samedi 27 avril 2019

Personne ne m'a dit - Hollie McNish


Personne ne m’a dit, Hollie McNish
Le journal d’un nouveau parent

Editeur : Solar
Nombre de pages : 458
Résumé : A 26 ans, Hollie McNish n'était pas prête à devenir maman. Quand elle découvre qu'elle est enceinte, alors que son copain lui annonce qu'il la quitte, elle est loin de s'imaginer tout ce qui l'attend, toutes ces choses dont on ne lui avait pas parlé ... Sous la forme d'un journal écrit sur le vif à quatre heures du matin, aux toilettes, à l'hôpital, au travail, parfois interrompus par des cris, et parfois inachevés, ce livre raconte son expérience personnelle, son ressenti et ses réflexions de jeune parent, saison après saison, depuis le test de grossesse jusqu'aux 3 ans de sa fille.

Un grand merci aux éditions Solar pour l’envoi de ce volume et à la plateforme Babelio pour avoir rendu ce partenariat possible.

- Un petit extrait -

« Au cours de la matinée, je ne trouve plus mon stylo. Je le cherche partout sur mon bureau. Quand je demande à ma collègue si elle le voit, elle rit d’un air entendu en disant que j’ai le syndrome du neurone unique. J’entends souvent cette expression aux réunions du groupe pour les parents de nouveau-nés. Elle renvoie à la théorie, dénuée de tout fondement scientifique, selon laquelle le cerveau de la femme se remplit de ouate après l’arrivée de l’enfant. Seules les femmes ont l’air d’user de cette expression. Les hommes du groupe, non. Je n’ai jamais entendu parler du syndrome du neurone unique des papas. Les hommes ne disent pas cela. Parce qu’ils n’en souffrent pas : ils appellent ça être « défoncés de fatigue », reflet plus fidèle de la réalité. Bien joué, les papas. Pour les mamans, j’ajouterais volontiers quelques mots, pour dire qu’elles sont « défoncées de fatigue alors qu’elles gèrent les effets psychologiques et physiques d’une transformation interne et externe totale de leur corps ». »

- Mon avis sur le livre -

Parmi les questions récurrentes à propos de mon « activité » de blogueuse, il y a le fameux « mais qu’est-ce que cela t’apporte ? ». Si je me contente généralement de répondre « du bonheur, tout simplement », puisque je ne me suis jamais sentie aussi épanouie que depuis l’ouverture du blog, je suis bien souvent obligée d’apporter un peu plus de précision, mon interlocuteur estimant que ce n’est pas une réponse satisfaisante. Comme s’il fallait obligatoirement que cela m’apporte un élément à ajouter à mon CV, que cela m’ouvre des portes pour mon avenir professionnel, voire même que cela me permette de renflouer mon compte en banque ! Je suis donc obligée de répéter sans cesse que la seule chose que je recherche à travers ce blog, ce sont le partage et la découverte. J’aime échanger avec d’autres lecteurs. Et j’aime élargir mes horizons littéraires en testant de nouveaux genres, en sortant de ma zone de confort. C’est ainsi que je me suis retrouvée avec ce témoignage d’une slameuse féministe entre les mains … Et une fois encore, l’équipe de Babelio a visé juste en me proposant cet ouvrage, ce fut vraiment une belle lecture !

Tandis qu’Hollie, 26 ans, est sur le chemin qui la conduit vers sa toute première scène de poésie, elle découvre qu’elle est enceinte. La joie et le désarroi se disputent la suprématie dans son esprit. Désemparée, désarmée, effrayée, émerveillée. Elle décide alors de commencer à tenir un journal, un journal de « toutes les choses dont elle ne pouvait pas parler » avec son entourage. Jours après jours, saisons après saisons, elle raconte les joies et les peines, les petits et les gros tracas du quotidien, les réflexions, les doutes, les maladresses … Elle raconte l’amour qui grandit pour ce petit être qui vit déjà en elle, le bonheur et la peur de voir grandir Petite Chérie qui fait ses premiers pas dans ce monde de folie. Elle raconte les moments de désespoir, de découragement, les douleurs, les larmes et les cris qui ne demandent qu’à sortir mais qu’elle doit réfréner. Elle raconte comment elle est parvenue, progressivement, à apprivoiser le mot « maman » …

