Le temple oublié
Editeur : Autoédition
Nombre de pages : 253
Résumé : À seize ans, Mylard travaille comme extracteur dans la sphère d’ambre d’Oflang. Son quotidien dans les mines est éreintant et morne jusqu’au jour où le jeune homme commet une énorme erreur. Une erreur impardonnable aux yeux des contes, ces êtres surpuissants qui dirigent le monde des hommes. Amenés avec son petit frère Yann à quitter le foyer familial, ils se retrouvent contraints de traverser un monde rempli de magies, de menaces et de mystères.
Un grand merci à Fabien Delmotte pour l’envoi de ce volume et à la plateforme SimPlement pour avoir rendu ce partenariat possible.
« Ecoute, nous n’avons pas le temps de tout t’expliquer. Ce que tu dois savoir, c’est que les contes ne sont pas des hommes. Il y a très longtemps, c’était des démons, invoqués et contrôlés par nos mages. Des événements tout aussi nombreux que tragiques ont permis à ces créatures de nous envahir. Le monde a évolué. La magie a muté, renforçant les démons, et désarmant nos mages. Ils ont exterminé les rois et pris le pouvoir en s’attribuant le rang de conte. Nous sommes devenus esclaves d’une poignée de monstres. »
Il y a quelques jours, sur l’un des sites littéraires que je fréquente, une membre nouvellement inscrite est venue nous expliquer avec beaucoup d’aplomb quels étaient les quatre critères qui, réunis, conféraient à un récit le qualificatif de « génial » et dont l’absence d’un seul l’estampillait « nul ». Elle nous affirmait par ailleurs que seuls les « auteurs reconnus et sous contrat avec un grand éditeur » étaient capables d’intégrer ces fameux critères à leurs ouvrages … Je dois bien reconnaitre avoir eu envie de baffer cette personne : de quel droit se permettait-elle d’imposer ainsi sa vision des choses, et par conséquent de tous nous juger, nous autres pauvres lecteurs qui aimons des ouvrages ne remplissant pas ses critères, comme des sous-lecteurs ignares et dépourvus de bon gout ? C’est ce genre de snobisme littéraire qui m’a donné envie de me tourner vers les auteurs indépendants : pour prouver que l’autoédition n’est pas une sous-littérature et qu’on y trouve de très bons ouvrages, qui valent amplement voire surpassent parfois les romans de l’édition traditionnel.
Du haut de ses seize ans, comme presque tous les jeunes de son âge, Mylard passe la majeure partie de son temps à ramper dans des tunnels pour y extraire le plus d’ambre possible : seuls les enfants et adolescents de moins de dix-sept ans sont capables d’arracher l’ambre au dôme gigantesque qui surplombe le village … Bien qu’éreintant et potentiellement très dangereux (on ne compte plus le nombre de gamins qui ont perdu un doigt, voire une main, pour avoir été inattentif ou avoir paniqué au mauvais moment), ce travail a au moins le mérite de lui donner un salaire lui permettant d’aider sa famille. Mais tout bascule le jour où il libère sans le vouloir un démon primaire enfoui au cœur de l’ambre, s’attirant les foudres du conte, représentant d’une race douée de magie qui contrôle la région. Contraint de fuir avec son petit frère Yann, le jeune homme va tâcher de retrouver sa sœur ainée, qui a disparu il y a quelques années. Mais leur quête sera parsemée d’embûches, de rencontres plus ou moins heureuses et de mystères inexplicables …
Je ne vais pas vous mentir : j’ai eu énormément de mal à m’immerger dans ce récit. Le début avait cette fâcheuse tendance à trainer en longueur et à accumuler banalités sur platitudes (« les derniers gagnants que je connais, c’est l’équipe d’Harry qui a battu celle de Drago à la balle », sérieusement, Mylard, face à une créature indiscutablement magique, tu n’aurais pas pu trouver quelque chose d’un peu plus sérieux qu’un match entre gosses d’un petit village ?), et je dois reconnaitre que j’avais un peu peur quant à la suite de l’histoire. Fort heureusement, la fuite survint suffisamment tôt : on ne s’enlise pas dans une situation initiale à rallonge, c’est déjà un bon point, même s’il n’y a finalement pas grand-chose de palpitant à suivre deux frères se chamaillant sans cesse au milieu des bois. L’auteur a sans doute pensé cela comme des touches d’humour destinées à alléger un peu le récit, mais ça ne l’a clairement pas fait avec moi : comment voulez-vous ressentir l’urgence de la fuite effrénée pour éviter d’être tué quand un gamin passe son temps à se plaindre qu’il a mal aux pieds et que son ainé accumule les maladresses comme le premier des imbéciles ? Trop d’humour, en fantasy, se fait au détriment de la quête : il faut choisir, et j’ai ici le sentiment que l’auteur n’était pas prêt à cela, et c’est un peu dommage car on oscille beaucoup trop entre high et light fantasy …
