois ce sentiment fort confus que quelque chose est en train de nous échapper, que les choses vont beaucoup trop vites, sont parfois même beaucoup trop évidentes pour être vraies … Mais tout est fait pour que nous ne ressassions pas bien longtemps cette impression fugace, tandis qu’un nouveau rebondissement nous oblige à tout reprendre à zéro, ou presque.

Et c’est peut-être là que le bât blesse : la ficelle est trop grosse, on sent bien que l’auteur veut que nous nous jetions la tête la première dans cette interprétation, dans cette direction, on sent qu’il veut nous empêcher de voir la vérité en ne nous donnant que des informations savamment dosées, au compte-goutte, au moment le plus opportun pour que nous sautions allégrement aux conclusions hâtives. On sent qu’il nous assomme de retournements de situations, qui finissent d’ailleurs par être quelque peu répétitifs et monotones, pour mieux nous empêcher de réfléchir plus en profondeur sur la question. Ça manque en quelque sorte de subtilité, et c’est un peu dommage. Alors, je ne vais pas mentir, cela a parfaitement bien marché : alors même que je me doutais que quelque chose ne tournait pas rond, que les choses étaient loin d’être ce qu’elles semblaient être, alors même que je me suis mise à échafauder des dizaines d’hypothèses toute aussi farfelues les unes que les autres, je n’ai pas réussi à deviner (entièrement) le pot aux roses et je suis tombée de haut lors de la grande révélation finale ! J’ai donc été fort surprise par le « contenu » de ce retournement de situation terminal, qui surpassait absolument tout ce que j’avais bien pu imaginer, mais j’aurai vraiment préféré ne pas m’attendre à un retournement de situation terminal … Là, je savais bien qu’on me menait par le bout du nez.

En bref, vous l’aurez bien compris, je dois bien reconnaitre que ce fut une agréable surprise qui a su balayer tous mes préjugés et donc surpasser toutes mes attentes … malgré tout, je dois aussi reconnaitre qu’il m’a manqué un petit quelque chose pour être totalement conquise. A vouloir surprendre profondément le lecteur (ce qui est tout à son honneur), l’auteur en a finalement fait trop, au point que le lecteur pressent qu’il doit s’attendre à un twist final … et l’effet de surprise en est donc partiellement gâché ! Et c’est d’autant plus dommage que ce coup de théâtre était particulièrement bien trouvé, vraiment audacieux : tout fait sens, et pourtant rien ne nous y préparait, du vrai génie ! Mon second petit regret, ainsi que je l’ai exprimé au début, c’est la présence d’une histoire d’amour bien clichée, avec des passages qui se veulent émouvant mais qui n’ont réussi qu’à m’agacer tant c’était prévisible et sans saveur : contrairement à beaucoup de lecteurs, je me serai fort volontiers passé des fameux « il y aura », trop parachutés pour me plaire. Bon sang, Alice et Gabriel ne se connaissent que depuis quelques jours, même pas, et poum il lui fait une déclaration larmoyante et ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants ? Non, désolée, ça ne prend pas avec moi, mieux aurait valu s’arrêter à la résolution fracassante du mystère, ça c’était puissant ! Mais bon, on ne peut pas tout avoir, n’est-ce pas ?

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