samedi 2 mars 2019

La bibliothèque des citrons - Jo Cotterill


La bibliothèque des citrons, Jo Cotterill

Editeur : Fleurus
Nombre de pages : 360
Résumé : À dix ans, Calypso n'a pas d'ami et trouve refuge dans les livres de sa bibliothèque, qu'elle dévore. Sa solitude prend fin le jour où arrive dans sa classe une nouvelle, Mae, qui bouscule ses habitudes de lectrice solitaire et lui ouvre les horizons insoupçonnés de l'amitié. Cette amitié tombe à pic, car à la maison les choses tournent de moins en moins rond. Son père, veuf depuis cinq ans, vit muré dans son travail et son silence. Il s'est attelé à l'écriture d'une histoire encyclopédique du citron. Par une froide soirée d'automne, ces maudits agrumes vont brusquement déverser sur la vie de Calypso une amertume parfaitement inattendue...

- Un petit extrait -

« A l'école, les autres enfants n'essaient plus de m'avoir pour meilleure amie. J'aime bien jouer avec eux -ce n'est pas que je n'aime pas les gens. Mais pour être honnête, je préfère les livres. J'aime l'espace de calme qu'ils créent dans ma tête ; un espace où peuvent surgir des mondes magiques, des îles ou des mystères.   »

- Mon avis sur le livre -

Au moment de commencer ce roman à la couverture pétillante et acidulée, je ne savais que deux choses de l’histoire : la petite héroïne aime beaucoup lire et son papa écrit un livre sur les citrons. Autant vous dire que je m’attendais à une histoire totalement loufoque, très drôle et vraiment légère, idéale pour récupérer après deux semaines fort studieuses et une crise de migraine fort douloureuse … Comme quoi, les apparences sont parfois trompeuses ! Derrière ce titre plutôt intriguant, dont on ne comprend la signification qu’au milieu de l’histoire, se cache quelque chose de bien plus profond, de bien plus sérieux que l’on ne peut le penser au premier abord … Et c’est vraiment une très belle surprise !

Cela fait cinq ans que la mère de Calypso est morte, emportée par un cancer foudroyant. Cinq ans qu’elle vit avec son père, correcteur littéraire très occupé à finaliser l’œuvre de sa vie : un ouvrage encyclopédique réunissant toutes les connaissances de l’humanité au sujet des citrons. Cinq ans qu’elle veille à ce qu’il n’oublie pas de diner et qu’il l’exhorte à trouver sa « force intérieure » pour ne pas avoir besoin des autres pour être heureuse … Solitaire, elle passe ses récréations à dévorer les nombreux romans que sa mère lui a légué. Mais tout bascule le jour où la nouvelle, Mae, l’aborde dans la cour. Comme Calypso, Mae aime lire, énormément. Comme Calypso, Mae aime écrire, secrètement. Petit à petit, elles deviennent amies … et toutes les certitudes de Calypso fondent comme neige au soleil. 

Calypso est une petite fille incroyablement attachante que l’on a immédiatement envie de protéger : livrée à elle-même, elle souffre sans se l’admettre de l’attitude de son excentrique de père, trop absorbé par l’écriture de son ouvrage pour songer à préparer les repas, lancer une machine à laver ou aller faire les courses. Elle tente d’appliquer ses conseils et de se suffire à elle-même, de ne pas se laisser submerger par la tristesse ou le découragement, mais sans parvenir à trouver cette « force intérieure » auquel il croit si fort. Alors, ne pouvant se réfugier dans les bras de son père, elle se réfugie dans les livres, et je me suis aussitôt identifiée à elle : tout comme Calypso, je passais les récréations le nez plongé dans un roman, indifférente aux enfants qui couraient et hurlaient tout autour de moi ; tout comme elle, j’ai rapidement essayé d’écrire mes propres histoires dans mon cahier de brouillon ; tout comme elle j’estimais ne pas avoir besoin d’une amie pour être heureuse. Mais Calypso a eu plus de chance que moi : elle a rencontré Mae. On le sent rapidement, cette rencontre va bouleverser la vie de Calypso … mais on est bien loin de se douter comment.