Les choses s’arrangent quelque peu lorsque le petit duo rencontre Alina et Flora, même si on conserve toujours cette ambivalence : on sent qu’il y a quelque chose de louche derrière tout cela … mais pourtant, on se laisse avoir lorsque survint véritablement le retournement de situation. On s’attendait à quelque chose de pas clair, mais on ne s’attendait pas à cela spécifiquement : on est donc à la fois surpris par ce rebondissement inattendu, mais un peu blasé car on se doutait bien que quelque chose ne tournait pas rond et que c’est finalement un peu trop « cliché ». Et c’est un peu comme cela pour toutes les péripéties qui jonchent ce récit : elles sont un peu trop convenues, un peu trop déjà vues, même si on sent que l’auteur a tenté de nous offrir quelque chose de surprenant et de captivant. Du coup, d’un côté, on se laisse prendre au jeu et on grimace de dépit à chaque nouvelle embûche, on croise les doigts à chaque nouvelle épreuve … et de l’autre, on a juste envie de soupirer et de lever les yeux au ciel car il n’y a rien de nouveau sous le soleil. Il manque finalement un petit quelque chose pour que cette histoire se démarque véritablement de la masse de romans de fantasy qui sortent chaque semaine : les idées originales étaient belles et bien là, mais sont en quelque sorte noyées sous ces lieux communs de la fantasy.
Mais comme je le disais, malgré tout … je me suis laissée prendre au jeu. C’est certes loin d’être le récit le plus original que j’ai eu l’occasion de lire, et Mylard est bien loin d’être le protagoniste auquel je me suis le plus attachée (c’est pareil, sa personnalité est un peu trop creuse, on sent qu’il a été conçu pour être « le héros », mais il lui manque la profondeur qui aurait fait de lui un vrai « personnage ») … mais on se laisse finalement happé par cette histoire. On tourne les pages sans s’en rendre compte, et même si on tique de temps en temps face à certaines situations, on a tout de même terriblement envie de les voir réussir à déjouer toutes les embûches qui se dressent sur leur route. Petit à petit, on laisse de côté notre sens critique pour ne conserver que la soif de l’aventure, et on se dit « tant pis si c’est cliché, tant pis si tout se résout trop aisément, tant pis si on avait deviné tel ou tel rebondissements à l’avance, tant pis si telle révélation n’est finalement pas si fracassante car prévisible », et on se contente de suivre nos héros dans leurs pérégrinations, en croisant les doigts pour qu’ils parviennent à leurs fins. Et en cela, l’auteur a réussi son pari : le lecteur finit par faire fi des quelques « défauts » pour se concentrer exclusivement sur la quête, tout envahi qu’il est par l’envie de voir les « gentils » avoir le dernier mot !
En bref, vous l’aurez bien compris, c’est une lecture en demi-teinte : la lectrice « critique » que je suis désormais ne peut s’empêcher de regretter le manque d’originalité du récit, mais la lectrice « bon public » que je suis également ne peut que se laisser happer par cette histoire d’aventure et d’amitié. C’est un roman qui est plein de bonnes idées, mais que l’auteur n’a finalement pas exploitées jusqu’au bout, s’arrêtant aux lieux communs du genre sans y ajouter « le » petit truc en plus qui rendrait son récit véritablement unique. Je pense donc que c’est un ouvrage qui s’adresse bien plus à ceux qui découvrent la fantasy, et non pas aux grands adeptes du genre qui ressentiront bien plus ce côté « déjà vu » qui peut rebuter un peu. De la même manière, je le conseillerai bien plus à un jeune public, qui sera par essence moins « perturbé » par les réactions un peu « enfantines » de Mylard, qu’aux adultes qui auront tendance à lever les yeux au ciel lorsque celui-ci reste bloqué sur son ressentiment vis-à-vis de son illettrisme … Ce n’est donc pas un mauvais roman, bien loin de là, c’est juste un roman qui doit trouver son public, et je n’en faisais peut-être pas totalement parti.
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