Cycle 5, tome 5 : Une forêt divisée
Editeur : Pocket Jeunesse (PKJ)
Nombre de pages : 366
Résumé : Les esprits du Clan des Étoiles ont parlé : pour survivre, les chats des montagnes doivent accroître leur nombre et étendre leur territoire. Et vite. Ciel Bleu est persuadé que le seul moyen d’y parvenir est de rester unis, mais il peine à convaincre et les chefs se divisent les terres. C’est la création des clans. Il est maintenant temps pour les chats de décider où ils veulent vivre et à qui prêter allégeance...
« – Nous avons voyagé ensemble jusqu’ici, marmonna-t-il comme pour lui-même. Maintenant, nous ne partageons même plus de gibier.
– À qui la faute ? gronda Oiseau Frêle. C’est toi qui t’es retourné contre les tiens.
– C’est faux ! J’ai toujours fait ce que je pensais le mieux pour protéger les miens.
– Alors que fais-tu ici, tout seul ? Qui s’occupera de toi ? »
Lorsque tout va mal dans ma vie, lorsque mes projets s’effondrent comme un château de cartes emportés par le vent, lorsqu’un tout petit rien m’angoisse tant et si bien que je n’arrive plus à rien faire … la lecture a toujours été là, réconfort inestimable, bouée de sauvetage dans la tourmente. Mais depuis quelques semaines, si ce n’est quelques mois, les choses vont tellement mal qu’elles m’empêchent même de profiter de ces parenthèses littéraires : il y a toujours quelques choses pour m’empêcher de lire sereinement, posément, tranquillement, voire de lire tout court. Je ne compte plus le nombre de fois où j’ai dû remanier entièrement mon planning de lecture pour continuer à honorer mes divers engagements en dépit d’une ribambelle d’imprévus ou de crises de migraine qui m’ont contrainte à annuler purement et simplement des séances de lecture. Et je pense d’ailleurs que c’est cela qui me donne vraiment le sentiment d’être au fond du trou ces derniers temps : puisque je n’arrive même plus à faire l’unique chose qui me remonte un tant soit peu le moral, comment voulez-vous que je remonte la pente ? Généralement, il ne me faut qu’une après-midi pour lire un tome de La guerre des clans : avec tout ceci, il m’aura fallu quatre jours entiers pour réussir à en venir à bout …
Nuit après nuit, les chats-esprits ne cessent de convoquer en songe Gris Poil, Ciel Bleu, Tonnerre, Rivière Ondoyante, Ombre Noir et Vent Vif, les exhortant un peu plus fortement à chaque fois à se hâter de « croitre et se déployer comme l’Etoile Flamboyante », de « suivre leur cœur, qui les conduira chez eux ». Mais les meneurs se déchirent pour savoir quel sens donner à ces messages énigmatiques : tandis que Gris Poil continue de penser qu’ils doivent se séparer en cinq groupes, tout comme l’Etoile Flamboyante comporte cinq pétales se déployant dans toutes les directions, Ciel Bleu est quant à lui absolument convaincu qu’ils doivent au contraire se regrouper, ne reformer qu’une seule et unique Tribu pour survivre à la mauvaise saison à venir … Persuadé que c’est le seul et unique moyen de réparer ses torts passés, qui ont couté la vie à tant de leurs compagnons, il doit cependant se rendre à l’évidence : ni ses frères ni même son propre fils ne sont prêt à lui accorder leur pardon ou leur confiance. Et tandis que les chats de la lande se dispersent, les uns rejoignant l’île de Rivière Ondoyante, les autres suivants Ombre Noire dans la pinède, et d’autres décidant malgré tout de rejoindre son propre camp protégé au cœur de la forêt, Ciel Bleu n’a désormais plus qu’une idée en tête : les ramener à la raison et leur faire comprendre que sa voie est l’unique interprétation à donner aux propos de leurs amis défunts …
Cela me coute beaucoup de l’écrire, car c’est bien la première fois que cela arrive, mais je dois tout de même le reconnaitre : cette fois-ci, les autrices m’ont quelque peu déçue. Elles ont comme qui dirait allégrement piétiner les personnalités de leurs personnages, tant et si bien qu’on se demande si on parle toujours du même chat. Où est donc passé la sage et juste Ombre Noire ? A peine arrivée dans la pinède, elle se met à revendiquer avec arrogance et mépris son statut de cheffe, à traiter comme un chaton totalement inutile son vieil ami Gris Poil fatigué par la maladie mais toujours si désireux de bien faire et de veiller sur les siens. Où est donc passé le doux et loyal Pic Crochu ? A croire que devenir père lui a fait perdre toute bienveillance et toute indulgence, même envers son frère ainé qui a pourtant tout quitté pour veiller sur lui. Et que dire de Tonnerre ? Il est certes courageux et déterminé, mais il est aussi bien trop jaloux et rancunier par moment : qu’il en veuille à son père est parfaitement compréhensible au vue des circonstances, mais refuser d’aller chercher celui-ci pour qu’il puisse faire ses adieux à sa mère mourante, c’est bien loin de coller avec son idéal d’entraide et de solidarité qu’il brandit comme un étendard au-dessus de sa tête. Je pourrais continuer encore longtemps, mais je pense que vous aurez compris le problème : dans ce tome, tous les personnages semblent s’être égarés en même temps, ils font absolument n’importe quoi et deviennent tous aussi insupportables les uns que les autres …