Ce témoignage, donc, n’en est pas réellement un : comme l’explique l’auteure dans les remerciements, elle ne pensait pas publier un jour ce journal intime … Elle ressentait juste le besoin de coucher sur papier toutes ses pensées, tous ses états d’âme, d’écrire ce qu’elle ne pouvait pas dire à haute voix, ce qu’elle pensait tout bas. Puisque ces mots n’étaient pas destinés à être publier, elle a écrit sans jamais s’autocensurer, et cet ouvrage est donc vibrant de sincérité et d’authenticité ! Elle évoque ainsi sans pudeur la difficulté à apprivoiser ce corps qui se transforme soudainement, la terreur de mourir pendant l’accouchement, la question de la sexualité après l’accouchement. Elle parle ainsi sans honte du calvaire de l’allaitement en public, de la fatigue qui s’accumule au fil des mois, de la peur de mal faire alimentée par les articles des magazines et les émissions télévisées. Devenir maman, ce n’est pas uniquement donner naissance à un enfant, selon Hollie : c’est une véritable transformation, physique comme psychique. A travers ce journal, à travers ces poèmes, Hollie raconte à quel point c’est dur, d’être maman. Mais aussi à quel point c’est beau. Ce livre, c’est aussi une déclaration d’amour d’une mère à sa fille, d’une mère qui passe ses nuits à regarder son nourrisson dormir, d’une mère qui passe ses journées à s’émerveiller d’avoir donné la vie à ce petit être incroyable. Je l’admets volontiers : j’ai pleuré bien des fois, tellement c’était émouvant !

Mais Hollie ne parle pas uniquement de sa relation avec sa Petite Chérie, cette petite fille qu’elle a portée pendant neuf mois et qui grandit désormais un petit peu plus chaque jour. Elle couche également sur papier ses éclats de colère : ne pourrait-on pas la laisser élever sa fille comme elle l’entend ? De quel droit diable d’illustres inconnus se permettent-ils continuellement de la juger, de la critiquer, de la blâmer ? Est-ce trop demander, de pouvoir allaiter tranquillement sa fille sans avoir à le faire dans les toilettes publiques, au milieu d’odeurs nauséabondes et de milliards de bactéries, sans recevoir de remarques désobligeantes face à quelque chose de parfaitement naturel et bénéfique pour ce petit être fragile et innocent ? Est-ce trop demander, de pouvoir s’assoir dans le métro quand on va accoucher dans deux jours et qu’on ressemble à une montgolfière ambulante, sans avoir en plus à faire face aux regards haineux de ceux qui pointent du doigt en hurlant « tu es trop jeune pour être mère » ? Est-ce trop demander, de pouvoir acheter deux biberons sans avoir à subir un discours de persuasion expliquant qu’il est nécessaire pour le bon développement de l’enfant d’acheter également une lotion pour le bain de bébé ? Est-ce trop demander, de pouvoir acheter un blouson de pluie résistant qui ne soit pas étiqueté « pour petit garçon », ou un vélo avec un panier qui ne soit pas estampillé « pour petite fille » ? Entre questionnement et effarement, Hollie dresse un portrait fort peu flatteur de notre monde actuel … 

En bref, vous l’aurez bien compris, j’ai vraiment beaucoup aimé ce livre ! A travers ce journal, l’auteure livre un portrait bouleversant de la maternité, avec ses bons et ses moins bons côtés. Elle parle de sa vie de nouvelle maman, parlant des bons comme des mauvais moments. Elle évoque la peur et la douleur, mais aussi le bonheur et la douceur. Et tout cela sans le moindre filtre, sans la moindre retenue : Hollie livre ses pensées à l’état brut, comme elles viennent, sans se préoccuper de la bienséance ou des « qu’en dira-t-on ? ». Elle raconte tout ce qu’elle a sur le cœur, sans rien cacher, sans rien dissimuler. Elle explique qu’elle a choisi d’agir comme elle l’entendait, comme elle le sentait, comme elle le souhaitait, même s’il est parfois difficile de ne pas céder à la pression de l’entourage et de la société. Ce livre, à sa manière, est révolutionnaire : il invite à ne pas se laisser influencer par les « conseils d’amis », par les remarques et autres réflexions plus ou moins bienveillantes, et encore moins par les grandes sociétés qui cherchent à profiter de la vulnérabilité des parents débordés pour leur faire acheter tout et n’importe quoi, en titillant la culpabilité inhérente à la peur de mal faire pour faire toujours plus de profit … A la fois témoignage et manifeste, ce livre bouleverse et interpelle !

Ce livre a été lu dans le cadre du Tournoi des 3 Sorciers
(plus d’explications sur cet article)

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