Quel plaisir que de voir Calypso, jusqu’alors si discrète et sérieuse, s’ouvrir à l’amitié et aux rires, redevenir une petite fille de son âge avec ses rêves et son insouciance ! Quel bonheur que de voir ces deux fillettes jouer à reconstituer les scènes de leurs livres préférés, s’efforcer de remettre en état la vieille cabane du jardin pour en faire leur endroit secret, essayer d’écrire une histoire à quatre mains ! Quelle belle amitié, quelle belle complicité, quelle belle complémentarité ! Aux côtés de Mae l’intrépide, Mae l’impulsive, Mae la sensible, Calypso apprend à ne pas avoir peur de ses émotions, à ne pas les refouler ni les camoufler. Elle découvrir qu’on est tellement plus fort à deux, que cela fait parfois tellement de bien de laisser quelqu’un autre être fort à sa place, et que s’attacher à quelqu’un n’a rien de mal ou de dangereux, bien au contraire. Et au fur et à mesure que Calypso découvre la famille de Mae, elle se rend compte que quelque chose ne tourne pas rond dans sa propre famille, même si celle-ci n’est plus composée que de deux membres ….

Et c’est à ce moment-là que le récit bascule. D’une belle histoire d’amitié pleine de rires et de sourires, on sombre dans quelque chose d’incroyablement plus profond … et de plus douloureux, également. Jusqu’à présent, aux yeux du lecteur, le père de Calypso n’était qu’un écrivain un peu extravagant et tête en l’air, passionné par les citrons et amoureux de la solitude. On se rend finalement compte que cet homme a été totalement brisé par la mort de sa femme, qu’il n’est jamais parvenu à faire totalement son deuil et qu’il s’est englué dans une dépression aux accents citronnés … Et on tombe de haut, car jusqu’alors, on le blâmait sévèrement d’être aussi distant avec sa fille, aussi indifférent, aussi absent. On avait envie de le secouer pour qu’il abandonne quelques heures son Histoire des citrons pour aller faire les courses, on avait envie de lui crier dessus pour qu’il s’occupe un peu de sa fille … et non pas le contraire. Car ce livre aborde finalement la question des enfants-veilleurs, obligés d’endosser le rôle d’adulte responsable pour pallier à la maladie d’un parent … Il l’aborde sans détour mais avec tendresse, avec sobriété mais sans maladresse. C’est à la fois déchirant et incroyablement émouvant !

En bref, vous l’aurez bien compris, ce petit roman jeunesse a été une très belle surprise ! Derrière ce titre farfelu et cette couverture acidulée se cache tout d’abord une très belle histoire d’amitié, mignonne et émouvante, légère et rafraichissante, qui donne envie de danser et de crier de joie. Mais La bibliothèque des citrons n’est pas une simple histoire d’amitié : c’est également une histoire de famille, bouleversante, troublante, touchante … et tellement belle, également. Car pas une seule fois l’autrice ne sont dans le pathétique, dans le tragique à outrance, dans le déprimant. Bien au contraire. C’est une histoire pleine d’espoir, de douceur et de poésie. C’est une histoire dont on tourne la dernière page avec un grand sourire, parce qu’on sait que Calypso et son père sont sur la bonne voie … Pour conclure, c’est un livre que je conseille aux petits comme aux grands : la narration est suffisamment « simple » pour s’adresser aux jeunes lecteurs et suffisamment « riche » pour satisfaire les adultes ! Un livre à offrir et à s’offrir absolument !


Ce livre a été lu dans le cadre du Tournoi des 3 Sorciers
(plus d’explications sur cet article)

2 commentaires:

  1. Eh bien je suis contente qu'il t'aie plu :)
    De mon côté je ne l'ai pas encore lu...

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  2. Je l'ai lu il y a quelque temps et j'avais adoré ma lecture, meme si cest tres jeunesse jai ete vraiment comblé par cette lecture !

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