Fort heureusement, pour une fois, le plus important n’est pas vraiment le cheminement personnel de nos « héros » (qui ne méritent pas tout à fait ce rôle dans ce tome). Non, à mes yeux de lectrice passionnée par la saga, le plus important dans ce tome, c’est que l’histoire franchit un cap absolument crucial et déterminant … Car ça y est, nous y sommes enfin, les cinq groupes, les cinq futurs Clans sont définis, avec à leur tête ceux qui deviendront les tous premiers chefs ! Nous l’attendions avec impatience, ce moment, et celui-ci ne cessait de se défiler : il en aura fallu, du temps et des détours, pour en arriver là ! Alors bien sûr, il reste encore bien du chemin à parcourir pour que ces cinq groupes, encore très unis les uns aux autres par des liens de parenté ou d’amitié très puissants, deviennent cinq Clans véritablement indépendants … et encore plus de chemin à parcourir pour que naissent le fameux Code du guerrier et les nombreux rituels qui rythment la vie des Clans tels que le lecteur les connait. Mais avec ce tome, c’est vraiment l’ère des Clans qui débute, et c’est vraiment un moment particulièrement émouvant … et parfois très éprouvant et déchirant, car tout comme les chats qui ont quitté les montagnes ont tourné le dos à des proches, ici aussi, des frères, des amis, ont pris des chemins divergents, ou bien au contraire ont renoncé à leurs aspirations propres pour suivre leurs proches.
Difficile en effet de suivre son cœur, quand on a peur de briser ceux des êtres qui nous sont chers … mais d’un autre côté, est-il possible d’être heureux en allant à l’encontre de ses envies profondes, juste pour ne pas faire de peine à l’autre ? Plus que jamais, les personnages principaux doivent faire face à ce dilemme : qui doivent-ils faire passer en premier ? Bien sûr, c’est bien plus noble, beau, honorable de faire passer les autres avant soi-même … mais La guerre des clans a ce mérite de ne pas toujours présenter des héros absolument chevaleresques, altruistes jusqu’au bout des griffes. Et c’est justement parce qu’ils sont parfois égoïstes, parce qu’ils ne sont pas parfaits, qu’on s’attache à eux, qu’on se sent proches d’eux. Alors certes, on éprouve du respect pour Gris Poil, qui refuse d’abandonner son fils adoptif, son frère cadet, son amie et qui décide de les suivre dans la pinède alors que cet environnement lui déplait et accentue sa maladie, mais on éprouve encore plus de soulagement lorsqu’il décide finalement de suivre son cœur, de suivre sa propre route plutôt que de s’obliger à cheminer là où n’est pas sa place. De même, on peut éprouver de l’admiration pour Tonnerre qui, malgré tout ce qu’il lui a fait, choisit tout de même de rejoindre son père pour l’aider – même si c’était fort naïf de sa part d’imaginer que Ciel Bleu allait l’écouter, mais c’est une autre histoire –, mais on en éprouve encore plus lorsqu’il tient tête à ce dernier pour ensuite tracer, lui aussi, le chemin qui lui est propre … C’est quand ils écoutent leur cœur et non leur tête, leur raison, qu’ils sont le plus attachants, finalement.
En bref, vous l’aurez bien compris, je n’ai finalement pas grand-chose à dire sur ce tome : il est finalement relativement calme, relativement simple … et pourtant, c’est sans doute le plus important de tout le cycle. Et c’est vraiment ce que j’ai énormément apprécié, malgré le fait que tous nos chats se comportent comme de vraies cervelles de souris : c’est en toute discrétion que se déroule la plus grande révolution que la forêt n’ait jamais connu. Peut-être parce que, d’une certaine manière, les choses deviennent enfin telles qu’elles doivent être : il n’y a aucune résistance parce tout s’imbrique comme il le faut. Et c’est sans doute ce qui explique cette « sérénité » qui m’a accompagnée durant toute ma lecture : c’était comme si le chaos s’organisait enfin pour donner naissance à la plus douce, la plus familière des harmonies. J’avais vraiment des doutes sur l’intérêt, l’utilité de ce cycle, mais maintenant que j’arrive à la fin, je n’ai absolument plus aucun doute : c’est un cycle particulièrement intéressant, enrichissant, puissant … qui redonne un nouveau souffle à la saga en changeant de perspective. Une sorte de retour aux origines pour mieux reprofiter du fil rouge « habituel » par la suite, on va dire. En tout cas, j’ai hâte de voir ce que va donner le tome suivant, car cette fin fait vraiment froid dans le dos, j’ai un peu peur de ce qui nous attend (serait-ce … serait-ce également la naissance du Clan du Sang ?) !
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